par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. soc., 8 juillet 2009, 08-40046
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Cour de cassation, chambre sociale
8 juillet 2009, 08-40.046
Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., qui avait été engagé le 1er novembre 1988 par la fondation Hôpital Saint Joseph en qualité de médecin assistant en chirurgie infantile et occupait en dernier lieu les fonctions de chirurgien adjoint responsable du département d'urologie infantile, a été licencié le 9 avril 2004 dans le cadre d'un licenciement collectif ayant pour motif économique la réorganisation de l'établissement, résultant de la suppression du service de pédiatrie au profit du développement des activités de cancérologie et de gériatrie, rendue nécessaire tant par la taille critique du service concerné que par la sauvegarde de la compétitivité en raison des contraintes budgétaires de l'hôpital ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur le moyen unique, pris en ses quatrième et cinquième branches :
Vu l'article L. 1233 3 du code du travail ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient qu'il importe de vérifier la pertinence des mesures prises au regard des objectifs économiques poursuivis, et qu'il n'est pas justifié de l'impact de la fermeture du service pédiatrie pour remédier au déficit globalement enregistré par la fondation au titre de son entière activité, d'autant qu'elle a été suivie par le redéploiement de ses activités dans les secteurs gériatrie, cancérologie et unité de soins intensifs en cardiologie, tous largement plus onéreux, et par la création d'un pôle mère enfant dans le prolongement de laquelle s'inscrivait logiquement le maintien de la chirurgie infantile ;
Qu'en statuant ainsi, alors que s'il appartient au juge, tenu de contrôler le caractère sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur, il ne peut se substituer à ce dernier quant aux choix qu'il effectue dans la mise en oeuvre de la réorganisation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur la sixième branche du même moyen :
Vu l'article L. 1233 4 du code du travail ;
Attendu que pour statuer comme elle l'a fait, l'arrêt ajoute également que la fondation ne justifie pas de la réalité ni de la consistance de ses efforts au titre de son obligation de reclassement ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le seul poste susceptible de convenir au salarié ne pouvait lui être proposé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la fondation Hôpital Saint Joseph
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit le licenciement de Monsieur X... sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné la Fondation Hôpital Saint Joseph à lui payer 35.000 euros de dommages et intérêts outre une somme au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
AUX MOTIFS QU'il n'est pas contesté que, si l'hôpital NECKER pouvait certes accueillir, aux termes d'une convention conclue avec l'hôpital Saint Joseph, les patients les plus lourds, ne pouvant être traités par la FONDATION, celle-ci y recevait néanmoins de nombreux patients, y compris notamment pour des pathologies spécialisées, tel le traitement par lithotritie extra-corporelle des calculs des enfants, en majorité âgés de moins de 18 mois ; que cette activité spécialisée valait au demeurant à la FONDATION une notoriété spécifique, sur le plan national et même international, largement imputable à la spécialisation du Dr X..., notamment en matière de traitement des calculs urinaires de l'enfant ; qu'un rapport de l'ARHIF établi en novembre 2003 et relatif à l'activité opératoire de 2002 fait d'ailleurs état de 309 interventions, dont 30 pour hernies inguinales et ombilicales, 191 sur les organes génitaux, dont la lourdeur dépend de la malformation, y compris une quinzaine concernant la chirurgie extrêmement lourde des ambiguïtés sexuelles, 41 interventions rénales, dont 37 par lithotritie extra-corporelle, 47 interventions vésicales, dont 15 concernant des "vessies neurologiques", avec 20 patients opérés âgés de moins d'un an ; qu'il n'est par ailleurs pas sérieusement contestable que l'hôpital Saint Joseph disposait en son sein d'anesthésistes rompus à l'exercice de leur art pour participer à de telles interventions, dont il est autrement inconcevable qu'elles aient pu être entreprises ; que si l'existence d'un déficit de quelque millions d'euros évoqué en 2002, et prévisionnel de 6 millions d'euros en 2003, n'est pas discutée, la FONDATION ne produit pour autant aux débats ni bilan ni comptes de résultats pourtant seuls susceptibles de situer précisément l'ampleur et la gravité de ce déficit, dont la juste mesure ne pourrait en effet jamais être appréhendée qu'au regard de son entière activité ; qu'il est vrai que le motif économique du licenciement n' est avancé que du chef de la prétendue nécessité de procéder à une réorganisation de l'entreprise, passant par la suppression de la branche d'activité pédiatrie et chirurgie pédiatrique, et donc du poste du Dr X..., afin de maintenir sa compétitivité ; qu'il n'est toutefois pas acquis, en l'état des éléments de la cause, que cette suppression se soit davantage imposée pour sauvegarder la compétitivité de la FONDATION, ni même qu'elle ait pu participer utilement à la résorption du déficit enregistré, dont la part imputable à la pédiatrie, ne représentant que 4 des hospitalisations et 8 de l'activité chirurgicale exercée en hôpital de jour, n'est pas démontrée ; qu'il est en revanche établi par les productions que le rapprochement avec fusion sur un seul site des deux hôpitaux Saint Michel et Saint Joseph était déjà envisagée de longue date, et, en tout cas, lors d'une réunion de la commission médicale d'entreprise du 5 avril 2004, soit à l'époque du licenciement du Dr X... ; qu'il résulte d'un procès-verbal de réunion des comités d'entreprise des deux hôpitaux du 8 novembre 2004, et donc sitôt le terme du préavis du Dr X..., que six mois après avoir fermé son service pédiatrie, Saint Joseph soutenait le projet de la création d'un pôle mère-enfant à Saint Michel ; qu'une fusion intervenait finalement entre ces deux hôpitaux ainsi qu'un troisième, celui de Notre-Dame de Bon Secours, pour constituer une nouvelle entité l'hôpital PSPH de PARIS SUD ; que le projet n'était donc pas postérieur à la fermeture du service de chirurgie infantile de l'hôpital Saint Joseph, mais, tout au contraire, lui préexistait ; que l'employeur dispose certes de toute latitude pour prendre les décisions de gestion qu'il juge utiles voire nécessaires pour redresser la situation de l'entreprise, -y compris s'agissant d'une fondation, ne poursuivant à ce titre aucun but lucratif mais devant néanmoins veiller à avoir une gestion saine et équilibrée-, ou afin de pourvoir à sa réorganisation, à condition toutefois que celle-ci soit de nature à permettre de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ; qu'il importe donc de vérifier à tout le moins la pertinence des mesures prises au regard des objectifs économiques poursuivis, s'agissant de remédier à des difficultés économiques avérées, ou encore de sauvegarder, si elle est menacée, la compétitivité de l'entreprise ; qu'or, il n'est pas justifié de l'impact de la fermeture du service pédiatrie pour remédier au déficit globalement enregistré par la FONDATION au titre de son entière activité, alors même, -par-delà son importance technique au plan médico-chirurgical-, que la part du secteur pédiatrie demeure toute relative, comparée à celle de l'activité d'ensemble de l'hôpital, tant dans la réalisation de son déficit qu'en termes de menace pesant sur la compétitivité et la survie de l'entreprise ; qu'il est surtout avéré que la suppression par la FONDATION de son service pédiatrie avait d'autant moins vocation à résorber le déficit qu'elle était aussitôt suivie du redéploiement de ses activités dans les secteurs gériatrie, cancérologie ainsi que dans une unité de soins intensifs en cardiologie, tous services largement plus onéreux ; que, de surcroît, la création d'un pôle mère-enfant implanté, après fusion des trois hôpitaux précités sur le seul site de l'hôpital Saint Joseph rend encore moins sûrement compte des impératifs ayant pu présider à la préalable suppression du service pédiatrie ; que, même si la création de ce pôle mère-enfant consiste en un service global de maternité, néonatalogie et médecine pédiatrique, sans intégrer la spécialité, certes distincte, de chirurgie infantile, le maintien de celle-ci restait néanmoins logiquement d autant plus envisageable, pour s'être alors inscrit dans le prolongement d'un tel service ; qu'il s'ensuit, outre qu'il n'est pas justifié de la réalité du motif économique allégué en la lettre de licenciement, et ne consistant d'ailleurs que dans le maintien d'une compétitivité prétendument menacée, qu'il n'est pas davantage établi que la suppression par la FONDATION du service pédiatrie de l'hôpital Saint Joseph ait utilement pu y remédier ; que le motif économique ainsi avancé n' est donc pas suffisamment étayé pour constituer une cause réelle et sérieuse au soutien du licenciement du Dr X... ; que par ailleurs et surtout, la FONDATION n'établit pas plus avoir satisfait à ses obligations quant au reclassement du Dr X..., faute de démontrer précisément la réalité des efforts concrets entrepris pour tenter d'y parvenir et d'éviter ainsi le licenciement de son salarié ; qu'elle ne saurait en effet se borner à soutenir avoir indiqué à l'intéressé que le centre de santé Marie-Thérèse de MALAKOFF aurait pu l'accueillir, à raison de 14 heures hebdomadaires pour des consultations, alors qu'une telle proposition revêt d'autant moins la nature d'une véritable possibilité de reclassement qu'elle ne justifie pas qu'aucune offre écrite, précise et circonstanciée ait été effectivement présentée en ce sens au Dr X..., dès avant son licenciement ; que l'intimé établit bien au contraire que son éventuel reclassement était raisonnablement envisageable, eu égard, par-delà sa qualification en chirurgie générale, à sa double compétence, en urologie comme en chirurgie pédiatrique, spécialités lui ayant d'ailleurs valu d'acquérir une renommée nationale, et même une notoriété internationale, largement avérées ; qu'en revanche le Dr X... ne démontre pas que, dès son licenciement, le départ du Dr Z..., intervenu en novembre 2004, était imminent, connu et programmé, ni que son remplacement ultérieur avait été prévu de longue date, et ainsi pourvu par le recrutement externe du Dr A..., d'abord, à compter du 22 octobre 2004, à temps partiel et très ponctuellement, à raison d'un peu plus de 3 H par semaine, puis nommé, le 21 avril 2005, chef du service d'urologie adulte de l'hôpital Saint Joseph, où il exerçait dorénavant de telles fonctions à compter du 1er juillet 2005 ; qu'en tout état de cause, l'intimé n'aurait pu postuler sur ce poste de chef de service sans s'être présenté et avoir satisfait au concours requis à cette fin ; qu'il reste acquis aux débats que la FONDATION ne justifie pas de la réalité ni de la consistance de ses efforts, au titre de l'exécution de l'obligation de moyens dont elle était tenue en vue de reclasser son salarié ; que le jugement sera donc confirmé pour avoir en toute hypothèse ajuste titre retenu que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse ;
1) ALORS QUE la preuve est libre en matière sociale : qu'en reprochant à l'employeur de n'avoir versé aux débats « ni bilan ni comptes de résultats » prétendument « seuls susceptibles de situer précisément l'ampleur et la gravité du déficit » dont la Cour d'appel a relevé que sa réalité n'était pas contestée par le salarié, la Cour d'appel a violé les articles 1315 et 1341 du Code civil ;
2) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de motiver leurs décisions ; qu'en l'espèce, tout en admettant la réalité du déficit invoqué, la Cour d'appel s'est contentée, pour retenir qu'il n'aurait pas été « acquis » que la réorganisation réalisée s'imposait pour sauvegarder la compétitivité de la Fondation, de viser lapidairement les « éléments de la cause » ; qu'en omettant de la sorte de viser et d'analyser les pièces versées aux débats par les parties, et particulièrement les documents économiques remis au comité d'entreprise lors de la procédure de consultation du comité d'entreprise, ainsi que les procès verbaux de ses réunions relatives à la réorganisation mise en place (pièce n°8 de l'employeur), la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de Procédure Civile ;
3) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de motiver leurs décisions ; qu'en se contentant d'affirmer sans autre précision ni analyse qu'il était « établi par les productions » que le rapprochement avec un autre hôpital et la création d'un pôle mère-enfant sur un autre site, était prévu « de longue date », la Cour d'appel a derechef violé l'article 455 du Code de Procédure Civile ;
4) ALORS QUE si les juges du fond doivent vérifier si la réorganisation invoquée à l'appui d'un licenciement est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, ils ne peuvent pas porter une appréciation sur les choix opérés par l'employeur dans sa mise en oeuvre ; qu'en l'espèce pourtant, la Cour d'appel a affirmé qu'il lui appartenait « de vérifier ( ) la pertinence des mesures prises au regard des objectifs économiques poursuivis » et a retenu qu'« il n'est pas établi que la suppression par la Fondation du service pédiatrie de l'Hôpital Saint Joseph ait utilement pu remédier à une menace pesant sur sa compétitivité » compte tenu de sa part dans l'activité d'ensemble de l'hôpital et des investissements réalisés dans d'autres services ; qu'en contrôlant ainsi le choix effectué par l'employeur dans la mise en oeuvre de la réorganisation, la Cour d'appel a violé l'article L.321-1 du Code du travail, devenu les articles L.1233-1 à L.1233-3 du même Code ;
5) ALORS QUE si les juges du fond doivent vérifier si la réorganisation invoquée à l'appui d'un licenciement est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, ils ne peuvent pas porter une appréciation sur les choix opérés par l'employeur dans sa mise en oeuvre ; qu'en retenant en l'espèce que compte tenu de la création d'un pôle mère-enfant, le maintien de la chirurgie infantile « restait logiquement d'autant plus envisageable pour s'être alors inscrit dans le prolongement d'un tel service », ce faisant ainsi juge du choix de l'employeur de ne pas inclure un service de chirurgie infantile dans le pôle mère-enfant créé suite à la réorganisation ayant entraîné le licenciement de Monsieur X..., la Cour d'appel a derechef violé l'article L.321-1 du Code du travail, devenu les articles L.1233-1 à L.1233-3 du même Code ;
6) ALORS enfin QUE le reclassement d'un salarié ne peut être tenté que s'il existe des postes disponibles ; qu'en affirmant que l'employeur avait manqué à son obligation de reclassement sans constater qu'il existait au moins un poste disponible qui aurait pu être proposé au docteur X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 321-1 al.3 devenu l'article L.1233-4 du Code du travail.
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Cette décision est visée dans la définition :
Licenciement
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.