par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. com., 5 avril 2011, 10-30232
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Cour de cassation, chambre commerciale
5 avril 2011, 10-30.232
Cette décision est visée dans la définition :
Avocat
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur la déchéance du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. X..., ès qualités, et relevée d'office, après avertissement donné aux parties :
Attendu que le mémoire ampliatif n'a pas été signifié à M. X..., pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la selarl Y... Pascal et contre lequel le pourvoi a été également dirigé ; qu'il s'ensuit la déchéance du pourvoi en tant que dirigé contre M. X..., ès qualités ;
Sur le moyen unique du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'ordre des avocats du barreau de Thionville :
Sur ce moyen en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'avoir nommé des administrateurs provisoires à la Selarl :
Attendu que le prononcé de la liquidation judiciaire de la Selarl prive d'intérêt ce moyen ; que le moyen n'est pas recevable ;
Mais sur le moyen en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé l'omission de M. Y... du tableau :
Vu les articles L. 641-9 et L. 640-2 du code de commerce dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, ensemble les articles 104 et 105 du décret du 27 novembre 1991, organisant la profession d'avocat ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que la décision d'omettre un avocat du tableau ne peut être prise par le conseil de l'ordre que dans les conditions des articles 104 et 105 du décret du 27 novembre 1991, qui ne visent pas la privation temporaire d'exercice de la profession d'avocat prévue par l'article L. 641-9 du code de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par jugement du 18 mars 2008, M. Y..., avocat au barreau de Thionville et gérant ainsi qu'associé unique de la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Y... Pascal (la Selarl), a été mis en liquidation judiciaire ; que par des décisions des 7 et 11 avril, 18 et 28 juillet 2008, le bâtonnier de l'ordre a nommé des administrateurs provisoires de la Selarl ; que par une décision du 24 septembre 2008, le conseil de l'ordre a omis du tableau M. Y... ; que la Selarl et M. Y... ont formé des recours contre ces décisions ; que par jugements des 22 juillet 2008 et 30 juin 2009, la selarl a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, M. X... étant nommé liquidateur ;
Attendu que pour rejeter les recours formés par M. Y..., l'arrêt retient que ce dernier a été mis en liquidation judiciaire et que l'interdiction d'exercer sa profession dont il est en conséquence frappé, justifie la décision de l'omettre du tableau ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CONSTATE la déchéance du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. X..., ès qualités ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé la décision qui a omis M. Y... du tableau, l'arrêt rendu le 23 novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne l'ordre des avocats du barreau de Thionville aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... et de la Selarl Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat de M. Y... et de la société Y... Pascal.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté maître Y... et la SELARL Y... Pascal de leurs recours dirigés contre les décisions du conseil de l'Ordre des avocats du barreau de Thionville et du Bâtonnier du barreau de Thionville ;
AUX MOTIFS QUE Maître Y... ne discute pas qu'il résulte des dispositions des articles L. 640-2 et L. 641-9 ensemble du Code de commerce, dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 entrée en vigueur-y compris en Alsace-Moselle le 1er janvier 2006, une interdiction d'exercice à titre libéral de la profession d'avocat par une personne physique se trouvant en cours de liquidation judiciaire ; que c'est à bon droit qu'en vertu de ces dispositions d'ordre public qui ont vocation à régir la liquidation judiciaire de Maître Y... ouverte par jugement du 18 mars 2008- étant rappelé que la loi applicable est en la matière celle en vigueur au jour où le juge statue et que sa décision produit ses effets à l'égard de tous et partout où le débiteur a des biens-le Bâtonnier puis le Conseil de l'Ordre ont successivement décidé que l'interdiction d'exercice dont se trouvait atteint Maître Y... imposait d'abord de pourvoir à l'administration provisoire de la SELARL dont il était le gérant puis de l'omettre du Tableau de l'Ordre ; que se méprenant sur l'autorité de chose jugée du jugement du 18 mars 2008, comme sur celle de l'arrêt de la Cour d'Appel de Metz du 3 février 2009, Maître Y... soutient à tort pouvoir bénéficier du régime antérieur à la loi du 26 juillet 2005 qui ne prévoyait pas d'interdiction d'exercice ; qu'en effet l'autorité de la chose jugée comme la force de chose jugée n'ont lieu qu'à l'égard de ce qui est tranché dans le dispositif d'un jugement ou d'un arrêt ; que sont par suite sans emport tous les moyens tirés par Maître Y... des motifs des décisions considérées ; que l'arrêt de la Cour de Metz du 3 février 2009 rendu dans une procédure où Maître Y... à titre personnel n'était pas partie qui se borne dans son dispositif à déclarer recevable l'appel de la SELARL Y... représentée par son gérant Maître Y... et qui surtout fait droit à leur requête aux fins de renvoi en application de l'article 47 du code de procédure civile s'avère à l'évidence dépourvu d'effet sur la détermination de la loi applicable à la liquidation de Maître Y... pris en sa qualité de débiteur personne physique ; qu'en l'absence dans le dispositif du jugement du 18 mars 2008 de tout visa exprès des dispositions antérieures à la loi du 26 juillet 2005 il ne se déduit pas des mentions aux termes desquelles est constatée " l'insolvabilité notoire " de Maître Y... puis est fixée la date de cette " insolvabilité " et est ouverte " la procédure de liquidation judiciaire civile " que le tribunal avait exclu l'application de la loi susvisée en vigueur depuis le 1er janvier 2006 alors que notamment l'article L. 670-1 du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 25 juillet 2005 comprend encore la référence à " l'insolvabilité notoire " ; que de même la déclaration d'irrecevabilité de l'intervention volontaire du Conseil de l'Ordre à la procédure de liquidation judiciaire ne caractérise pas une volonté non équivoque du Tribunal d'écarter l'application de la loi du 26 juillet 2005 ; que l'ensemble de cette analyse commande donc de confirmer les décisions entreprises ;
ALORS QUE l'avocat qui a cessé d'exercer son activité à titre individuel pour devenir associé d'une société d'exercice libéral cesse d'exercer une activité professionnelle indépendante au sens de l'article L. 640-2 du code de commerce ; que dès lors l'interdiction faite au débiteur personne physique en liquidation judiciaire d'exercer une activité professionnelle indépendante ne l'empêche pas d'exercer ses fonctions au nom d'une société d'exercice libéral ; qu'en retenant néanmoins que maître Y... se trouvait atteint d'une interdiction d'exercice justifiant son omission du Tableau des avocats ainsi que la nomination d'un administrateur provisoire de la SELARL tandis qu'elle avait constaté que maître Y... était l'associé unique de la SELARL Y... Pascal, la cour d'appel, qui n'a pas tiré de ses constatations de fait les conséquences légales qui en découlaient nécessairement, a violé les articles L. 640-2 et L. 641-9 du code de commerce.
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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.