par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
BREVET DEFINITION
Dictionnaire juridique
Définition de Brevet
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Dans le très ancien droit français, le "brevet" était un document portant le sceau royal qui était remis à une personne à laquelle était concédé un droit. C'était notamment le cas de certains officiers des armées royales qui recevaient un "brevet" leur conférant un rang dans les armées ou dans la Marine royale. Des diplômes portent encore cet intitulé (brevet de pilotage des avions).
Le mot est encore utilisé en droit notarial. Les notaires reçoivent deux types d'actes. Les uns, de loin les plus nombreux, sont gardés en original dans leurs études sous le nom de "minutes", parce qu'au temps où ces actes étaient manuscrits, ils étaient écrits en petits caractères et ce par opposition aux "grosses" dont il sera question à propos des jugements. On connaît l'expression "fait en minute" ou "conservé au rang des minutes de M° Untel Notaire ".
D'autres actes, nommés les "brevets" ou actes "dressés en brevet " dont, en pratique les notaires ne conservent qu'une copie, sont délivrés en original à l'intéressé, et ils sont signés à la fois par le Notaire et par le déclarant, et pour certains actes par des témoins.
Encore qu'aucune règle ne s'oppose à ce qu'ils puissent donner lieu à des actes faits en minutes, les "mandats" ou "procurations" sont généralement dressés "en brevet". Dans ce cas, l'original de l'acte n'est pas conservé par le Notaire, mais remis au requérant c'est généralement le cas des procurations.
Le mot "brevet" est plus connu du public lorsqu'il désigne le titre délivré aux inventeurs par l'Institut National de la Propriété Industrielle. Aux termes de l'article L. 613-9 du code de la propriété intellectuelle, tous les actes transmettant ou modifiant les droits attachés à un brevet doivent, pour être opposables aux tiers, être inscrits sur le registre national des brevets et en application de l'article L 614-11 du Code de la propriété intellectuelle l'inscription au registre européen des brevets des actes transmettant ou modifiant les droits attachés à une demande de brevet européen ou à un brevet européen rend ces actes opposables aux tiers. Est irrecevable à agir en contrefaçon de brevet européen le cessionnaire dudit brevet qui n'a pas procédé à l'inscription du contrat de cession au registre européen. La cession d'un brevet étant intervenue après délivrance du brevet européen et expiration du délai d'opposition, l'inscription au registre national des brevets, reste seule possible. Elle rend cette cession opposable aux tiers (chambre commerciale, 15 septembre 2009, pourvoi n°08-18523, BICC n°716 du 15 février 2010 et Legifrance). Voir la note de Madame Filiol de Raimond référencée sur la Bibliographie ci-après.
Un brevet peut être exploité sous le régime de la copropriété. Consulter sur le sujet, la note de Madame Adeline Cerati-Gauthier référencée dans la Bibliographie ci-après. Par application de l'article L. 613-29 du code de la propriété intellectuelle, pour être valable, la cession d'un brevet indivis ne peut être initiée que par un des copropriétaires et à hauteur de sa seule quote-part, moyennant l'observation d'une procédure particulière. Dès lors que la cession litigieuse n'a pas été initiée par le copropriétaire du brevet, mais par un tiers à la copropriété, au surplus pour le tout sans égard pour le formalisme prévu en la matière, cette cession est nulle (chambre commerciale, 18 novembre 2008, pourvoi n°07-17749, Legifrance).
Le droit de propriété sur un brevet naît le jour de son dépôt à l'Institut national de la propriété industrielle et l'annulation d'un brevet entraîne son anéantissement au jour du dépôt de la demande de brevet, (Chambre commerciale,12 juin 2007, pourvoi n°05-14548, Legifrance). Dans les rapports entre époux mariés sans contrat de mariage préalable, si un brevet dont le mari était l'inventeur a été déposé postérieurement à la date d'effet de la dissolution de la communauté légale, les redevances à percevoir au titre de l'exploitation de ce brevet n'entrent pas dans l'actif indivis post-communautaire. (Chambre commerciale 4 octobre 2011 pourvoi n°10-21225, BICC n°755 du 1er février 2012 et Legifrance).
La faculté de procéder à une saisie-contrefaçon en matière de brevet ou de certificat complémentaire de protection n'est ouverte qu'aux personnes énumérées à l'article L. 615-2 du code de la propriété intellectuelle qui justifient non seulement de l'existence du titre sur lequel elles se fondent mais également de ce que celui-ci est toujours en vigueur à la date de présentation de la requête (chambre commerciale 14 décembre 2010, pourvoi n°09-72946, BICC n°740 du 15 avril 2011 et Legifrance). Consulter aussi la note de M. Caron référencée dans la Bibliographie ci-après et Com., 29 janvier 2008, pourvoi n° 07-14709, Bull. 2008, IV, n° 18.
Lorsqu'une décision de justice annule un brevet cette décision n'a un effet absolu, au sens de l'article L. 613-27 du code de la propriété intellectuelle qu'une fois qu'elle est passée en force de chose jugée Si ce jugement est frappé d'appel, les instances en annulation de ce même brevet engagées par d'autres entreprises sont recevables. (Chambre commerciale 6 décembre 2017, pourvoi n°15-19726, BICC n°880 du 15 avril 2018 avec une note du SDER et Legifrance).
Selon la question qui a été posée à l'Assemblée plénière, les sommes versées en exécution d'une condamnation irrévocable pour contrefaçon d'un brevet peuvent elles faire l'objet d'une action en répétition à la suite de l'annulation de ce brevet par une décision postérieure ?. La réponse a été négative. Ce qui est nul est réputé n'avoir jamais existé. Dès lors que l'annulation d'un brevet entraîne son anéantissement au jour du dépôt de la demande de brevet, il doit être retenu que la procédure d'indemnisation du préjudice invoqué par le contrefacteur se trouve privée de tout support juridique. En conséquence de ce qui précède, la personne qui a été condamnée au paiement de diverses sommes par un arrêt irrévocable prononcé pour contrefaçon par reproduction de revendications d'un brevet, enregistré et déposé qui ont été annulées par un arrêt devenu irrévocable, ne saurait obtenir la restitution des sommes payées en exécution de la condamnation du chef de contrefaçon. (Assemblée Pleinière 17 février 2012, pourvoi n°10-24282, Rapport de M. André Conseiller et Avis de M. Le Mesle Premier Avocat général, BICC n°759 du 1er avril 2012 et Legifrance).
En vertu de l'article L. 411-4 du Code de la propriété intellectuelle, Le directeur de l'Institut national de la propriété industrielle (établissement public national à caractère administratif sous tutelle du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie) prend les décisions prévues par ce code à l'occasion de la délivrance, du rejet ou du maintien des titres de propriété industrielle. Ces dispositions sont dérogatoires au principe de la séparation des pouvoirs et de la dualité des ordres juridictionnels, en ce qu'elles opèrent un transfert de compétence au bénéfice de la juridiction judiciaire pour statuer sur les recours en annulation formés contre les décisions prises par le directeur de l'INPI dans l'exercice de ses pouvoirs en matière de délivrance, de rejet ou de maintien des titres de propriété industrielle. Da son arrêt du 5 juin 2000, le Tribunal des conflits a étendu la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire pour statuer sur les recours contre les décisions du directeur de l'INPI aux actions relatives aux conséquences dommageables des fautes qu'il aurait pu commettre à l'occasion de l'exercice de ses attributions. (Chambre commerciale 11 mars 2014, pourvoi n° 12-28036, BICC n°803 du 1er juin 2014 et Legifrance).
Consulter :
Textes
Propriété industrielle (partie législative)
Propriété intellectuelle (partie réglementaire)
Bibliographie