par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 17 juin 2009, 08-13620
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
17 juin 2009, 08-13.620

Cette décision est visée dans la définition :
Don, donation




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Jean-Claude X... est décédé le 14 janvier 2005 en laissant pour lui succéder son épouse commune en biens, Mme Y... ; qu'il avait souscrit, en 1994, trois contrats d'assurance-vie Tercap désignant sa soeur, Mme X..., épouse Z..., en qualité de bénéficiaire et, en 1996 et 1998, deux contrats d'assurance-vie Lion vie multicapital en faveur de sa nièce, Mme A..., épouse B..., puis, racheté, en 2004, celui souscrit en 1996 ; que Mme Y... a demandé la réintégration des capitaux assurés dans l'actif communautaire sur le fondement de l'article 1421 du code civil et, subsidiairement, la réintégration des primes versées dans l'actif successoral et leur réduction, sur le fondement de l'article L. 132-13 du code des assurances ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le second moyen, pris en ses quatre branches, ci-après annexé :

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Rennes, 22 janvier 2008) de l'avoir déboutée de sa demande en réduction des primes versées par Jean-Claude X... ;

Attendu que, par motifs propres et adoptés, après avoir constaté que Jean-Claude X..., qui n'avait pas d'enfant, avait perçu un revenu global de 3 098 833 euros de 1994 à 2004 et que ses déclarations d'impôt de solidarité sur la fortune mentionnaient une base imposable comprise entre 1 et près de 2 millions d'euros au cours de la même période, la cour d'appel a retenu que, pour l'ensemble des contrats, il avait payé environ 1 900 000 euros à titre de primes, déduction faite des rachats intervenus pour un montant de 862 898 euros, soit approximativement la moitié de ses revenus et, qu'au titre du contrat Lion-vie encore en vigueur, souscrit en 1998 au profit de Mme B..., Jean-Claude X... avait versé des primes de 118 910, 23 euros, cette année là et de 323 640 euros en 2004, dont une somme de 238 000 euros, correspondant au produit d'une vente immobilière revenant à Mme B..., devait être déduite ; que les juges du fond ont relevé qu'âgé de 78 ans en 2004, Jean-Claude X... dirigeait toujours ses entreprises et retenu que, compte tenu de son espérance de vie, de la nature de ses obligations familiales et de la possibilité de rachat en cas de difficultés de trésorerie, faculté dont il avait usé en rachetant en 2004, sans frais ni pénalité, l'un des deux contrats Lion-vie, le contrat souscrit présentait pour le souscripteur une utilité certaine, tout en lui permettant, à raison de sa situation de fortune et de ses revenus, d'assurer ses obligations à l'égard de son épouse ; qu'en l'état de ces énonciations et sans être tenue de répondre aux conclusions inopérantes invoquées par la quatrième branche du moyen, la cour d'appel a souverainement estimé qu'au regard des situations patrimoniale et familiale du souscripteur, les primes versées n'étaient pas manifestement exagérées au sens de l'article L. 132-13 du code des assurances ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils pour Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré Mme X... mal fondée en sa demande fondée sur les dispositions de l'article 1421 du Code civil,

AUX MOTIFS QUE l'article 1421 du code civil sanctionne la gestion frauduleuse des biens communs par l'un des conjoints ; qu'en application de l'article L 132-12 du code des assurances la créance de la société d'assurance, née en raison du décès de Monsieur X..., a été acquise au seul profit du bénéficiaire désigné de sorte que les dispositions de l'article 1421 du code civil ne sauraient s'appliquer à l'attribution du capital décès ; que dans le cas présent, en cause d'appel, Madame Y... demande à la Cour, par application de l'article 1421 du code civil, d'ordonner la réintégration du capital assuré dans l'actif commun ; que ce capital n'ayant jamais fait partie des biens communs il ne peut avoir fait l'objet d'une gestion frauduleuse de la part de Monsieur X... ; qu'en conséquence Madame Y... sera déboutée de ce chef de demande,

ALORS QUE si chacun des époux a le pouvoir d'administrer seul les biens communs et d'en disposer, les actes accomplis en fraude par un conjoint sont inopposables à l'autre ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était précisément invitée, si M. X... n'avait pas payé des primes substantielles en exécution des contrats d'assurance-vie souscrits seul, et ce pour appauvrir la communauté, dans l'intention de nuire à son épouse ou pour favoriser un tiers, ce dont il résultait que les paiements ainsi effectués étaient inopposables à Mme X..., la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1421 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme X... de sa demande de réduction des primes versées par M. X...,

AUX MOTIFS QU QU'aux termes des articles L 132-12 et L 132-13 du code des assurances le capital ou la rente payables lors du décès de l'assuré ne font pas partie de sa succession à moins que les sommes versées à titre de primes n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ; que le caractère manifestement exagéré des primes versées s'apprécie au moment de leur versement au regard de l'âge, des revenus, de la situation patrimoniale et familiale du souscripteur et de l'utilité de l'opération ; que de l'année 1994 à l'année 2004 Monsieur X..., qui gérait un groupe de sociétés employant près de 1200 personnes, a perçu un revenu global de 3. 098. 833, non compris les rachats de contrats intervenus au cours de cette période pour la somme globale de 862. 898 ; que ses déclarations d'impôt de solidarité sur la fortune pour la même période mentionnent une base imposable se situant dans une fourchette comprise entre un et près de deux millions d'euro ; que durant cette même période il a contracte 3 contrats assurance-vie " TRECAP " en désignant sa soeur, Madame Z..., en qualité de bénéficiaire, et 2 contrats assurance-vie " Lion-
Vie " en désignant sa nièce en qualité de bénéficiaire. Il a réglé approximativement 1. 900. 000 à titre de primes, déduction faite des rachats intervenus en cours de contrat, soit approximativement la moitié de ses revenus ; que l'actif net de la succession ne présente qu'un solde créditeur de 240. 105 ; que toutefois cet état de fait résulte d'un redressement fiscal à hauteur de 107. 961 notifié postérieurement au décès de Monsieur X..., et de la perte de valeur des participations'dans le Groupe X... à raison des graves difficultés rencontrées par ces sociétés postérieurement au paiement des primes litigieuses ; que si le montant des primes versées est important, il n'était pas manifestement exagéré au regard des revenus et du patrimoine du souscripteur à la date de leur versement ;
qu'en outre lors de la souscription des contrats " TRECAP " Monsieur X... était âgé de 68 ans ; qu'il avait 72 ans lors de la souscription des contrats " Lion-Vie ". Monsieur X... n'avait pas d'enfant ; que dès lors, compte tenu de son espérance de vie au moment de ces souscriptions, de la nature de ses obligations familiales et de la possibilité de rachat en cas de difficultés de trésorerie, ces contrats présentaient pour lui une utilité certaine tout en lui permettant, à raison de sa situation de fortune et de ses revenus, d'assumer ses obligations à l'égard de son épouse ; qu'en conséquence la décision du premier juge sera confirmée en ce qu'elle a débouté Madame Y... de ses demandes,

1°) ALORS QUE les règles du rapport à succession et celles de réduction pour atteinte à la réserve des héritiers ne s'appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ; qu'un tel caractère s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur ; qu'ainsi, en décidant que les primes versées n'étaient manifestement pas exagérées eu égard aux facultés de M. X..., au motif qu'il aurait réglé approximativement 1. 900. 000 à titre de primes « déduction faite des rachats intervenus en cours de contrat », la Cour d'appel n'a pas apprécié le caractère manifestement exagéré de chacune des primes payées au moment de son versement et a violé l'article L. 132-13 du Code des assurances,

2°) ALORS QUE les règles du rapport à succession et celles de réduction pour atteinte à la réserve des héritiers ne s'appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ; qu'un tel caractère s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur ; qu'en décidant que les primes versées entre 1994 et 2004, déduction faite des rachats intervenus, n'étaient pas manifestement exagérées au regard des revenus et du patrimoine du souscripteur sur la même période, la Cour d'appel, qui n'a pas apprécié le caractère manifestement exagéré des primes eu égard aux facultés de M. X... au moment de leur versement, a violé l'article L. 132-13 du Code des assurances,

3°) ALORS QUE, dans ses conclusions régulièrement déposées et signifiées le 26 novembre 2007, Mme X... faisait valoir que M. X... n'était pas en bon état de santé au moment où il avait payé certaines des primes, puisqu'il avait fait l'objet d'un accident cérébral au cours de l'année 2000 et qu'à cette date, le cardiologue avait alors indiqué dans un rapport que les antécédents de santé de M. X... « sont lourds » (concl. d'appel, p. 52) ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions opérantes, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile,

4°) ALORS QUE dans ses conclusions régulièrement déposées et signifiées le 26 novembre 2007, Mme X... faisait expressément valoir que les sociétés dirigées par M. X... avaient rencontré de graves difficultés financières à compter de 1999, soulignant que certaines sociétés du groupe avaient été placées en liquidation judiciaire en 2001 et 2002 (concl. d'appel, p. 5) ; qu'en constatant le paiement des primes entre 1994 et 2004 et en ajoutant que les sociétés du groupe X... avaient rencontré des « graves difficultés postérieurement au paiement des primes litigieuses », sans répondre aux conclusions opérantes précédemment rappelées, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.



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Cette décision est visée dans la définition :
Don, donation


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