par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
ERREUR DEFINITION
Dictionnaire juridique
Définition de Erreur
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L'"erreur" est une "méprise". Le droit s'intéresse à l'erreur soit pour la rectifier soit pour en tirer des conséquences sur la validité de l'acte qui en est entaché. L'acquiescement à un jugement n'emporte pas renonciation à en demander la rectification pour cause d'erreur matérielle, s'il n'est pas établi que l'acquiescement est intervenu en connaissance de l'erreur invoquée. (2ème Chambre civile 7 juillet 2011, pourvoi n°10-21061, BICC n°752 du 1er décembre 2011 et Legifrance).
Un notaire avait commis une erreur sur l'ordre des privilèges et le paiement était intervenu sans atteinte au principe de l'égalité des créanciers chirographaires. L'URSSAF et la banque étant des créanciers privilégiés, la cour d'appel en a exactement déduit que ce paiement n'ouvrait pas droit à répétition, dès lors que l'URSSAF et la banque n'avaient reçu que ce que leur devait le débiteur (1ère Chambre civile 24 octobre 2019, pourvoi n°18-22549, Legifrance).
La loi pourvoit à la rectification des erreurs affectant les actes de l'état civil et celles affectant les jugements. En ce qui concerne les premiers elle prévoit une procédure simplifiée qui est confiée au Procureur de la République lorsqu'il s'agit d'erreurs purement matérielles et au Tribunal judiciaire lorsque le rétablissement des mentions de l'acte nécessite une appréciation juridique.
En ce qui concerne les jugements, c'est à la juridiction qui a statué qu'il incombe de réparer l'erreur matérielle qu'elle a commise. (3e Chambre civile, 22 mars 2018, pourvoi n°17-14168, BICC n°886 du 15 juillet 2018 et Legifrance). L'affaire est alors remise au rôle d'une proche audience et il est statué contradictoirement. Le jugement rectificatif fait alors corps avec le jugement rectifié et sur la minute, le Greffier fait porter une mention renvoyant au jugement rectificatif. Après son dessaisissement, la cour d'appel reste seule compétente pour réparer une erreur ou une omission matérielle affectant les dispositions du jugement qui lui a été déféré et ce, même si elle a déjà statué (2ème Chambre civile 22 septembre 2011 pourvoi n°11-10118, BICC n°754 du 15 janvier 2012 et Legifrance). L'article 462 du code de procédure civile ne fixant pas de délai de comparution devant le juge chargé de réparer les erreurs et omissions matérielles affectant un jugement, les dispositions des articles 643 et 645 du même code, qui ont pour objet d'augmenter un tel délai, ne sont pas applicables (2ème Chambre civile 18 octobre 2012, pourvoi n°11-24807, BICC n°776 du 15 février 2013 et Legifrance).
Cette procédure qui ne vise pas à trancher une contestation sur un droit de caractère civil, n'entre pas dans le champ d'application de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'article 462 du code de procédure civile ne fixant pas de délai de comparution devant le juge chargé de réparer les erreurs et omissions matérielles affectant un jugement, ce juge apprécie souverainement qu'il a été laissé un temps suffisant aux parties pour préparer leur défense et si, avant de statuer sans audience sur une requête en rectification d'une erreur ou omission matérielle, le juge doit s'assurer que la requête a été portée à la connaissance des autres parties, aucun texte ne prescrit une telle exigence dans le cas où les parties sont convoquées à l'audience en vue de statuer sur une requête en rectification d'erreur matérielle (2e Chambre civile 16 mars 2017, pourvoi n°15-26744, BICC n°868 du 1er octobre 2017 et Legifrance).
La procédure en rectification de l'erreur matérielle affectant un jugement, même passé en force de chose jugée, est soumise aux règles de représentation des parties applicables à la procédure ayant abouti à cette décision. (2e Chambre civile 11 avril 2019, pourvoi n°18-11073, BICC n°909 du 15 octobre 2019 et Legifrance).
Une partie ne saurait sous le prétexte d'erreur matérielle remettre en cause la décision rendue. Sont seuls rectifiables les erreurs matérielles commises par le juge. Si l'erreur provient d'une partie, il lui appartient d'exercer les voies de recours que la loi met à sa disposition. N'ont pas été considérées comme réparables par voie de rectification d"erreur matérielle notamment les erreurs d"ordre « intellectuel », les appréciations inexactes d"un fait, d"une responsabilité, d'une preuve ou de tout autre « élément de la cause », les erreurs d"ordre juridique concernant l'application ou même le visa d"une règle de droit, la confusion sur la personne d"une partie, la signature d"un jugement par un magistrat n"ayant pas connu de l"affaire. Dans ces cas seule une voie de recours peut offrir la possibilité d'une rectification. Ainsi viole les articles 462 et 463 du code de procédure civile la cour d'appel qui qualifie d'erreur matérielle l'omission faite dans son dispositif d'une prétention sur laquelle elle s'est expliquée dans ses motifs. Dans ce cas, il s'agissait non d'une erreur matérielle, mais bien d'une omission de statuer. (3e Chambre civile 6 mai 2009, BICC n°710 du 1er novembre 2009 et Legifrance).
Dans le cas du mariage, si le consentement d'un des époux a été donné par erreur, elle ne peut entraîner la dissolution du mariage que dans la seule mesure où cette méprise a porté, soit sur l'identité de la personne avec laquelle celui qui s'en plaint a été marié, soit sur les qualités essentielles du conjoint, et à condition encore que ces éléments aient été déterminants. La nullité est couverte dès que la cohabitation a duré six mois. Relativement à la liquidation de la communauté se pose la question de l'omission intervenant dans la convention que les époux soumettent à homologation. Une telle convention quand elle a été homologuée a la même force exécutoire qu'une décision de justice, et ne peut donc être remise en cause. Il est jugé cependant qu'un époux divorcé demeure recevable à présenter une demande ultérieure tendant au partage complémentaire de biens communs ou de dettes communes omis dans l'état liquidatif homologué (1ère Chambre civile, 30 septembre 2009, pourvoi : 07-12592, BICC n°717 du 1er mars 2010 et Legifrance).
En matière contractuelle, l'erreur peut être envisagée d'une part, comme cause de nullité du contrat et d'autre part, comme source d'enrichissement sans cause. Dans le premier cas, l'erreur n'est cause de nullité que lorsqu'elle porte sur la substance et qu'il est démontré que, sans elle, la partie qui l'a subie n'aurait pas donné son accord à la formation du contrat. La Cour de cassation a jugé que l'erreur sur un motif du contrat extérieur à l'objet de celui-ci, notamment sur le régime fiscal du bien acquis, n'est pas, faute de stipulation expresse, une cause de nullité de la convention, quand bien même ce motif aurait été déterminant. (CIV.3. - 24 avril 2003, BICC 1er août 2003, n°968). En revanche, toute erreur fût-elle de droit, portant sur l'objet même de la contestation, peut conduire à la rescision d'une transaction. (1ère Chambre civile 17 juin 2010, pourvoi n°09-14144, BICC n°731 du 15 novembre 2010 et Legifrance). Consulter sur ce sujet la note de Madame Cécile Le Gallou référencée dans la Bibliographie ci-après et 1ère Civ., 22 mai 2008, pourvoi n°06-19643, Bull. 2008, I, n°151.
L'erreur peut aussi être la source d'un enrichissement sans cause, lorsqu'un payement a été fait à tort à une personne qui n'était pas créancière du payeur. Dans ce cas, la loi a prévu une action que la doctrine dénomme l'action en "répétition de l'indu".
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Textes
Bibliographie