par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 9 décembre 2015, 14-20533
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
9 décembre 2015, 14-20.533

Cette décision est visée dans la définition :
Tourisme




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 13 mai 2014), que, le 2 février 2011, Mme X... a conclu auprès de la société Karavel un contrat ayant pour objet un forfait touristique comprenant une croisière sur un bateau de la société Costa Crociere ; qu'ayant fait, le deuxième jour du voyage, une chute sur le pont du bateau, elle a assigné la société Karavel, l'assureur de celle-ci, la société Hiscox Insurance Company Limited, ainsi que la société Costa Crociere, en réparation des préjudice subis ; que Mme X... a saisi le juge de la mise en état d'une demande visant à l'institution d'une expertise et à l'allocation d'une provision ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses première, deuxième, troisième et cinquième branches :

Attendu que la société Costa Crociere fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à Mme X... une provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, alors, selon le moyen :

1°/ que toute décision de justice doit, à peine de nullité, être motivée ; que dans ses écritures d'appel, la société Costa Crociere faisait valoir qu'en l'absence de lien contractuel entre elle et Mme X..., qui avait contracté avec la seule société Karavel, celle-là ne disposait d'aucune action directe à son encontre ; que dès lors, en condamnant la société Costa Crociere au bénéfice de Mme X..., sans répondre à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;

2°/ que la responsabilité de l'organisateur de croisière est régie exclusivement par les articles 47 à 49 de la loi n° 66-420 de la loi du 18 juin 1966 qui renvoient, s'agissant des dommages corporels résultant de l'exécution du contrat de transport, aux articles 37 et 38 de la loi, devenus articles L. 5421-3 et L. 5421-4 du code des transports ; qu'en retenant, après avoir relevé la qualité d'organisateur de croisière de la société Costa Crociere, que cette dernière ne pouvait se prévaloir des dispositions du code des transports qui se limitent aux opérations de transport de personnes, sans l'ensemble des prestations complémentaires offertes dans le cadre de la croisière et était dès lors soumise à l'article L. 211-16 du code du tourisme, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 211-16 du code du tourisme par fausse application, ensemble les articles 47 à 49 de la loi du 18 juin 1966 et L. 5421-3 et L. 5421-4 du code des transports par refus d'application ;

3°/ qu'en l'absence de sinistre majeur, le croisiériste victime d'un dommage corporel résultant d'un sinistre survenu dans le cadre de l'exécution du contrat de transport maritime proprement dit ne peut engager la responsabilité de l'organisateur de croisière qu'à charge d'établir la faute de ce dernier ou un manquement aux obligations qui lui sont imposées par l'article L. 5421-2 du code des transports ; qu'en se fondant, après avoir rappelé que la chute était intervenue pendant le voyage maritime, lors d'un exercice de sécurité, et pour dire que n'était pas sérieusement contestable l'obligation de la société Costa Crociere d'indemniser Mme X... des préjudices consécutifs à sa chute, sur des motifs inopérants tirés de ce que n'étaient établis ni la force majeure, ni le fait d'un tiers, ni la faute de la victime, sans caractériser la faute de l'organisateur de la croisière, la cour d'appel a violé les articles 49 de la loi n° 66-420 du 18 juin 1966 et L. 5421-3 du code des transports ;

4°/ qu'en l'absence de sinistre majeur, le croisiériste victime d'un dommage corporel résultant d'un sinistre survenu dans le cadre de l'exécution du contrat de transport maritime proprement dit ne peut engager la responsabilité de l'organisateur de croisière qu'à charge d'établir la faute de ce dernier ou un manquement aux obligations qui lui sont imposées par l'article L. 5421-2 du code des transports ; qu'en se fondant, pour dire non sérieusement contestable l'obligation de la société Costa Crociere d'indemniser Mme X... des préjudices consécutifs à sa chute sur le pont n° 4 lors d'un exercice de sécurité, sur le fait qu'il n'est pas établi que le pont était recouvert d'un revêtement antidérapant alors que la signalisation du danger n'avait été affichée que postérieurement à la chute, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les articles 49 de la loi n° 66-420 du 18 juin 1966, L. 5421-3 du code des transports et 1315 du code civil ;

Mais attendu, d'abord, que relève du régime de la responsabilité de plein droit institué par l'article L. 211-16 du code du tourisme, issu de la loi n° 92-645 du 13 juillet 1992 fixant les conditions d'exercice des activités relatives à l'organisation et à la vente de voyages ou de séjours, laquelle a transposé en droit interne la directive 90/ 314/ CEE du Conseil, du 13 juin 1990, concernant les voyages, vacances et circuits à forfait, l'organisateur d'une croisière qui présente les caractères d'un forfait touristique, au sens de l'article L. 211-2 du même code ; qu'après avoir constaté que la société Costa Crociere avait organisé, non le seul transport des passagers, mais la totalité des opérations composant la croisière, en ce compris l'ensemble des services touristiques complémentaires offerts à ce titre, la cour d'appel en a déduit à bon droit que, dès lors que la combinaison de ces opérations constituait un forfait touristique, au sens de l'article L. 211-2, précité, la société Costa Crociere, en sa qualité d'organisateur de voyages, était responsable de plein droit de la bonne exécution des obligations résultant du contrat conclu par Mme X... ;

Attendu, ensuite, qu'il résulte des articles L. 211-16 et L. 211-1, I du code du tourisme, que toute personne physique ou morale qui se livre à une opération consistant en l'organisation ou la vente de voyages ou de séjours individuels ou collectifs est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat ; que, par suite, la mise en oeuvre de cette responsabilité à l'encontre de l'organisateur du voyage ou du séjour n'est pas subordonnée à l'existence d'un lien contractuel entre ce dernier et l'acheteur ; que ce motif de pur droit permettant de répondre aux conclusions de la société Costa Crociere, le moyen ne peut être accueilli en ce qu'il invoque l'absence d'action directe de Mme X... à l'encontre de cette société ;

Attendu, enfin, qu'ayant retenu l'absence des causes exonératoires prévues par le second alinéa de l'article L. 211-16 du code du tourisme, la cour d'appel en a déduit à bon droit, sans inverser la charge de la preuve, que la responsabilité de plein droit de la société Costa Crociere n'était pas sérieusement contestable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses deux premières branches :

Attendu que les sociétés Karavel et Hiscox Insurance Company Limited font grief à l'arrêt de les condamner in solidum avec la société Costa Crociere à payer à Mme X... une provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, alors, selon le moyen :

1°/ que, lorsque le dommage subi par le voyageur résulte de l'exécution du contrat de transport maritime proprement dit et non d'une prestation annexe, la responsabilité de l'organisateur du voyage comme de l'agence de voyage est une responsabilité pour faute prévue aux articles L. 5421-3 et L. 5421-4 du code des transports ; qu'en l'espèce, bien qu'ayant constaté que la chute de la victime était intervenue pendant le voyage maritime, lors d'un exercice de sécurité et donc qu'il s'agissait d'un dommage corporel résultant de l'exécution du contrat de transport maritime proprement dit et que « les dispositions du code des transports (...) se limitaient aux opérations de transports de personne, sans l'ensemble des prestations complémentaires offertes dans le cadre de la croisière », l'arrêt attaqué a cependant considéré que les prestations proposées par l'agence de voyage et l'organisateur de la croisière relevaient des dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2 et L. 211-16 du code du tourisme, refusant ainsi de leur appliquer une responsabilité pour faute pour en inférer que les obligations de ces sociétés n'étaient pas sérieusement contestables ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 5421-3 et L. 5421-2 du code des transports ainsi que L. 211-1, L. 211-2 et L. 211-16 du code du tourisme ;

2°/ qu'elles faisaient valoir que les dispositions du code des transports, prévoyant une responsabilité pour faute des organisateurs de croisières, leur étaient applicables et soutenaient plus précisément que, dès lors que l'accident litigieux était survenu au cours du transport maritime, seules devaient s'appliquer les dispositions spéciales de la loi du 18 juin 1966 (ses articles 37 à 44), codifiées aux articles L. 5421-3 et L. 5421-4 du code des transports ; qu'en se bornant à affirmer que l'organisateur de la croisière ne pouvait se prévaloir des dispositions du code des transports sans rechercher si l'agence de voyage pouvait en bénéficier, délaissant ainsi le moyen dont elle se trouvait saisie, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que les prestations proposées par la société Karavel relevaient du champ d'application des articles L. 211-1 et L. 211-2 du code du tourisme, dès lors qu'elles constituaient un forfait touristique, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche visée par la deuxième branche, que ses constatations rendaient inopérante, a exactement décidé que la société Karavel était responsable de plein droit, en sa qualité de vendeur, des préjudices subis par la victime, peu important que le dommage soit survenu au cours du transport, dès lors que cette opération était l'une de celles composant le forfait touristique ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche, et le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa troisième branche ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Karavel, la société Costa Crociere et la société Hiscox Insurance Company Limited aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Karavel, la société Costa Crociere et la société Hiscox Insurance Company Limited à payer à Mme X... la somme globale de 4 000 euros ;
rejette les autres demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour la société Costa Crociere SPA.

Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société COSTA CROCIERE à payer à Madame X... une provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice ;

Aux motifs qu'« aux termes de l'article L 211-1 du code du tourisme, le présent chapitre s'applique aux personnes physiques ou morales qui se livrent ou apportent leur concours, quelles que soient les modalités de leur rémunération, aux opérations consistant en l'organisation ou la vente :

a) De voyages ou de séjours individuels ou collectifs ;

b) De services pouvant être fournis à l'occasion de voyages ou de séjours, notamment la délivrance de titres de transport, la réservation de chambres dans des établissements hôteliers ou dans des locaux d'hébergement touristique et la délivrance de bons d'hébergement ou de restauration ;

c) De services liés à l'accueil touristique, notamment l'organisation de visites de musées ou de monuments historiques ;

que le présent chapitre s'applique également aux opérations de production ou de vente de forfaits touristiques, tels que ceux-ci sont définis à l'article L. 211-2, ainsi qu'aux opérations liées à l'organisation et à l'accueil de foires, salons et congrès ou de manifestations apparentées dès lors que ces opérations incluent tout ou partie des prestations prévues aux a, b et c du présent I ;

qu'aux termes de l'article L 211-2 du code du tourisme, constitue un forfait touristique la prestation :

1° Résultant de la combinaison préalable d'au moins deux opérations portant respectivement sur le transport, le logement ou d'autres services touristiques non accessoires au transport ou au logement et représentant une part significative dans le forfait ;

2° Dépassant vingt-quatre heures ou incluant une nuitée ;

3° Vendue ou offerte à la vente à un prix tout compris ;

qu'aux termes de l'article L 211-16 du code du tourisme, toute personne physique ou morale qui se livre aux opérations mentionnées à l'article L. 211-1 est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ce contrat ait été conclu à distance ou non et que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci et dans la limite des dédommagements prévus par les conventions internationales ;

que toutefois, elle peut s'exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable soit à l'acheteur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d'un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues au contrat, soit à un cas de force majeure ;

qu'en l'espèce, tant la SAS KARAVEL que la SPA COSTA CROCIERE proposent des prestations relevant des dispositions des articles L 211-1 et L 211-2 sus visés. En effet, la SAS KARAVEL a vendu un forfait touristique comprenant une croisière et des propositions d'excursions aux escales, et la croisière est organisée par la SPA CROCIERE, pour le tout, et non seulement pour le transport ;

que c'est donc en vain que la SPA COSTA CROCIERE se prévaut des dispositions du code des transports qui se limitent aux opérations de transport de personne, sans l'ensemble des prestations complémentaires offertes dans le cadre de la croisière ;

que la chute de Madame X... est établie par la déclaration faite par la victime au préposé de la SPA COSTA CROCIERE à bord le jour de la chute et les attestations de deux témoins, Monsieur Z... et Monsieur A.... Il ne ressort pas du rapport d'accident que la SPA COSTA CROCIERE ait émis une quelconque réserve sur la cause de l'accident, « sol mouillé sur le pont n° 4 durant l'exercice de sauvetage sur le pont 4 » ;

que le premier juge a justement retenu que ni la force majeure ni le fait d'un tiers, ni la faute de la victime ne sont établis :

- le fait que le pont du bateau soit mouillé n'a rien d'imprévisible,
- il n'est pas établi que le pont était recouvert d'un revêtement antidérapant, la signalisation du danger n'a été affichée que postérieurement à la chute,
- le port de chaussures à talons compensés ne peut être imputé à la faute à la victime, sur un bâtiment de croisière de l'importance du COSTA SERENA, alors « navire amiral » de la flotte COSTA, et dont les avis des clients mentionnent qu'il présente une « bonne tenue à la mer » et donc une grande stabilité ;

qu'aucune des causes exonératoires de l'alinéa 2 de l'article L 211-16 ne peut bénéficier à la SAS KARAVEL ou à la SPA COSTA CROCIERE, c'est à bon droit que le premier juge a considéré que l'obligation de ces sociétés sur le fondement de leur responsabilité de plein droit de l'aliéna 1 dudit article n'était pas sérieusement contestable ;

que le montant de la provision accordée a été justement apprécié par le premier juge ;

que l'ordonnance entreprise sera donc confirmée, la SAS KARAVEL étant garantie par sa compagnie d'assurance HISCOX » (arrêt, pages 6 et 7) ;

Et aux motifs, à les supposer adoptés, du jugement, que par application de l'article 771, le juge de la mise en état est compétent pour ordonner même d'office, toute mesure d'instruction, de même que pour accorder une provision au créancier, lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; que l'article L. 211-16 du code de tourisme, dispose : « Toute personne physique ou morale qui se livre aux opérations mentionnées à l'article L. 211-1 (notamment vente de voyages) est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ce contrat ait été conclu à distance ou non et que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci et dans la limite des dédommagements prévus par les conventions internationales. Toutefois, elle peut s'exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable soit à l'acheteur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d'un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues au contrat, soit à un cas de force majeure ; qu'en l'espèce, les contestations émises ne sont pas sérieuses ; qu'en effet,- les circonstances de la chute, rapportées par la demanderesse, peuvent être retenues pour certaines, dès lors qu'elles sont corroborées par les attestations de deux témoins, M. Z... Salomon et M. A... Gérard, selon lesquels Mme X... a glissé sur le sol mouillé et non signalé, alors qu'il pleuvait ce jour là et que les panneaux de signalisation du danger n'ont été posés que le lendemain ;- que les conditions de la vente de la croisière prévoient expressément qu'elles sont régies par le Code du tourisme, en particulier par les articles R. 211-5 à R. 211-13 ; que par application de ces dispositions, en cas de chute sur la passerelle d'un bateau, à l'occasion d'une croisière organisée par une agence de voyages, la passagère victime peut prétendre à la réparation de son préjudice, en vertu du manquement à l'obligation de sécurité pesant sur l'exploitant du bateau et dont doit répondre également le vendeur de la croisière, en application des dispositions de l'article L. 211-16 du code du tourisme, sauf à ces derniers à s'exonérer, en vertu de l'article L. 211-16 du même code, de tout ou partie de leur responsabilité en apportant la preuve que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable soit à la victime, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d'un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues au contrat, soit à un cas de force majeure ; qu'en l'espèce, ni la force majeure, le fait d'un tiers, ni la faute de la victime ne sont établis, et le fait que le pont d'un bateau puisse être mouillé par la pluie ou les embruns ne paraît nullement imprévisible ;
qu'en l'absence de revêtement antidérapant, ou de signalisation du danger, il ne peut qu'être constaté que l'obligation de sécurité n'a pas été respectée par l'exploitant du bateau de croisière, manquement dont doit répondre le vendeur du voyage ; qu'au vu des pièces du dossier, et dans l'attente du rapport d'expertise judiciaire, qui sera ordonnée, pour déterminer le préjudice en lien avec la chute, il sera d'ores et déjà alloué à la demanderesse, au vu des souffrances endurées, une provision de 3. 000 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice ; que les défenderesses seront condamnées in solidum à verser cette somme à la demanderesse, l'appel en cause de l'agence de voyages, contre la société propriétaire du bateau de croisière, étant réservé à l'examen du juge du fond (ordonnance, pages 4, 5 et 6 in limine) ;

Alors, de première part, que toute décision de justice doit, à peine de nullité, être motivée ; que dans ses écritures d'appel, la société SPA COSTA CROCIERE faisait valoir qu'en l'absence de lien contractuel entre elle et Madame X..., qui avait contracté avec la seule société KARAVEL, celle-là ne disposait d'aucune action directe à son encontre ; que dès lors, en condamnant la société SPA COSTA CROCIERE au bénéfice de Madame X..., sans répondre à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;

Alors, de deuxième part et à titre subsidiaire, que la responsabilité de l'organisateur de croisière est régie exclusivement par les articles 47 à 49 de la loi n° 66-420 de la loi du 18 juin 1966 qui renvoient, s'agissant des dommages corporels résultant de l'exécution du contrat de transport, aux articles 37 et 38 de la loi, devenus articles L. 5421-3 et L. 5421-4 du code des transports ; qu'en retenant, après avoir relevé la qualité d'organisateur de croisière de la société SPA COSTA CROCIERE, que cette dernière ne pouvait se prévaloir des dispositions du code des transports qui se limitent aux opérations de transport de personnes, sans l'ensemble des prestations complémentaires offertes dans le cadre de la croisière et était dès lors soumise à l'article L. 211-16 du code du tourisme, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 211-16 du code du tourisme par fausse application, ensemble les articles 47 à 49 de la loi du 18 juin 1966 et L. 5421-3 et L. 5421-4 du code des transports par refus d'application ;

Alors, de troisième part et à titre subsidiaire, qu'en l'absence de sinistre majeur, le croisiériste victime d'un dommage corporel résultant d'un sinistre survenu dans le cadre de l'exécution du contrat de transport maritime proprement dit ne peut engager la responsabilité de l'organisateur de croisière qu'à charge d'établir la faute de ce dernier ou un manquement aux obligations qui lui sont imposées par l'article L. 5421-2 du code des transports ; qu'en se fondant, après avoir rappelé que la chute était intervenue pendant le voyage maritime, lors d'un exercice de sécurité, et pour dire que n'était pas sérieusement contestable l'obligation de la société SPA COSTA CROISIERE d'indemniser Madame X... des préjudices consécutifs à sa chute, sur des motifs inopérants tirés de ce que n'étaient établis ni la force majeure, ni le fait d'un tiers, ni la faute de la victime, sans caractériser la faute de l'organisateur de la croisière, la cour d'appel a violé les articles 49 de la loi n° 66-420 du 18 juin 1966 et L. 5421-3 du code des transports ;

Alors, de quatrième part et à titre subsidiaire, que le juge doit examiner l'ensemble des éléments de preuve soumis à son examen ; que pour dire non sérieusement contestable l'obligation de la société COSTA CROISIERE d'indemniser Madame X... des préjudices consécutifs à sa chute sur le pont n° 4 lors d'un exercice de sécurité, la cour d'appel relève qu'il ne ressortait pas du rapport d'accident que la SPA COSTA CROCIERE ait émis une quelconque réserve sur la cause de l'accident « sol mouillé sur le pont n° 4 durant l'exercice de sauvetage sur le pont 4 » ; qu'en se bornant à examiner l'« Accident report », document relatant les déclarations de la victime, à l'exclusion de l'« Injury statement », document relatant les observations de l'équipage, duquel il ressortait que les investigations menées avaient révélé que la zone de l'accident était sèche, dépourvue d'obstacle et correctement éclairée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors enfin, et à titre subsidiaire, qu'en l'absence de sinistre majeur, le croisiériste victime d'un dommage corporel résultant d'un sinistre survenu dans le cadre de l'exécution du contrat de transport maritime proprement dit ne peut engager la responsabilité de l'organisateur de croisière qu'à charge d'établir la faute de ce dernier ou un manquement aux obligations qui lui sont imposées par l'article L. 5421-2 du code des transports ; qu'en se fondant, pour dire non sérieusement contestable l'obligation de la société SPA COSTA CROISIERE d'indemniser Madame X... des préjudices consécutifs à sa chute sur le pont n° 4 lors d'un exercice de sécurité, sur le fait qu'il n'est pas établi que le pont était recouvert d'un revêtement antidérapant alors que la signalisation du danger n'avait été affichée que postérieurement à la chute, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les articles 49 de la loi n° 66-420 du 18 juin 1966, L. 5421-3 du code des transports et 1315 du code civil.

Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour les sociétés Hiscox Insurance Company Limited et Karavel.

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum une agence de voyage (la société Karavel, exposante), son assureur (la société Hiscox Insurance Company Limited, également exposante) et l'organisateur de la croisière (la société Costa Crocière) à payer à la victime une provision de 3. 000 ¿ ;

AUX MOTIFS QUE tant la SAS Karavel que la SPA Costa Crocière proposaient des prestations relevant des dispositions des articles L. 211-1 et L. 211-2 du code du tourisme ; qu'en effet, la SAS Karavel avait vendu un forfait touristique comprenant une croisière et des propositions d'excursions aux escales, et la croisière était organisée par la SPA Costa Crocière, pour le tout, et non seulement pour le transport ; que c'était donc en vain que la SPA Costa Crocière se prévalait des dispositions du code des transports qui se limitaient aux opérations de transport de personnes, sans l'ensemble des prestations complémentaires offertes dans le cadre de la croisière ; que la chute de Mme X... était établie par la déclaration faite par la victime au préposé de la SPA Costa Crocière à bord le jour de la chute et les attestations de deux témoins, M. Z... et M. A... ; qu'il ne ressortait pas du rapport d'accident que la SPA Costa Crocière avait émis une quelconque réserve sur la cause de l'accident, « sol mouillé sur le pont n° 4 durant l'exercice de sauvetage sur le pont 4 » ; que le premier juge avait justement retenu que ni la force majeure, ni le fait d'un tiers, ni la faute de la victime n'étaient établis ; que le fait que le pont du bateau était mouillé n'avait rien d'imprévisible ; qu'il n'était pas établi que le pont était recouvert d'un revêtement antidérapant, la signalisation du danger n'ayant été affichée que postérieurement à la chute ; que le port de chaussures à talons compensés ne pouvait être imputé à la faute de la victime, sur un bâtiment de croisière de l'importance du Costa Serena, à l'époque " navire amiral " de la flotte Costa, et dont les avis des clients mentionnaient qu'il présentait une « bonne tenue à la mer » et donc une grande stabilité ; qu'aucune des causes exonératoires de l'alinéa 2 de l'article L. 211-16 ne pouvant bénéficier à la SAS Karavel ou à la SPA Costa Crocière, c'était à bon droit que le premier juge avait considéré que l'obligation de ces sociétés sur le fondement de leur responsabilité de plein droit de l'alinéa 1 dudit article n'était pas sérieusement contestable (arrêt attaqué, p. 7, alinéas 4 à 8) ;

ALORS QUE, d'une part, lorsque le dommage subi par le voyageur résulte de l'exécution du contrat de transport maritime proprement dit et non d'une prestation annexe, la responsabilité de l'organisateur du voyage comme de l'agence de voyage est une responsabilité pour faute prévue aux articles L. 5421-3 et L. 5421-4 du code des transports ; qu'en l'espèce, bien qu'ayant constaté que la chute de la victime était intervenue pendant le voyage maritime, lors d'un exercice de sécurité et donc qu'il s'agissait d'un dommage corporel résultant de l'exécution du contrat de transport maritime proprement dit et que « les dispositions du code des transports (...) se limitaient aux opérations de transports de personne, sans l'ensemble des prestations complémentaires offertes dans le cadre de la croisière », l'arrêt attaqué a cependant considéré que les prestations proposées par l'agence de voyage et l'organisateur de la croisière relevaient des dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2 et L. 211-16 du code du tourisme, refusant ainsi de leur appliquer une responsabilité pour faute pour en inférer que les obligations de ces sociétés n'étaient pas sérieusement contestables ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 5421-3 et L. 5421-2 du code des transports ainsi que L. 211-1, L. 211-2 et L. 211-16 du code du tourisme ;

ALORS QUE, d'autre part, les exposantes faisaient valoir (v. leurs conclusions, p. 5, alinéas 5 et 9, p. 6, et p. 7, alinéas 1 à 7) que les dispositions du code des transports, prévoyant une responsabilité pour faute des organisateurs de croisières, leur étaient applicables et soutenaient plus précisément que, dès lors que l'accident litigieux était survenu au cours du transport maritime, seules devaient s'appliquer les dispositions spéciales de la loi du 18 juin 1966 (ses articles 37 à 44), codifiées aux articles L. 5421-3 et L. 5421-4 du code des transports ; qu'en se bornant à affirmer que l'organisateur de la croisière ne pouvait se prévaloir des dispositions du code des transports sans rechercher si l'agence de voyage pouvait en bénéficier, délaissant ainsi le moyen dont elle se trouvait saisie, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, enfin, les exposantes soutenaient (v. leurs conclusions, pp. 7 et 8) que, même en cas de responsabilité de plein droit, la victime devait prouver que son dommage était imputable à l'organisation de la croisière ; qu'elles précisaient qu'en l'espèce cette imputabilité n'était pas prouvée et, pour cela, se prévalaient de ce qu'un document intitulé injury statement produit aux débats par l'organisateur de la croisière soulignant que le pont était sec ; qu'en ne prenant pas en compte cet élément déterminant, délaissant ainsi le moyen dont elle se trouvait saisie, la cour d'appel n'a pas satisfait aux prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile.



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Cette décision est visée dans la définition :
Tourisme


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.