par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 2, 1er septembre 2016, 15-19524
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
1er septembre 2016, 15-19.524
Cette décision est visée dans la définition :
Fusion et scission
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que sur requête de l'Union nationale des syndicats de détaillants en fruits, légumes et primeurs et du syndicat de l'Union des métiers alimentaires de proximité, il a été ordonné en référé à la société Yvelines distribution, aux droits de laquelle se trouve la société Leader Price, de respecter les dispositions de l'arrêté du 15 novembre 1990 qui lui imposent de fermer les magasins qu'elle exploite le lundi ou le dimanche, et ce sous astreinte de 3 500 euros par « infraction constatée » passé un délai de huit jours suivant la signification de l'ordonnance ; que ces syndicats ont saisi un juge de l'exécution d'une demande de liquidation de l'astreinte provisoire ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la société Leader Price fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir prononcer l'irrecevabilité des demandes des syndicats, alors, selon le moyen, que l'astreinte, en raison de son caractère comminatoire, est nécessairement personnelle ; qu'en cas de fusion-absorption du débiteur, elle ne peut être liquidée à l'encontre de l'absorbant pour des faits antérieurs à la publication de la fusion-absorption ; qu'en déclarant néanmoins recevable la demande de liquidation de l'astreinte à son encontre pour des faits commis antérieurement à la publication de la fusion-absorption par la société Yvelines distribution, absorbée, la cour d'appel a violé les articles L. 131-2 du code des procédures civiles d'exécution et L. 236-3 du code de commerce ;
Mais attendu que le caractère personnel de l'astreinte ne s'oppose pas à ce que sa liquidation, qui tend à une condamnation pécuniaire, puisse être poursuivie à l'encontre de la société absorbante pour des faits commis par la société absorbée antérieurement à la date de la publication de la fusion-absorption ;
Et attendu qu'ayant retenu que l'acte de fusion-absorption avait été publié au Registre du commerce et des sociétés le 13 décembre 2013 et que les appelantes invoquaient des infractions commises entre le 15 septembre et le 25 novembre 2013, la cour d'appel a décidé à bon droit que la demande formée à l'encontre de la société Leader Price était recevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal pris en sa première branche :
Vu l'article R.121-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
Attendu que pour rejeter la demande de liquidation de l'astreinte provisoire, l'arrêt retient que l'ordonnance de référé sanctionnant « chaque infraction constatée », cette disposition qui s'impose au juge de l'exécution, implique un constat fait par huissier de justice ou toute personne investie par la loi ou le règlement du pouvoir de l'établir ou de le constater ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ajouté au dispositif dépourvu d'ambiguïté de l'ordonnance une condition qu'il ne comportait pas, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen unique du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions ayant confirmé le jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris en tant qu'il a débouté les syndicats de leur demande de liquidation de l'astreinte provisoire fixée par ordonnance du juge des référés du même tribunal du 13 juin 2013, l'arrêt rendu le 9 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Leader Price aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Leader Price exploitation à payer à l'Union nationale des syndicats de détaillants en fruits, légumes et primeurs (UNFD) et au syndicat l'Union des métiers alimentaires de proximité (UMAP) une somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier septembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour le syndicat l'Union de métiers alimentaires de proximité et l'Union nationale des syndicats de détaillants en fruits légumes et primeurs, demandeurs au pourvoi principal.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté l'Union Nationale des détaillants en fruits légumes et primeurs (UNFD) et le Syndicat l'Union de Métiers Alimentaires de Proximité (UMAP) de leurs demandes tendant à constater que la société LEADER PRICE EXPLOITATION, venant aux droits de la société YVELINES DISTRIBUTION, a ouvert son magasin les :
- dimanche 15 et lundi 16 septembre 2013,
- dimanche 22 et lundi 23 septembre 2013,
- dimanche 29 et lundi 30 septembre 2013,
- dimanche 13 et lundi 14 octobre 2013,
- dimanche 17 et lundi 18 novembre 2013,
- dimanche 24 et lundi 25 novembre 2013.
en contravention des dispositions de l'arrêté du 15 novembre 1990, et de l'ordonnance rendue le 13 juin 2013 par le tribunal de grande instance de Paris et, en conséquence, de les AVOIR déboutés de leur demande de liquidation de l'astreinte fixée à la somme de 3.500 €uros par infraction constatée conformément à l'ordonnance rendue le 13 juin 2013 par le tribunal de grande instance de Paris et de condamnation de la société LEADER PRICE EXPLOITATION, venant aux droits de la société YVELINES DISTRIBUTION, à leur payer la somme de 21.000 €uros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les parties ne justifient en cause d'appel d'aucun moyen ni élément nouveau de nature à remettre en cause la solution retenue par le premier juge par des motifs justement tirés des faits de la cause et des textes applicables, et que la Cour adopte, étant encore observé que :
- contrairement à ce que soutient l'intimée, le caractère personnel de l'astreinte ne s'oppose pas à ce que sa liquidation qui tend à une à une condamnation pécuniaire, puisse être poursuivie, pour la période antérieure à la date de publication de l'acte de fusion absorption, contre la société à qui a été transmise la totalité du patrimoine de la société absorbée,
- l'acte de fusion-absorption de la société Yvelines Distribution par la société Leader Price Exploitation ayant été publié au RCS de Paris le 13 décembre 2013, et les appelantes invoquant des infractions commises entre le 15 septembre et le 25 novembre 2013, la demande de liquidation est recevable,
- l'ordonnance du 13 juin 2013 sanctionnant chaque infraction "constatée", cette disposition qui s'impose au juge de l'exécution, implique un constat fait par huissier de justice ou toute personne investie par la loi ou le règlement du pouvoir de l'établir ou de la constater,
- cette appréciation s'évince des termes même de la décision, qui en énonçant que "l'UNFD et l'UMAP pouvant requérir l'huissier de leur choix pour faire procéder à tout constat de la violation des injonctions ainsi prononcées, il n'apparaît ni nécessaire ni justifié de l'ordonner", n'opère aucune distinction entre le constat de l'emploi d'un salarié le dimanche et celui de l'ouverture d'un magasin le lundi ou le dimanche ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE concernant la preuve des infractions, il convient d'observer que dans le dispositif de son ordonnance rendue le 13 juin 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a, notamment : ordonné à la société Yvelines Distribution de respecter les dispositions de l'arrêté lui imposant de fermer le magasin qu'elle exploite 85/87 rue de Meaux Paris 19ème le lundi ou le dimanche, sous astreinte de 3.500 € par infraction constatée, passé le délai de 8 jours suivant la signification de l'ordonnance ; que le juge des référés a donc assorti chaque infraction "constatée" d'une astreinte, l'infraction ne peut donc être établie que par constat fait par une personne investie par la loi du pouvoir de l'établir ou un huissier, les huissiers n'ayant pas le monopole en matière de constat ; qu'en l'espèce, les tickets de caisse produits ne peuvent pas valoir, à eux seuls, constat, aucune personne habilitée n'étant intervenue pour constater l'infraction ; que surabondamment, il convient d'observer que, s'agissant de photocopies, elles pourraient être falsifiables et que la valeur probante des tickets de caisse est contestée ; qu'en conséquence, les requérants ne justifient pas d'infractions ayant fait l'objet d'un constat par une personne habilitée et ils seront déboutés de leurs demandes en liquidation d'astreinte et condamnés aux dépens » ;
ALORS, DE PREMIERE PART, QUE le juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution ; qu'en affirmant que l'ordonnance du 13 juin 2013 « implique un constat fait par huissier de justice ou toute personne investie par la loi ou le règlement du pouvoir de l'établir [l'infraction] ou de la constater » quand le dispositif de ladite ordonnance se bornait à décider d'une astreinte « par infraction constatée », sans autre précision, la cour d'appel a modifié le dispositif de la décision de justice servant de fondement aux poursuites en y ajoutant et a violé l'article R. 121-1 du Code des procédures civiles d'exécution ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; qu'en se déterminant par référence aux motifs de l'ordonnance du 13 juin 2013 (p. 13, alinéa 2), la cour d'appel a violé les articles 1351 du Code civil et 480 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE la preuve d'un fait juridique peut être établie par tout moyen ; qu'en subordonnant la preuve de l'infraction à l'ordonnance du 13 juin 2013, simple fait juridique, à un constat fait par huissier de justice ou toute personne investie par la loi ou le règlement, du pouvoir de l'établir ou de la constater, et en retenant ainsi que les tickets de caisse produits ne peuvent valoir à eux seuls constat, la cour d'appel a violé les articles 1315, alinéa 2, et 1341 du Code civil ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QU'en se fondant sur la considération que des photocopies pourraient être falsifiables pour dénier aux tickets de caisse produits en photocopie toute valeur probante du fait allégué sans les examiner, la Cour d'appel, qui s'est déterminée par un motif inopérant, a violé l'article 1348 du code civil ;
ALORS, DE CINQUIEME PART ET DERNIERE PART, QU'en se fondant sur la circonstance que la valeur des tickets de caisse était contestée, sans se prononcer sur cette contestation, la cour d'appel a violé l'article 12 du Code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Leader Price exploitation, demanderesse au pourvoi incident éventuel.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt d'AVOIR confirmé le jugement ayant débouté la société Leader Price Exploitation de ses demandes visant à entendre prononcer l'irrecevabilité des requérants.
AUX MOTIFS PROPRES QUE -contrairement à ce que soutient l'intimée, le caractère personnel de l'astreinte ne s'oppose pas à ce que sa liquidation qui tend à une condamnation pécuniaire, puisse être poursuivie, pour la période antérieure à la date de publication de l'acte de fusion-absorption, contre la société à qui a été transmise la totalité du patrimoine de la société absorbée, -l'acte de fusion-absorption de la société YVELINES DISTRIBUTION par la société LEADER PRICE EXPLOITATION ayant été publié au RCS de PARIS le 13 décembre 2013, et les appelantes invoquant des infractions commises entre le 15 septembre et le 25 novembre 2013, la demande de liquidation est recevable ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'aux termes de l'article L. 236-3 du code de commerce, la fusion ou la scission entraîne la dissolution des sociétés qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux sociétés bénéficiaires dans l'état où il se trouve à la date de réalisation définitive de l'opération ; que la SAS LEADER PRICE EXPLOITATION a été assignée en liquidation d'astreinte après la publication de la fusion, le 13 décembre 2013 tandis que la SAS YVELINES DISTRIBUTION avait été assignée avant la publication de la fusion ; qu'aux termes de l'article susvisé la SAS LEADER PRICE EXPLOITATION a bien reçu transmission des dettes de la société absorbée et les requérants sont bien recevables à demander à son encontre la liquidation de l'astreinte pour la période antérieure à la fusion ;
ALORS QUE l'astreinte, en raison de son caractère comminatoire, est nécessairement personnelle ; qu'en cas de fusion-absorption du débiteur, elle ne peut être liquidée à l'encontre de l'absorbant pour des faits antérieurs à la publication de la fusion-absorption ; qu'en déclarant néanmoins recevable la demande de liquidation de l'astreinte à l'encontre de la société Leader Price Exploitation, absorbante, pour des faits commis antérieurement à la publication de la fusion-absorption par la société Yvelines Distribution, absorbée, la Cour d'appel a violé les articles L. 131-2 du code des procédures civiles d'exécution et L. 236-3 du code de commerce.
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Fusion et scission
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.