par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 15 juin 2017, 15-23066
Dictionnaire Juridique
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
15 juin 2017, 15-23.066
Cette décision est visée dans la définition :
Contradictoire
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a renouvelé, pour une durée de trente ans, la mesure de tutelle prononcée le 1er octobre 2009 au profit de M. Z... et désigné un mandataire judiciaire à la protection des majeurs en qualité de tuteur ;
Sur les premiers moyens de M. Z... et Mme Y..., rédigés en termes similaires, réunis :
Attendu que M. Z... et Mme Y..., sa soeur, font grief à l'arrêt de confirmer le jugement du juge des tutelles, alors, selon le moyen, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que l'avis du ministère public, partie jointe, doit être mis à la disposition des parties au plus tard le jour de l'audience ; que la cour d'appel a indiqué que le ministère public, qui n'était pas présent à l'audience du 23 mars 2015, avait donné son avis par écrit le 18 mars 2015 ; qu'en statuant ainsi, au visa de l'avis du ministère public, sans constater qu'il avait été mis à la disposition de M. Z... et Mme Y..., la cour d'appel a violé les articles 16 et 431 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que l'avis écrit du ministère public figurait au dossier de la cour d'appel, que M. Z... et Mme Y... avaient la possibilité de consulter, en application des articles 1222 et 1222-1 du code de procédure civile ; que, les conclusions du ministère public ayant ainsi été mises à leur disposition, avant l'audience, afin qu'ils puissent y répondre utilement, le principe de la contradiction et les garanties conventionnelles résultant de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnus ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen de M. Z... et le second moyen de Mme Y..., ci-après annexés :
Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le deuxième moyen de M. Z... :
Vu l'article 442, alinéa 2, du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, ensemble l'article 26 de cette loi ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, la durée de la mesure de protection renouvelée ne peut excéder vingt ans ;
Qu'aux termes du second, cette limitation dans le temps de la durée des mesures renouvelées est applicable au renouvellement des mesures de tutelle et de curatelle prononcées à compter de l'entrée en vigueur de la loi ; que les mesures de curatelle et de tutelle renouvelées pour une durée supérieure à dix ans avant l'entrée en vigueur de la loi doivent faire l'objet d'un renouvellement avant l'expiration d'un délai de dix ans à compter de cette entrée en vigueur ; qu'à défaut de renouvellement dans le délai précité, les mesures prennent fin de plein droit ;
Qu'il ressort de ces dispositions et des travaux préparatoires que le législateur a entendu appliquer la limitation dans le temps de la durée des mesures renouvelées, plus protectrice des intéressés, à l'ensemble des renouvellements décidés après l'entrée en vigueur de la loi, le 18 février 2015, que les mesures initiales aient été prises avant ou après cette date ;
Attendu que l'arrêt confirme le jugement ayant fixé la durée de la mesure de tutelle à trente ans ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement du 18 septembre 2014 du juge des tutelles du tribunal d'instance de Montargis en ce qu'il fixe la durée de la mesure de tutelle à trois cent soixante mois, l'arrêt rendu le 8 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt.
Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir désigné l'Udaf du Loiret en qualité de tuteur en rejetant la demande de Mme Y..., soeur du majeur protégé, tendant à sa désignation en qualité de tuteur ;
AU VISA DE l'avis donné par le ministère public le 18 mars 2015 ;
ALORS QUE le juge doit respecter et faire respecter le principe de la contradiction ; que les parties doivent être mises en mesure de répondre à l'avis du ministère public ; que la cour d'appel, qui a précisé que le ministère public, qui n'était pas représenté à l'audience du 23 mars 2015, avait donné son avis le 18 mars 2015, sans constater que cet avis avait été mis à la disposition de Mme Y... et de M. Z..., a violé les articles 16 et 431 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir désigné l'Udaf du Loiret en qualité de tuteur en rejetant la demande de Mme Y..., soeur du majeur protégé, tendant à sa désignation en qualité de tuteur ;
AUX MOTIFS QUE quand Mme Ginette Y..., soeur de M. Luce Z..., a demandé à l'audience à être désignée tutrice de son frère pour 5 ans, ce dernier, bien qu'appelant du jugement à l'origine, n'est pas apparu favorable à cette demande ; QU'il ressort des pièces du dossier qu'il existe des difficultés familiales, que le souhait de la mère du majeur protégé de son vivant avait été que la mesure de protection soit confiée à un tiers extérieur à la famille et que sa succession est en cours ; QU'aucun membre de la famille ou aucun proche ne peut assumer actuellement la mesure de protection concernant M. Luce Z..., et que c'est bon droit que le premier juge a constaté qu'il n'existe aucun motif légitime pour procéder à un changement de mandataire ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il n'existe aucun motif légitime pour un changement de mandataire ; qu'eu égard aux relations habituelles entre eux et à l'intérêt porté à l'égard de M. Luce Z..., il y a lieu de maintenir l'Udaf du Loiret, mandataire judiciaire à la protection des majeurs, ... en qualité de tuteur d'Etat, conformément à l'article 450 du code civil ;
ALORS QUE le juge désigne un parent ou un allié à moins qu'une cause particulière empêche une désignation familiale ; qu'en se bornant à évoquer des « difficultés familiales » et le souhait de la mère du majeur, aujourd'hui décédée, que le tuteur soit choisi hors de la famille, sans préciser de quelles pièces ces éléments de fait étaient tirés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 449 du code civil. Moyens produits par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour M. Z....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir ouvert une procédure de tutelle et désigné l'Udaf du Loiret en qualité de tuteur de Monsieur Z... ;
EN RELEVANT QUE le ministère public avait conclu le 18 mars 2015 ;
ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que l'avis du ministère public, partie jointe, doit être mis à la disposition des parties au plus tard le jour de l'audience ; que la cour d'appel a indiqué que le ministère public, qui n'était pas présent à l'audience du 23 mars 2015, avait donné son avis par écrit le 18 mars 2015 ; qu'en statuant ainsi, au visa de l'avis du ministère public, sans constater qu'il avait été mis à la disposition de M. Z..., la cour d'appel a violé les articles 16 et 431 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir ouvert une procédure de tutelle à l'égard de Monsieur Z... pour une durée de 360 mois, soit 30 ans ;
AUX MOTIFS QU'en ce qui concerne la durée de la tutelle, le Docteur A... qui a établi le certificat médical en vue du renouvellement de la mesure de protection le 10 septembre 2014 a indiqué que la tutelle peut être attribuée à Monsieur Luce Z... pour une durée supérieure à 5 ans compte tenu de l'altération de ses facultés mentales qui correspond à un retard scolaire avec déficience psycho intellectuelle empêchant totalement l'expression de sa volonté et la possibilité pour lui de pouvoir seul à ses intérêts patrimoniaux et personnels ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en vertu des pièces du dossier, et notamment du certificat médical qui établit que l'état de M. Luce Z... n'est manifestement pas susceptible de connaître une amélioration, selon les données acquises de la science, il convient de fixer la durée de cette mesure à 360 mois ;
ALORS QU'en application des dispositions de l'article 442, alinéa 2 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, applicable en l'espèce, le juge ne peut, par décision spécialement motivée, renouveler la mesure de tutelle pour une durée excédant vingt ans ; qu'en confirmant le jugement qui avait porté à 360 mois, soit 30 ans, la durée de la mesure de tutelle prononcée à l'égard de Monsieur Z..., la cour d'appel a violé l'article 442 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir ouvert une procédure de tutelle à l'égard de Monsieur Z... et désigné l'Udaf du Loiret en qualité de tuteur en écartant Mme Ginette Y..., soeur de Monsieur Z... ;
AUX MOTIFS QUE quand Mme Ginette Y..., soeur de M. Luce Z..., a demandé à l'audience à être désignée tutrice de son frère pour 5 ans, ce dernier, bien qu'appelant du jugement à l'origine, n'est pas apparu favorable à cette demande ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il existe des difficultés familiales, que le souhait de la mère du majeur protégé de son vivant avait été que la mesure de protection soit confiée à un tiers extérieur à la famille et que sa succession est en cours ; qu'aucun membre de la famille ou aucun proche ne peut assumer actuellement la mesure de protection concernant M. Luce Z..., et que c'est bon droit que le premier juge a constaté qu'il n'existe aucun motif légitime pour procéder à un changement de mandataire ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il n'existe aucun motif légitime pour un changement de mandataire ; qu'eu égard aux relations habituelles entre eux et à l'intérêt porté à l'égard de M. Luce Z..., il y a lieu de maintenir l'Udaf du Loiret, mandataire judiciaire à la protection des majeurs, en qualité de tuteur d'Etat, conformément à l'article 450 du code civil ;
1° ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que les juges du fond doivent désigner et analyser, même sommairement, les documents soumis au débat contradictoire sur lesquels ils s'appuient ; que le juge ne peut désigner comme tuteur un mandataire judiciaire à la protection judiciaire des majeurs que si aucun membre de la famille ou aucun proche ne peut assumer cette fonction ; que pour conclure à la vacance de la tutelle, la cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'il ressort des pièces du dossier qu'il existe des difficultés familiales, que le souhait de la mère du majeur protégé était que la mesure de protection soit confiée à un tiers, sans indiquer et analyser les pièces versées aux débats sur lesquelles elle s'est fondée pour se prononcer de la sorte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 449 et 450 du code civil.
2° ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que les juges du fond doivent désigner et analyser, même sommairement, les documents soumis au débat contradictoire sur lesquels ils s'appuient ; que le juge ne peut désigner comme tuteur un mandataire judiciaire à la protection judiciaire des majeurs que si aucun membre de la famille ou aucun proche ne peut assumer cette fonction ; que pour conclure à la vacance de la tutelle, la cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'il ressort des pièces du dossier qu'il existe des difficultés familiales, que le souhait de la mère du majeur protégé était que la mesure de protection soit confiée à un tiers, sans indiquer et analyser les pièces versées aux débats sur lesquelles elle s'est fondée pour se prononcer de la sorte, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
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Contradictoire
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.