par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. soc., 31 mai 2011, 10-17159
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Cour de cassation, chambre sociale
31 mai 2011, 10-17.159
Cette décision est visée dans la définition :
Syndicat
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 janvier 2010), rendu après cassation (n° 06-44.055), que lors d'une assemblée générale extraordinaire spécialement convoquée à cet effet le 6 novembre 2003, la Fédération des cheminots et activités complémentaires (la Fédération) a adopté, à une majorité de 50,16 % des suffrages, une résolution en faveur de la désaffiliation de la fédération de la confédération CFDT ; que quatre syndicats adhérents à la fédération ont contesté la validité de cette décision ; que par jugement du tribunal de grande instance de Paris du 8 février 2005, le vote aux termes duquel a été adoptée la résolution a été annulé ; que la cour d'appel a dit irrecevable, le 15 juin 2006, l'appel interjeté par la fédération ; que statuant sur renvoi après cassation, la cour d'appel de Paris a dit la résolution nulle, faute d'avoir été votée à l'unanimité ;
Attendu que la fédération fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen :
1°/ que les statuts du syndicat font la loi des parties et ne peuvent être modifiés que selon les dispositions desdits statuts ; qu'ayant relevé que les dispositions statutaires de l'union fédérale CFDT des cheminots et des activités complémentaires de la FGTE/CFDT n' n'exigent pas l'unanimité pour l'adoption d'une délibération relative à une modification statutaire et en décidant néanmoins que la décision de désaffiliation de l'union fédérale à la CFDT, qui constitue une modification statutaire, ne pouvait être prise qu'à l'unanimité de ses syndicats adhérents, la cour d'appel qui a dénaturé les articles 13 et 14 des statuts précités et l'article 9 du règlement intérieur de la fédération des cheminots et des activités complémentaires, a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que les statuts de l'Union fédérale des cheminots n'imposant aucune condition de majorité pour la modification de ses statuts, il s'ensuit que cette union est libre de décider de son affiliation à une confédération qui n'est qu'un moyen d'assurer la défense des intérêts professionnels des travailleurs et des travailleuses des entreprises ferroviaires et des activités complémentaires, peu important les dispositions statutaires de la confédération CFDT ; qu'en déniant à l'union fédérale des cheminots le droit de se désaffilier de la CFDT par l'exigence de l'unanimité des syndicats adhérents pour prendre une telle décision au motif inopérant tiré des statuts de la CFDT selon lesquels tout syndicat membre d'une fédération de la CFDT est obligatoirement affilié à la confédération, ce qui induirait que son affiliation à la CFDT est "un élément constitutif substantiel de l'Union fédérale des cheminots", la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, et le principe à valeur constitutionnelle de la liberté syndicale ;
3°/ qu'en outre que selon les statuts précités, l'assemblée générale ordinaire ou extraordinaire compétente pour toute modification statutaire délibère dans les conditions fixées par les organes directeurs de l'Union fédérale ; qu'en l'espèce, le bureau national, conformément aux statuts de l'Union fédérale des cheminots a convoqué une assemblée générale extraordinaire aux fins de se prononcer, à la majorité simple de ses membres, sur l'article 2 des statuts relatif à l'affiliation à la CFDT ; qu'en ne recherchant pas si la délibération de quitter la CFDT, prise à la majorité des syndicats membres, n'était pas conforme aux pouvoirs conférés au bureau national par les statuts, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que le changement d'affiliation d'une union syndicale doit être décidé dans les conditions prévues par les statuts ; qu'à défaut de disposition statutaire spécifique, la décision est prise aux conditions statutaires prévues pour la dissolution de l'organisation syndicale et à défaut, dans le silence des statuts, à l'unanimité des syndicats adhérents ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des productions que les statuts de la fédération, qui n'évoquaient pas les conditions d'une désaffiliation, prévoyaient que la dissolution de l'Union fédérale ne pouvait être prononcée que par une assemblée générale réunie sur convocation du conseil national en session extraordinaire et à la majorité des trois quarts des mandats ; que le vote relatif à la désaffiliation a été adopté à 50,16 % des voix ; qu'il en résulte que la résolution était nulle ; que par ce motif de pur droit substitué à ceux critiqués, la décision se trouve légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Fédération des cheminots et activités complémentaires aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer au syndicat général des transports du Rhône CFDT SGTR CFDT, au syndicat CFDT restauration ferroviaire trains de nuit, au syndicat général des transports CFDT du Vaucluse et des environs et au syndicat CFDT des cheminots et activités complémentaires Bretagne Altantique la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la Fédération des cheminots et activités complémentaires
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement qui a annulé le vote au terme duquel a été adoptée, lors de l'assemblée générale extraordinaire de l'Union fédérale des cheminots et des activités complémentaires du 6 novembre 2003, la résolution n°1 décidant de quitter la CFDT ;
AUX MOTIFS QUE si aucune disposition des statuts eux-mêmes, ne stipule effectivement, de manière précise, la majorité à laquelle peuvent être modifiées ces dispositions, les statuts ont néanmoins prévu, en leur article 13, le principe même de la modification statutaire au cours de l'assemblée générale ou extraordinaire ; que dans le règlement intérieur, auquel les statuts (article 14) confèrent leur propre force obligatoire, les seules dispositions relatives à une majorité de vote figurent à l'article 9 qui prévoit : les textes sont adoptés lorsque le nombre de mandats exprimés POUR est supérieur aux CONTRE ; que cependant, ce dernier article ajoute : exception faite pour les articles 1 et 2 des statuts dont il y a lieu de rappeler qu'ils se rapportent, notamment (article 2) à l'affiliation, cet article étant ainsi rédigé : « L'Union fédérale CFDT des cheminots et activités complémentaires fait partie de la Fédération générale des transports et de l'équipement CFDT dont elle accepte les statuts, les méthodes et les principes d'action, ainsi que l'affiliation à la CFDT » ; qu'il résulte des énonciations qui précèdent que si elles n'exigent pas l'unanimité les dispositions statutaires applicables à l'Union fédérale, d'une part, excluent expressément la règle de la majorité relative, pour les délibérations ayant trait à l'affiliation de l'Union à la CFDT ainsi qu'à la dénomination et au lieu du siège social (article 1 des statuts) de l'Union et, d'autre part, ne prévoient aucune autre majorité à laquelle se référer pour l'adoption de semblables délibérations ; qu'il ressort, également, des statuts de la CFDT, article 4 :
pourront faire partie de la confédération tous les syndicats qui acceptent les présents statuts et notamment la déclaration de principe ; article 5 : l'organisation interne de la CFDT comprend au plan professionnel les fédérations nationales d'industrie ou de secteur d'activité (
). Tout syndicat affilié entre dans les champs d'activité d'une fédération (
) ; il en est membre obligatoirement et de plein droit ; que le caractère obligatoire et corrélatif de l'affiliation, d'une part, des syndicats aux fédérations et à la confédération et, d'autre part, des fédérations à la confédération, a pour effet et pour objet d'établir et de maintenir un lien étroit et durable entre syndicats et confédération, par l'intermédiaire des fédérations ; que son affiliation à la CFDT étant ainsi un élément constitutif substantiel de l'Union fédérale des cheminots, la suppression de cette affiliation ne pouvait dès lors être décidée que par la volonté de tous les syndicats, appartenant à cette fédération, conformément à la règle de la liberté contractuelle ; que la logique de cette « organisation interne » de la CFDT explique et confirme donc que les statuts de l'Union fédérale, non seulement excluent la règle de majorité simple pour la modification des articles 1 et 2, mais encore ne renvoient à aucune autre règle de majorité en la matière, de sorte que comme le soutiennent les intimésc'est seulement à l'unanimité que pouvait être adoptée la résolution numéro 1, votée par l'assemblée générale du 6 novembre 2003 ;
1°- ALORS QUE les statuts du syndicat font la loi des parties et ne peuvent être modifiés que selon les dispositions desdits statuts ; qu'ayant relevé que les dispositions statutaires de l'Union fédérale CFDT des cheminots et des activités complémentaires de la FGTE/CFDT n' n'exigent pas l'unanimité pour l'adoption d'une délibération relative à une modification statutaire et en décidant néanmoins que la décision de désaffiliation de l'Union fédérale à la CFDT, qui constitue une modification statutaire, ne pouvait être prise qu'à l'unanimité de ses syndicats adhérents, la Cour d'appel qui a dénaturé les articles 13 et 14 des statuts précités et l'article 9 du règlement intérieur de la fédération des cheminots et des activités complémentaires, a violé l'article 1134 du Code civil ;
2°- ALORS QUE les statuts de l'Union fédérale des cheminots n'imposant aucune condition de majorité pour la modification de ses statuts, il s'ensuit que cette union est libre de décider de son affiliation à une confédération qui n'est qu'un moyen d'assurer la défense des intérêts professionnels des travailleurs et des travailleuses des entreprises ferroviaires et des activités complémentaires, peu important les dispositions statutaires de la confédération CFDT ; qu'en déniant à l'Union fédérale des cheminots le droit de se désaffilier de la CFDT par l'exigence de l'unanimité des syndicats adhérents pour prendre une telle décision au motif inopérant tiré des statuts de la CFDT selon lesquels tout syndicat membre d'une fédération de la CFDT est obligatoirement affilié à la confédération, ce qui induirait que son affiliation à la CFDT est « un élément constitutif substantiel de l'Union fédérale des cheminots », la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, et le principe à valeur constitutionnelle de la liberté syndicale ;
3°- ALORS en outre que selon les statuts précités, l'assemblée générale ordinaire ou extraordinaire compétente pour toute modification statutaire délibère dans les conditions fixées par les organes directeurs de l'Union fédérale ; qu'en l'espèce, le bureau national , conformément aux statuts de l'Union fédérale des cheminots a convoqué une assemblée générale extraordinaire aux fins de se prononcer, à la majorité simple de ses membres, sur l'article 2 des statuts relatif à l'affiliation à la CFDT ; qu'en ne recherchant pas si la délibération de quitter la CFDT, prise à la majorité des syndicats membres, n'était pas conforme aux pouvoirs conférés au bureau national par les statuts, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement qui a annulé le vote au terme duquel a été adoptée, lors de l'assemblée générale extraordinaire de l'Union fédérale des cheminots et des activités complémentaires du 6 novembre 2003, la résolution n°1 décidant de quitter la CFDT ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE sur les irrégularités de vote affectant la validité du vote dont font état les syndicats, s'agissant tout d'abord de l'irrégularité du vote émis au nom du syndicat général des transports du Vaucluse, il apparaît que le bureau de ce syndicat a donné mandat le 10 octobre 2003 à son secrétaire général conformément aux statuts du syndicat ainsi qu'à l'accord du 19 septembre 2003 pour représenter les cheminots du Vaucluse à l'assemblée générale de la branche cheminots le 6 novembre 2003 ; que par télécopie du 30 octobre 2003, il a été transmis par ce syndicat à l'Union fédérale CFDT des cheminots et activités complémentaires un bulletin d'inscription au nom de Monsieur Rémy X... comme délégué et porteur de mandats à l'assemblée générale extraordinaire du 6 novembre 2003 ; que lors de celle-ci, Monsieur X... n'a pu voter en raison du fait que la commission des mandats avait confirmé Monsieur Y... secrétaire de la branche cheminots comme porteur de mandats ; qu'il apparaît que Monsieur Y... n'avait aucun pouvoir régulier pour représenter le syndicat général des transports du Vaucluse, alors que de surcroît celui-ci avait été exclu de ce syndicat le 30 octobre 2003 ; que c'est donc à tort que Monsieur Y... a été admis à participer au vote de la résolution litigieuse pour le compte du syndicat général des transports du Vaucluse qui disposait de 1292 mandats soit 1,25 % des suffrages ; que par ailleurs, il s'avère que le syndicat CFDT restauration ferroviaire et trains de nuit, bien que rattaché à la FGTE-CFDT et justifiant du nombre de cotisations payées par ses adhérents (3252 pour l'année 2002 et 3125 en 2003) n'a pas été admis à participer à l'assemblée générale du 6 novembre 2003 au motif qui apparaît dénué de tout fondement sérieux selon lequel ce syndicat qui aurait demandé sa transformation de syndicat départemental en syndicat national ne serait plus reconnu par la confédération CFDT ; qu'il est ainsi suffisamment établi sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs, que ces irrégularités, eu égard à la très faible majorité à laquelle a été adoptée la résolution de désaffiliation de la CFDT ont été de nature à influer sur le résultat final ;
1°- ALORS QUE par application de l'article 6 du règlement intérieur de la fédération des cheminots et des activités complémentaires sur les mandats en cas de vote, la décision de la Commission des mandats s'impose à l'ensemble des syndicats dès lors qu'ils ne se sont pas opposés à cette décision avant le vote ; qu'en l'espèce, la Commission des mandats a admis Monsieur Y... à participer au vote en qualité de représentant du syndicat général des transports du Vaucluse et a refusé la participation du syndicat CFDT restauration ferroviaire et trains de nuit dont le champ géographique excluait sa présence à l'assemblée générale extraordinaire du 6 novembre 2003 ; qu'aucun de ces syndicats ne s'est opposé à ces décisions au moment du rapport de la Commission des mandats présenté avant le vote de l'assemblée générale extraordinaire du 6 novembre 2003 comme l'a constaté un huissier qui y était présent ; qu'en déniant à Monsieur Y... le droit de voter et en considérant que le syndicat CFDT restauration ferroviaire et trains de nuit aurait dû participer au scrutin dont il avait été exclu par la commission des mandats, la Cour d'appel qui a méconnu les dispositions statutaires, a violé l'article 1134 du Code civil ;
2°- ALORS en outre que la FCAC a fait valoir que la révocation de Monsieur Y... et la nomination de Monsieur X... comme représentant du syndicat général des transports du Vaucluse avaient été effectuées en violation des statuts de ce syndicat, que l'exclusion de Monsieur Y... ne pouvait être prononcée avant un délai de 3 semaines et avait été faite dans le seul but de mandater un secrétaire général favorable au maintien de la CFDT; qu'en outre, seul Monsieur Y... était habilité à représenter la branche des cheminots de ce syndicat ; qu'en ne s'expliquant pas sur le caractère abusif de l'exclusion de Monsieur Y... et de la désignation corrélative de Monsieur X... qui justifiait que ce dernier ne soit pas admis à participer à l'assemblée générale extraordinaire, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
3°- ALORS de surcroît que la FCAC a soutenu que le syndicat CFDT restauration ferroviaire et trains de nuit ne rentrait pas dans le champ géographique de l'Union fédérale des cheminots et activités complémentaires et n'avait donc aucun droit à participer à l'assemblée générale extraordinaire du 6 novembre 2003 ; qu'au demeurant, il ne figurait pas sur la liste des syndicats appelés à se prononcer ; qu'en se bornant à dire que la demande de transformation de ce syndicat de syndicat départemental en syndicat national n'était pas un fondement sérieux justifiant son exclusion de l'assemblée générale sans rechercher quelle était l'étendue de son champ géographique au moment de la tenue de l'assemblée, la Cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil.
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Cette décision est visée dans la définition :
Syndicat
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.