par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 4 février 2016, 15-12128
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
4 février 2016, 15-12.128

Cette décision est visée dans la définition :
Malfaçon




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Joint les pourvois n° V 14-29.790 et T 15-12.128 ;

Donne acte à MM. X... et Y... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Languedoc piscines et M. Z..., ès qualités de liquidateur de cette société ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 241-1, L. 243-8 et A. 243-1 du code des assurances ;

Attendu que toute personne physique ou morale, dont la responsabilité peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil à propos des travaux de bâtiment, doit être couverte par une assurance ; que tout contrat d'assurance souscrit par une personne assujettie à l'obligation d'assurance est, nonobstant toute clause contraire, réputé comporter des garanties au moins équivalentes à celles figurant dans les clauses types prévues par l'article A. 243-1 du code des assurances ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 18 septembre 2014), que MM. Y... et X... ont confié la réalisation d'une piscine de marque Diffazur à la société Languedoc piscines, assurée auprès de la société Les Mutuelles du Mans assurances IARD (MMA) ; qu'ayant constaté des désordres après réception, ils ont assigné en indemnisation les sociétés Languedoc piscines, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, MMA et Diffazur ;

Attendu que, pour écarter la garantie de la société MMA, l'arrêt retient que le rapport d'expertise constate que le fond et les parois verticales de la piscine ont été réalisés en béton, ce qui correspond à la structure de l'ouvrage, mais que le béton a été recouvert d'un enduit en marbre reconstitué qui devait être parfaitement lisse, que la rugosité de ce revêtement provient d'une mauvaise mise en oeuvre par la société Languedoc piscines et rend l'ouvrage impropre à sa destination mais que ce désordre ne peut pas être pris en charge par la police d'assurance souscrite qui précise que la garantie relevant de l'article 1792 du code civil est limitée aux seuls défauts de solidité affectant la structure de la piscine ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que les désordres rendaient l'ouvrage impropre à sa destination et alors que la clause limitant la garantie aux seuls dommages affectant la structure de la piscine faisait échec aux règles d'ordre public relatives à l'étendue de l'assurance de responsabilité obligatoire en matière de construction et devait, par suite, être réputée non écrite, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la garantie de la société Mutuelles du Mans assurances n'est pas mobilisable et rejette les demandes formées à l'encontre de cet assureur, l'arrêt rendu le 18 septembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne la société Mutuelle du Mans assurance IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Mutuelles du Mans assurances IARD à payer à MM. X... et Y... la somme globale de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Mutuelles du Mans assurances IARD ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen identique produit, aux pourvois n° V 14-29.790 et T 15-12.128, par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour MM. X... et Y...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué,

D'AVOIR dit que la garantie de la compagnie d'assurances les Mutuelles du Mans Assurances n'est pas mobilisable et rejeté les demandes formées à l'encontre de la compagnie d'assurances les Mutuelles du Mans Assurances ;

AUX MOTIFS QUE la compagnie d'assurances les Mutuelles du Mans Assurances conteste devoir sa garantie en faisant valoir que la garantie responsabilité civile décennale souscrite, est limitée aux seuls dommages affectant la structure de la piscine et aux conséquences matérielles éventuelles en répercussion sur les revêtements et les équipements indissociables spécifiques de la piscine, qu'il n'existe aucune atteinte à la structure de la piscine, que les désordres affectent uniquement le revêtement et le système de filtration ; que M. Eric Y... et M. Franck X... invoquent une garantie décennale qui résulte de l'attestation d'assurance qui leur a été remise et qu'ils ont produite en pièce n°2 ; qu'or cette attestation d'assurance précise très clairement que la garantie relevant de l'article 1792 du code civil est bien limitée aux seuls défauts de solidité affectant la structure de la piscine et les conséquences éventuelles en répercussion sur les revêtements et les équipements spécifiques, aux seuls défauts de solidité affectant les canalisations encastrées (éléments indissociables de la piscine) ; que cette attestation ne crée aucune ambiguïté quant à la nature et à l'étendue de la garantie exacte que doit la compagnie d'assurances les Mutuelles du Mans Assurances que pour prétendre à l'application de cette garantie, M. Eric Y... et M. Franck X... soutiennent que le dommage affecte la structure de la piscine ; que cette assertion ne résiste pas à la lecture du rapport d'expertise : le fond et les parois verticales de la piscine ont été réalisés en béton, ce qui correspond à la structure de l'ouvrage. Le béton a été recouvert d'un enduit en marbre reconstitué appelé "plaster" ; que l'expert a observé que le marbre reconstitué, par sa nature même, devait être parfaitement lisse, que la rugosité observée provenait d'une mauvaise mise en oeuvre par la société Languedoc Piscines ; que la structure même de la piscine n'est donc pas affectée par le désordre bien que celui -ci entraîne une impropriété à destination qui n'est pas prise en charge par la police d'assurance souscrite ; que le jugement ne peut qu'être infirmé en ce qu'il a retenu la garantie de la compagnie d'assurances les Mutuelles du Mans Assurances ; qu'il doit aussi être infirmé en ce qu'il a fixé la créance de M. Eric Y... et M. Franck X... au passif de la société Languedoc Piscines à la somme de 13.644,22 € alors que seul M. Franck X... a déclaré une créance d'un montant de 3.316,49 €, déjà admise à titre chirographaire, au passif du débiteur, par ordonnance du 7 octobre 2009 ; qu'en revanche, il est exact que la créance de M. Eric Y... et M. Franck X... à l'encontre de la société Languedoc-Piscines correspond au montant des travaux de reprise, soit à la somme de 11.144,22 € TTC valeur janvier 2011 qui doit être indexée sur l'évolution de l'indice BT01 entre le 14 janvier 2011 et le prononcé du présent arrêt ; que les maîtres de l'ouvrage invoquent des préjudices annexes qui selon eux doivent être évalués à la somme de 10.000 € et non à la somme de 2.500 €, préjudices constitués par l'impossibilité d'utiliser la piscine depuis 2009, par des surconsommations d'eau liées aux fuites et à la nécessité de vider la piscine durant l'expertise, à la dégradation du jardin et au trouble de jouissance qu'entraîneront l'exécution des travaux de reprise ; que c'est à juste titre que le premier juge a observé que l'utilisation de la piscine était déconseillée aux enfants, ce qui caractérisait une limitation qui justifiait une indemnisation à hauteur de 2.000 €, que la reprise du "plaster" pouvait causer des désagréments dans le jardin, que le trouble de jouissance en résultant, devait être indemnisé à hauteur de 500 €, que les frais de consommation d'eau liés aux fuites d'eau, n'étaient pas justifiés, ce qui reste d'actualité en cause d'appel ;

ALORS QUE toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, doit être couverte par une assurance qui est, nonobstant toute clause contraire, réputée comporter des garanties au moins équivalentes à celles figurant dans l'annexe I de l'article A.243-1 du code des assurances, pour la durée de la responsabilité décennale pesant sur la personne assujettie à l'obligation d'assurance ; qu'aucune stipulation du contrat ne pouvant avoir pour effet d'amoindrir, d'une manière quelconque, le contenu de ces garanties, doit être réputée non écrite la clause qui, ayant pour conséquence d'exclure de la garantie certains travaux de bâtiment réalisés par une entreprise dans l'exercice de son activité, fait échec aux règles d'ordre public relatives à l'étendue de l'assurance de responsabilité obligatoire en matière de construction ; que dès lors, en faisant application d'une stipulation de la police souscrite par la société Languedoc Piscines au titre de sa responsabilité décennale auprès de la MMA, limitant la garantie de celle-ci « aux seuls défauts de solidité affectant la structure de la piscine et les conséquences éventuelles en répercussion sur les revêtements et les équipements spécifiques, aux seuls défauts de solidité affectant les canalisations encastrées », la cour d'appel, qui constatait que le désordre affectant la piscine construite par la société Languedoc Piscines entraînait une impropriété à destination, et qui a du reste confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a, sur le fondement de l'article 1792 du code civil, condamné la société Languedoc Piscines à réparer ce désordre, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a violé les articles L.241-1, L.243-8 et A.243-1 du code des assurances, ensemble l'annexe I à ce dernier article.



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Malfaçon


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.