par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



NULLITE DEFINITION
Dictionnaire juridique

Définition de Nullité

en partenariat avec
Baumann Avocats Droit informatique

La nullité est la sanction de l'invalidité d'un acte juridique, ou d'une procédure. soit que la cause de la nullité réside dans l'absence de l'utilisation d'une forme précise qui est légalement imposée, soit qu'elle résulte de l'absence d'un élément indispensable à son efficacité. Par exemple une convention est nulle si le consentement donné par l'une des parties à l'acte a été vicié par dol. En procédure l'assignation à comparaître. est nulle si elle ne porte pas les mentions exigées par l'article 56 du Nouveau Code de procédure civile.

L'acte nul de nullité absolue ne pouvant être rétroactivement confirmé, les parties désirant contracter, après la disparition de la cause de cette nullité, sont tenues, lorsque la validité de leur convention est soumise à des formes prévues par la loi, de conclure un nouveau contrat, dans les formes ainsi requises, qui produit ses effets à compter de sa formation (Chambre commerciale, 26 septembre 2018, pourvoi n°16-25937, BICC n°895 du 1er février 2019 et Legifrance).

Selon la règle générale du droit français, le juge ne peut prononcer la nullité d'une convention ou d'une procédure que si cette sanction a été expressément prévue par la loi. On exprime ce principe par l'adage : "Pas de nullité sans texte" D'autre part, il résulte de l'article 114 du code de procédure civile, prévoyant qu'un acte ne peut être annulé qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité : seul le destinataire d'un acte est recevable à se prévaloir de la nullité de cet acte en raison d'une irrégularité de forme l'affectant. (2e Chambre civile 1er septembre 2016, pourvoi n°15-16918, BICC n°856 du 17 février 2017 et Legifrance).

Toutes les exceptions de nullité concernant l'invalidité de la procédure doivent être soulevées "in limine litis" c'est à dire avant toute défense sur le fonds (CPC art. 112 et 113). Il a été jugé par la Cour de cassation (Cass. 1ère civ., 25 mars 2003. Juris-Data n°2003-018412.) que l' exception de nullité ne peut être invoquée que pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté. En revanche l'exception est irrecevable si la convention a été exécutée ou si elle a reçu un commencement d'exécution. (1re Chambre civile 15 janvier 2015. pourvoi n°13-25512 et 13-25513, BICC n°820 du 15 avril 2015 et Legifrance). Il convient de rappeler que, si l'action en nullité est soumise à prescription, en revanche, l'exception de nullité est perpétuelle. Consulter la note de M. Ludovic Lauvergnat dans la Gazette du Palais 2015, 1, p. 18.

La règle selon laquelle l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte qui n'a pas encore été exécuté ne s'applique qu'à compter de l'expiration du délai de prescription de l'action ; qu'après cette date, l'exception n'est recevable que si l'acte n'a pas commencé à être exécuté (Chambre commerciale 31 janvier 2017, pourvoi n°14-29474, BICC n°863 du 1er juin 2017 et Legifrance). Consulter la note de M. Vincent Roulet, JCP 2017, èd. G., Act. 170.

Lorsque la nullité n'est pas "de droit" elle peut être couverte, ce qui permet à l'auteur de l'acte nul, de le recommencer ou de le confirmer. On comprend dès lors qu'ait été cassé l'arrêt d'une Cour d'appel qui avait rejeté une exception de nullité sans rechercher si la nullité invoquée était une nullité relative alors que seule une telle qualification la rendait inopposable en cas d'exécution de l'obligation découlant de l'acte (1ère chambre civile, 20 mai 2009, pourvoi : 08-13018 BICC n°711 du 15 novembre 2009 et Legifrance). Voir aussi, 1ère Civ., 13 février 2007, pourvoi n°05-18097, Bull. 2007, I, n°97.

Les nullités de fond sont invocables en tout état de cause et sans qu'il soit besoin de démonter qu'elles ont fait grief à ceux qui les invoquent. En revanche, celui qui excipe d'une nullité de forme doit nécessairement établir qu'elle lui fait grief. A titre d'exemple on a noté l'arrêt du 8 mars 2006 (3ème Ch. Civ. - 8 mars 2006, BICC n°643 du 1er juillet 2006 et Legifrance) selon lequel les formalités édictées par l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 relatives à la validité de l'engagement de la caution lors de la signature d'un bail, sont prescrites à peine de nullité du cautionnement sans qu'il soit nécessaire d'établir l'existence d'un grief. Autre exemple cet arrêt de la Cour d'appel de Lyon (C. A. Lyon. 8ème Ch. civ. 21 février 2006 - BICC n°643 du 1er juillet 2006) selon lequel tout congé notifié par un mandataire doit clairement identifier le bailleur en mentionnant son nom ou sa dénomination sociale, peu important que le locataire ait connaissance en fait de cette identité, que dès lors le congé avec offre de renouvellement sans indication du nom du bailleur est nul, en raison de ce qu'elle a causé un grief au locataire qui ne pouvait vérifier la qualité de l'auteur du congé. Et concernant une nullité de forme, la Cour de cassation a jugé que la nullité d'un congé avec offre de vente, délivré, en application de l'article 15-II de la loi du 6 juillet 1989, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ne peut être prononcée que si, conformément à l'article 114 du code de procédure civile, celui qui l'invoque justifie d'un grief. (3e Civ. - 15 mai 2008, BICC n°688 du 1er octobre 2008). Constitue un simple vice de forme insusceptible, sans autre grief, d'entraîner la nullité d'une assignation, l'indication d'une heure d'audience erronée. (2ème Chambre civile 20 octobre 2011, pourvoi n°10-24109, et Legifrance). Consulter la note de M. Roger Perrot référencée dans la Bibliographie ci-après.

Voir les mots "Confirmation". "Fin de non-recevoir" et "Inexistence".

Textes

  • Code civil, articles 6, 180 et s., 1108 et s, 1126 et s, 1131 et s, 1304, 1844-10 et s.
  • Code de Procédure civile, articles 112 et s, 175 et s., 430, 446, 458, 649 et s., 693 et s., 698,771.
  • Code de commerce, articles L210-7, L235-1 et s. L253-1. (sociétés).
  • Décret n°78-704 du 3 juillet 1978, articles 15 et 16 relatif à l'application de la Loi 789 du 4 janvier 1978 modifiant le Titre IX du Livre III du Code civil : De la société.
  • Bibliographie

    La nullité dans le droit procédural

  • Bourgeois (M.), La sanction des irrégularités de forme commises lors de l'élaboration des jugements, Quot. jur. 1984, 115.
  • Du Rusquec, Nature et régime des nullités pour vice de forme. Gaz. Pal. 1979, Doct.136.
  • Du Rusquec, Nullité substantielle ou d'ordre public et preuve d'un grief. Gaz. Pal. 1977, II, Doct.559.
  • Lemée, La règle "pas de nullité sans grief" depuis le NCPC, RTC 1982, 23.
  • Tomasin, Remarques sur la nullité des actes de procédure, Mélanges Hébraud, 1981, 853.
  • Ségur (L.), L'inexistence en procédure, JCP 1968, I, 2129.
  • La nullité. dans le droit des personnes et dans le droit des contrats

  • Carbonnier (J.) et Droit civil. t.1, Les personnes : personnalité, incapacités, personnes morales. 21ème éd. refondue pour "Les personnes" ; 17e éd. refondue pour "Les incapacités, Paris : PUF, 2000.
  • Gauriau (B.), La nullité du licenciement. thèse Paris I, 1992.
  • Guelfucci-Thibierge (C.), Nullité, restitutions et responsabilité, Paris, LGDJ 1992.
  • Guilloux (L.), La nullité de la stipulation pour autrui, 1952.
  • Marhuenda (C.), Etude de droit comparé sur la nullité des brevets dans le contexte européen, Paris, édité. par. l'auteur. 1999.
  • Maugeri (V.), Conventions indivisibles et exception de nullité, Revue Lamy droit civil, n°62, juillet-août 2009, Actualités, n°3488, p. 12-13, note à propos de 1ère Civ. - 20 mai 2009.
  • Mazeaud (H.), Chabas (F.) et Leveneur (L.), Leçons de droit civil. 01.3, La Famille, mariage, filiation, autorité parentale, divorce et séparation de corps. - 7e. éd, Paris : Montchrestien, 1995.
  • Paris (A.), Nullités relatives et nullités absolues : histoire d'une distinction - XVIIe-XIXe siècles, Paris, édité par l'auteur, 1999.
  • Perrot (R.), Assignation à comparaître. Revue Procédures, n°12, décembre 2011, commentaire n°367, p.12-13, note à propos de 2e Civ. - 20 octobre 2011.
  • Rouquet (Y.), Bail commercial : périmètre de l'exception de nullité, Recueil Dalloz, n°9, 4 mars 2010, Actualité jurisprudentielle, p. 502-503, note à propos de 3e Civ. - 3 février 2010.
  • Simler (P.), La nullité partielle des actes juridiques, Paris, LGDJ., 1969.
  • Trinh Dinh Tieu et Marty (G.), Les différents cas d'erreur sur la personne cause de nullité du mariage dans les droits canonique et français, Toulouse, impr. Soubiron, 1962.
  • Vich-Y-Llado (D.), L'exception de nullité, Répertoire Defrénois, 2000, n°22, p. 1265.
  • Vinckel (F.), L'acte suspect ou la théorie des nullités à l'épreuve des procédures collectives, thèse, Paris II, 1999.

  • Liste de toutes les définitions