par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 10 septembre 2015, 14-20017
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
10 septembre 2015, 14-20.017

Cette décision est visée dans la définition :
Succession




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (1ère Civ. 20 juin 2012, pourvoi n° 10-21. 808), que Germaine X... a souscrit six contrats d'assurance sur la vie au bénéfice de son frère René X... ; que celui-ci est décédé le 4 janvier 2005 ; que, par avenants du 17 mars 2005, elle a désigné en qualité de bénéficiaires, à parts égales, Mme Marie-Christine X..., fille de René, et M. Jean-Pierre X..., fils de son autre frère, antérieurement décédé ; qu'elle est décédée le 21 décembre 2005 en laissant pour seuls héritiers sa nièce et son neveu précités ; qu'à la demande de Mme Marie-Christine X..., un jugement a prononcé la nullité de ces avenants pour insanité d'esprit de leur signataire et dit que Mme X... est la seule bénéficiaire des six contrats ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles L. 132-9 et L. 132-11 du code des assurances ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que, si l'attribution à titre gratuit du bénéfice d'une assurance sur la vie à une personne déterminée devient irrévocable par l'acceptation du bénéficiaire, cette attribution est présumée faite sous la condition de l'existence du bénéficiaire à l'époque de l'exigibilité du capital ou de la rente garantie, à moins que le contraire ne résulte des termes d'une clause de représentation, à défaut, elle est caduque et le capital ou la rente garantie font partie du patrimoine ou de la succession du contractant ;

Attendu que pour confirmer ce jugement, condamner M. X... à restituer à Mme X... une somme de 195 131, 18 euros et rejeter la demande tendant à voir dire que le contrat " Plurivalors " doit revenir à la succession faute de comporter une clause de représentation, l'arrêt retient que René X... avait accepté le bénéfice de ce contrat par lettre recommandée du 5 avril 2002 ce dont la compagnie d'assurance lui en a accusé réception le 19 avril 2002, le souscripteur en étant avisé ; que, conformément à l'article L. 132-9 du code des assurances, la stipulation en vertu de laquelle le bénéfice de l'assurance est attribué à un bénéficiaire déterminé devient irrévocable ; que dès lors, malgré le décès de René X... intervenu avant celui de Germaine X..., le bénéfice de ce contrat est entré dans le patrimoine de Marie-Christine X..., fille unique de René X... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la désignation de René X... était devenue caduque à la suite de son décès quand bien même l'avait-il acceptée, la cour d'appel qui n'a pas relevé l'existence d'une clause de représentation du bénéficiaire décédé, a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen :

Vu les articles 843 du code civil et L. 132-13, alinéa 2, du code des assurances ;

Attendu que, pour rejeter la demande de rapport des sommes versées au titre des primes manifestement excessives des six contrats d'assurance sur la vie, l'arrêt énonce que M. X... et Mme X... ne sont pas des héritiers réservataires de leur tante, qu'ils ne sont donc pas tenus au rapport d'une éventuelle donation et qu'en application des articles 843 et 863 du code civil et de l'article L. 132-13 du code des assurances, les règles du rapport à succession et celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers ne s'appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, même exagérées, en l'absence d'héritiers réservataires ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la qualité de réservataire est indifférente à l'obligation de rapport pesant sur tout héritier, la cour d'appel, ajoutant une condition à la loi, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 avril 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X..., la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille quinze, signé par Mme Flise, président, et par Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris ayant dit que Mme Y... est la seule bénéficiaire des six contrats d'assurance-vie en cause, condamné M. Jean-Pierre X... à restituer à Mme Marie-Christine Y... la somme de 195. 131, 18 € avec intérêts légaux et débouté M. X... de sa demande tendant à voir dire que le contrat « PLURIVALORS » devait revenir à la succession de Germaine X... ;

AUX MOTIFS QUE M. Jean-Pierre X... sollicite en outre la répartition du contrat « Plurivalors » au motif qu'en dépit de l'acceptation de M. René X..., alors bénéficiaire, sa désignation ne comportait pas une clause de représentation de telle sorte que le bénéfice du contrat revient aux héritiers de Mme Germaine X..., à savoir M. Jean-Pierre X... et Mme Marie-Christine X..., eu égard à la police d'assurance du contrat « Plurivalors » ;

que René X... avait accepté le bénéfice de ce contrat par lettre recommandée avec AR du 5 avril 2002 et la compagnie d'assurance lui en a accusé réception le 19 avril 2002, le souscripteur en a été avisé ;

que conformément à l'article L. 132-9 du Code des assurances, la stipulation en vertu de laquelle le bénéfice de l'assurance est attribué à un bénéficiaire déterminé devient irrévocable ; que dès lors malgré le décès de René X... intervenu avant celui de Germaine X..., le bénéfice de ce contrat est entré dans le patrimoine de Marie-Christine X..., fille unique de René X... ;

que M. Jean-Pierre X... sera donc débouté de ce chef de demande ;

ALORS QUE l'attribution à titre gratuit du bénéfice d'une assurance sur la vie à une personne déterminée est présumée faite sous la condition de l'existence du bénéficiaire à l'époque de l'exigibilité du capital de la rente garantie, à moins que le contraire ne résulte des termes de la stipulation ; que René X... (auteur de Mme Marie-Christine X...-Y...), désigné comme bénéficiaire du contrat d'assurance-vie « PLURIVALORS » souscrit par Germaine X... est décédé le 4 janvier 2005 avant la stipulante, Germaine X..., décédée le 21 décembre 2005 ; qu'en l'absence de toute clause de représentation dans la clause bénéficiaire dont s'agit et de toute autre désignation d'un bénéficiaire, fût-ce à titre subsidiaire, le capital ou la rente garantis font partie de la succession du contractant ; qu'en décidant le contraire, pour affirmer que le bénéfice de ce contrat est entré dans le patrimoine de Marie-Christine X..., fille unique de René X..., au motif inopérant que ce dernier avait accepté la clause bénéficiaire à son profit de son vivant, la Cour d'Appel a violé les articles L. 132-9 et L. 132-11 du Code des assurances.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. Jean-Pierre X... de sa demande de rapport des sommes versées par le contractant à titre de primes des six contrats d'assurance-vie pour versement de primes manifestement exagérées ;

AUX MOTIFS QUE M. Jean-Pierre X... demande à titre subsidiaire le rapport du montant des six contrats d'assurance-vie pour versement de primes manifestement exagérées sur le fondement de l'article L. 132-13 al. 2 du Code des assurances ;

que M. Jean-Pierre X... et Mme Marie-Christine X... ne sont pas des héritiers réservataires de leur tante, ils ne sont donc pas tenus au rapport d'une éventuelle donation ;

que M. Jean-Pierre X... excipe vainement du montant excessif des primes versées eu égard aux facultés financières du souscripteur, puisqu'en application des articles 843 et 863 du Code civil et de l'article L. 132-13 du Code des assurances, les règles du rapport à succession et celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers ne s'appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, fussent-elle exagérées, en l'absence d'héritiers réservataires ;

ALORS QUE tout héritier venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donation entre vifs, directement ou indirectement ; qu'en énonçant que les règles du rapport à succession ne s'appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de prime, fussent-elle exagérées, en l'absence d'héritiers réservataires, la Cour d'Appel a violé les articles 843, 857 du Code civil et L. 132-13 al. 2 du Code des assurances.



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Cette décision est visée dans la définition :
Succession


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.