par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 12 mai 2011, 09-17390
Dictionnaire Juridique

site réalisé avec
Baumann Avocats Droit informatique

Cour de cassation, 2ème chambre civile
12 mai 2011, 09-17.390

Cette décision est visée dans la définition :
Avocat




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu les articles 6 bis, 10 et 54 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et 6.2, alinéa 3, du règlement intérieur national des barreaux, 415 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007, 174 et 175 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que les avocats peuvent recevoir des missions confiées par justice ; que selon les deux suivants, ils peuvent percevoir des honoraires de consultation, d'assistance et de conseil de rédaction d'actes juridiques sous seing privé pour autrui ;

Attendu, selon l'ordonnance infirmative attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, que M. X..., avocat, qui avait été mandaté par délibération du conseil de famille pour confier à un oenologue la vente de vins dépendant de la succession du père de la mineure Ambre Y... placée sous tutelle, a établi une facture d'honoraires que Mme Z..., en qualité de directrice de l'association vosgienne pour la sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes, et tutrice de la mineure, a contestée devant le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau d'Epinal ;

Attendu que pour rejeter la demande en paiement d'honoraires de M. X..., l'ordonnance énonce qu'il est constant que par délibération du 2 mai 2007, le conseil de famille de la mineure a, concernant le vin, mandaté M. X... "sur la base de l'inventaire établi par M. A..., pour confier à M. B..., oenologue, la vente des vins figurant sur cet inventaire conformément à l'estimation qui en a été faite, sachant que Mme C... avec Aurore Y... conserveront un certain nombre de ces bouteilles" ; que fort de ce mandat, M. X... a établi une facture d'honoraires le 26 novembre 2008 s'élevant à la somme de 2 106,83 euros, facture qu'il détaille comme suit : "Entretien, consultation avec Ambre sur les produits à exclure de la vente : 108 euros ; Entretien, consultation avec oenologue et spécialiste sur les valorisations : 157 euros ; Contacts directs pour les ventes de vins : 208 euros ; Inventaire et prélèvement des vins vendus chez JF D... (12 H x 80) : 960 euros ; Livraison du vin : 137 euros ; Rédaction compte rendu, tableau synthèse : 108 euros ; Frais AR Epinal-Vittel (50 km x 2 = 100 kms x 0,633) : 63,30 euros ; Frais livraison (32 kms x 0,633) : 20,26 euros ; Total HT : 1 761,56 euros ; Montant TVA 19,60 % : 345,27 euros ; Total TTC : 2 106,83 euros ; Total à payer : 2 106,83 euros" ; que, bien qu'attentive, la lecture de cette facture ne fait apparaître la réalisation d'aucun acte pouvant relever de la prestation et de la compétence d'un avocat ; qu'au cas présent, M. X... a agi dans le cadre d'un mandat qui n'est pas celui d'un avocat ; que dès lors, c'est à tort que l'ordonnance de taxe a qualifié ce montant d'honoraires ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les actes de conseil, d'assistance et de négociation justifiant les honoraires réclamés avaient été accomplis par l'avocat dans le cadre d'un mandat de représentation, de conseil et de négociation qui lui avait été confié par l'effet d'une délibération susceptible de recours du conseil de famille d'un mineur placé sous tutelle, ce dont il résultait qu'il avait agi dans le cadre d'une mission confiée par justice pour accomplir des actes rémunérés par honoraires, le premier président a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 15 octobre 2009, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Metz ;

Condamne Mme Z..., ès qualités, et Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Z..., ès qualités, et Mme Y... à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour M. X....

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR rejeté la demande en paiement d'honoraires de maître X... ;

AUX MOTIFS QU'il est constant que par délibération du 2 mai 2007, le conseil de famille de la mineure Ambre Y... a, concernant le vin, mandaté maître X... « sur la base de l'inventaire établi par maître A..., pour confier à monsieur B..., oenologue, la vente des vins figurant sur cet inventaire conformément à l'estimation qui en a été faite, sachant que madame C... avec Aurore Y... conserveront un certain nombre de ces bouteilles » ; que fort de ce mandat, maître X... a établi une facture d'honoraires le 26.11.2008 s'élevant à la somme de 2.106,83 €, facture qu'il détaille comme suit :

Facture n°081561

Soumis à la TVA

Entretien, consultation avec Ambre sur les produits à exclure de la vente : 108

Entretien, consultation avec oenologue et spécialiste sur les valorisations : 157

Contacts directs pour les ventes de vins : 208

Inventaire et prélèvement des vins vendus chez J.F. D... (12 H x 80) : 960

Livraison du vin : 137

Rédaction compte rendu, tableau synthèse : 108

Frais AR Epinal-Vittel (50km x 2 = 100 kms x 0,633 €) : 63,30

Frais livraison (32 kms x 0,633 €) : 20,26

Total HT : 1.761,56 €

Montant TVA 19,60 % : 345,27

Total TTC : 2.106,83

Total à payer : 2.106,83 €, soit 13.819,90 F ;

bien qu'attentive, la lecture de cette facture ne fait apparaître la réalisation d'aucun acte pouvant relever de la prestation et de la compétence d'un avocat ; qu'au cas présent, maître X... a agi dans le cadre d'un mandat qui n'est pas celui d'un avocat ; que dès lors, c'est à tort que l'ordonnance de taxe a qualifié ce montant d'honoraires et à tort qu'elle a été rendue ; qu'elle sera infirmée ; que les demandes de maître X... seront toutes rejetées ; que les dépens resteront à sa charge ;

1°) ALORS QUE l'avocat peut recevoir des missions confiées par justice ; qu'en décidant que maître X... avait agi dans le cadre d'un mandat qui n'est pas celui d'un avocat, après avoir constaté que ledit mandat lui avait été confié par la délibération d'un conseil de famille, organe présidé par le juge des tutelles, en sorte que maître X... avait agi dans le cadre d'une mission confiée par justice, le premier président de la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a violé les articles 6 bis de la loi du 31 décembre 1971 et 6.2 alinéa 3 du règlement intérieur national, ensemble l'article 415 du code civil dans sa version antérieure à la loi du 5 mars 2007, applicable à la cause ;

2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU' entre dans la mission de l'avocat la fourniture à ses clients de toute prestation de conseil et d'assistance ayant pour objet, à titre principal ou accessoire, la mise en oeuvre de règles ou principes juridiques, la rédaction d'actes, la négociation et le suivi des relations contractuelles ; qu'en décidant que maître X... avait agi dans le cadre d'un mandat qui n'est pas celui d'un avocat, après avoir constaté qu'il avait négocié et suivi la vente des vins en exécution de la délibération du conseil de famille, le premier président de la cour d'appel a violé les articles 54 de la loi du 31 décembre 1971 et 6.2 alinéa 2 du règlement intérieur national ;


3°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU' à supposer que les sommes réclamées par maître X... ne pussent pas être qualifiées d'honoraires, le premier président devait se borner à se déclarer incompétent, et non pas statuer au fond ; qu'en rejetant la demande de maître X..., après avoir retenu des motifs qui auraient dû le conduire à se déclarer incompétent seulement, le premier président de la cour d'appel a excédé ses pouvoirs, et a violé les articles 174 et 175 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.



site réalisé avec
Baumann Avocats Droit informatique

Cette décision est visée dans la définition :
Avocat


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.