par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. crim., 8 juillet 2015, 14-83926
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Cour de cassation, chambre commerciale
8 juillet 2015, 14-83.926

Cette décision est visée dans la définition :
Parfaire




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :


- La société Quatresse,


contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-en-PROVENCE, 5e chambre, en date du 13 mai 2014, qui, pour escroquerie et tentative, l'a condamnée à 5 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 3 juin 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Soulard, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de M. le conseiller SOULARD, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général GUEGUEN ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-2, 313-1 du code pénal, préliminaire, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société Quatresse coupable d'escroquerie et de tentative d'escroquerie et condamné celle-ci à une amende délictuelle de 5 000 euros et à payer aux sociétés société civile immobilière SLG et SNC B... C...et Giraud chacune la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

" aux motifs propres que, la société Quatresse est prévenue d'avoir à Draguignan, courant 2005-2006, en faisant usage de la fausse qualité de propriétaire des parcelles section cadastrale AB22 et 23, rue François Sibilli à Saint-Tropez et en employant des manoeuvres frauduleuses (en l'espèce en produisant à l'instance judiciaire de faux contrats de bail), trompé le tribunal de grande instance de Draguignan, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, la société civile immobilière SLG et la SNC B... C...et X..., pour les déterminer à consentir un acte opérant obligation (démolition de l'ouvrage) ; (¿) que sur l'action publique, par acte du 19 octobre 2005, la société Quatresse, la société Carla, les consorts de Y...et Z..., respectivement propriétaire et locataires d'un immeuble situé à Saint-Tropez, assignaient devant le tribunal de grande instance de Draguignan les propriétaires des terrains jouxtant leur fonds, la société civile immobilière SLG et la SNC B... C...et X..., aux fins de démolition de l'ouvrage qu'ils y faisaient édifier, lequel les privait de vue et d'ensoleillement, ainsi qu'en paiement de la somme de 1 000 000 d'euros à titre de dommages et intérêts ; que par ordonnance du 7 décembre 2005, confirmée par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 20 juin 2006, le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan, saisi par acte du 20 octobre 2005, par les mêmes demandeurs, ordonnait la suspension immédiate des travaux de construction sous astreinte de 3 000 euros par jour de retard ; qu'au cours de l'instance au fond et de l'instance en référé, la société Quatresse produisait quatre baux qu'elle avait conclu le 1er octobre 2005 avec M. Z..., le 1er août 2005 avec M. de Y..., le 1er juillet 2005 avec la société avec la société Carla et le 1er janvier 2006 avec M. Paolo Z...; que découvrant que la société Quatresse avait vendu l'immeuble le 10 mai 2005 à la société Red Circle et le 10 juin 2005 à la société de droit luxembourgeois Carla et n'en était plus propriétaire aux dates de ses actions en justice, les société civile immobilière SLG et la SNC B... C...et Giraud l'assignaient en rétractation de l'arrêt du 20 juin 2006 ; qu'au cours de l'instance, la société Quatresse versait aux débats un protocole d'accord daté du 10 juin 2005 aux termes duquel elle s'engageait à l'égard de la société Carla, acquéreur de trois lots composant l'immeuble, à faire son affaire personnelle de toutes procédures judiciaires dont le fait générateur serait antérieur à la vente ; que par arrêt du 18 décembre 2007, la cour d'appel d'Aix-en-Provence constatait que la société Quatresse n'établissait pas l'existence d'un dommage dont elle aurait qualité à réclamer la cessation et rétractait l'arrêt qu'elle avait rendu le 20 juin 2006 ; qu'estimant que les quatre baux et le protocole d'accord versés au cours des instances judiciaires étaient des documents mensongers destinés à tromper la religion des juges saisis du litige les opposant à la société Quatresse, la société civile immobilière LSG et la SNC B... C...et X...déposaient plainte pour escroqueries ; que la société Quatresse a fait plaider sa relaxe : si elle reconnaît qu'elle n'était plus propriétaire de l'immeuble aux dates auxquelles elle a assigné les parties civiles en référé et devant la juridiction du fond, elle estime n'avoir commis aucun des faits délictueux visés par la prévention, la simple affirmation d'un droit de propriété n'étant pas pénalement répréhensible contrairement à l'usurpation d'une fausse qualité ; que les baux argués de faux n'ont à ses dires exercé aucune influence sur les décisions rendues qui auraient été en tous points similaires si les nouveaux propriétaires avaient agi eux-mêmes en justice ; que la prévenue soutient par ailleurs qu'elle avait qualité à agir en tant qu'ancienne propriétaire garante des droits cédés aux acquéreurs de lots par elle construits ; qu'elle souligne enfin l'absence de toute intention frauduleuse : les membres de la famille Z...dont les ayants droit économiques de la société Quatresse et de la société luxembourgeoise Carla et la vente de l'immeuble n'est intervenue qu'en raison de considérations fiscales ; que par bordereau du 17 mai 2006, la société Quatresse a communiqué des baux dont elle savait qu'ils n'étaient pas le reflet de la réalité ; qu'en effet, la société Quatresse était sans droit ni titre pour louer à des tiers des locaux situés dans un immeuble qu'elle avait cédé entièrement quelques mois auparavant, et ne pouvait pas davantage donner à bail le 1er juillet 2005 une partie desdits locaux à la société luxembourgeoise Carla qui en était elle-même devenue propriétaire le 10 juin 2005 ; qu'en produisant aux débats quatre faux contrats de bail destinés à établir qu'elle était propriétaire d'un immeuble qu'elle avait consenti à louer à quatre locataires, la prévenue a sciemment commis une manoeuvre frauduleuse destinée à tromper les juridictions saisies sur l'identité véritable du propriétaire de l'immeuble ; que la chose jugée n'ayant d'effet qu'entre les parties à l'instance à l'exclusion des sociétés Red Circle et Carla, véritables propriétaires de l'immeuble, la prévenue ne peut sérieusement soutenir que la communication de documents mensongers lui attribuant un droit de propriété qu'elle ne détenait plus est restée sans incidence sur les décisions judiciaires rendues ; que par ailleurs, dans le cadre de l'instance en rétractation de l'arrêt du 20 juin 2006, la société Quatresse a produit un protocole d'accord daté du 10 juin 2005 passé à ses dires simultanément à la vente du même jour des lots n° 3, 4 et 5 à la société luxembourgeoise Carla, et stipulant que la société Quatresse ferait son affaire personnelle de toutes garanties judiciaires dont le fait générateur serait antérieur à la date de la vente ; que cependant, ce protocole d'accord n'a été ni annexé à l'acte de vente ni authentifié par le notaire ; que de plus, ses clauses sont contredites par celles du compromis de vente par lequel la société luxembourgeoise Carla a vendu le 26 octobre 2006 ses lots à la société Red Circle, lequel stipule : « Le vendeur (la société Carla) déclare qu'il existe diverses procédures en cours pour lesquelles il agit en tant que demandeur. Le vendeur déclare faire son affaire personnelle tant à son profit qu'à sa perte desdits litiges ou procédures susvisés. Toutes les conséquences de ces procédures ¿ lui resteront acquises » ; qu'ainsi, ce protocole d'accord destiné à établir la qualité à agir de la société Quatresse contestée par ses adversaires est également un document mensonger ; qu'en le produisant en connaissance de cause dans le but de tromper la cour d'appel saisie d'une demande en rétractation de l'arrêt qu'elle avait rendu le 20 juin 2006, la société prévenue a commis une manoeuvre frauduleuse constitutive d'escroquerie ; que les premiers juges ont donc à juste titre retenu sa culpabilité du chef des délits visés par la prévention et la peine prononcée, proportionnée à la nature et à la gravité des faits, sera confirmée ; que, sur l'action civile, la déloyauté réitérée de la société Quatresse à l'égard des parties adverses dans le cadre de plusieurs instances judiciaires aux enjeux considérables a causé à ces dernières un préjudice moral indéniable, peu important par ailleurs la finalité réelle des manoeuvres dolosives et l'intérêt visé par la prévenue lorsqu'elle s'affirme mensongèrement propriétaire de l'immeuble ; que les premiers juges ayant fait une juste appréciation du préjudice moral subi par les parties civiles, les dispositions civiles du jugement seront confirmées ;

" et aux motifs, éventuellement adoptés des premiers juges, que la SNC B... C...et X...est propriétaire d'un terrain cadastré AB 27 sur le territoire de la commune de Saint-Tropez, sur lequel a été édifié et exploité jusqu'à la fin de l'année 2004 un commerce de prêt à porter et elle a acquis un terrain contigu le 5 octobre 2004 ; qu'en vue de l'aménagement d'un grand local devant être édifié sur l'ensemble de ses terrains, a été créée au cours de l'année 2004, la société civile immobilière SLG dont les parts appartiennent exclusivement aux familles B... C... et X...; que le permis de démolir l'ancien commerce est obtenu le 8 septembre 2004, le permis de construire le 13 avril 2005 et la société civile immobilière SLG démarre la construction sur sa propriété la construction d'un immeuble à usage de commerces remplaçant l'ancien bâtiment et devant être loué au groupe Armani ; que la société Quatresse, société de droit italien, qui est propriétaire de deux parcelles de terrain cadastrées AB 0022 et AB 023, jouxtant le fonds de la société civile immobilière SLG obtient par arrêté du 23 janvier 2004 un permis de construire en vue de la restructuration d'un bâtiment ancien et la réalisation d'un bâtiment neuf sur ces deux parcelles et le bâtiment est achevé en mars 2005, les travaux étant réceptionnés le 2 mai 2005 ; que la réalisation successive des deux ouvrages sur les fonds voisins a donné lieu à diverses procédures civiles, pénales et administrative et notamment :- le 8 juin 2004, la société civile immobilière SLG présente un recours en excès de pouvoir à l'encontre de l'arrêté du maire de Saint-Tropez du 23 janvier 2004 accordant à la société Quatresse son permis de construire ;- le 10 décembre 2004, la société civile immobilière SLG et la SNC B... C...et X...saisissent le tribunal de grande instance de Draguignan afin d'obtenir la condamnation de la société Quatresse à supprimer l'ensemble des vues directes qu'elle a créées sur sa propriété et à supprimer le système d'évacuation des eaux pluviales non conforme sous peine d'astreinte de 3 000 euros par jour de retard dans le délai de 8 jours à compter de la signification du jugement à intervenir ;- par requête du 13 octobre 2005, la société Quatresse, la société Carla, M. Anthony de Y..., M. Paolo Z...et M. Frederico Z...saisissent le tribunal de Nice d'une demande de suspension de l'arrêté du 13 avril 2005 par lequel le maire de Saint-Tropez avait délivré le permis de construire à la société civile immobilière SLG ;- le 19 octobre 2005, la société Quatresse, la société Carla, MM. de Y..., Paolo et Frédérico Z...saisissent le tribunal de Draguignan d'une demande en démolition de l'immeuble construit sur la parcelle AB 27 sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et à leur payer la somme de 1 000 000 d'euros sauf à parfaire ou à diminuer en raison du préjudice subi à la suite des troubles anormaux du voisinage qu'ils ont subi ;- le 20 octobre 2005, la société Quatresse, la société Carla, MM. de Y..., Paolo et Frédrico Z...saisissent le juge des référés aux fins de voir désigner un expert judiciaire, de voir ordonner la suspension des travaux entrepris par la société civile immobilière SLG jusqu'au dépôt du rapport de l'expert, du prononcé de la décision par le tribunal de Nice et le tribunal de grande instance de Draguignan sous peine d'astreinte de 10 000 euros par jour de retard ;- par assignation du 21 février 2006, la société Quatresse poursuit la liquidation de l'astreinte ; que si le permis de la société civile immobilière SLG était purgé du droit des tiers par décision du tribunal administratif de Nice du 18 mai 2006, la société Quatresse obtenait la suspension des travaux entrepris la société civile immobilière SLG sous peine d'astreinte de 3 000 euros par jour de retard par ordonnance du 7 décembre 2005 confirmée par arrêt du 20 juin 2006, obtenait la liquidation de l'astreinte à la somme de 363 000 euros par ordonnance du 3 mai 2006 et tentait de saisir les loyers versés par Armani et par arrêt du 8 janvier 2007 la cour d'appel minorait l'astreinte liquidée à 150 000 euros ; que c'est dans ces conditions que le 28 novembre 2006, la société civile immobilière SLG et la SNC B... C...et X...saisissait la cour d'appel d'Aix-en-Provence d'une demande de rétractation de l'arrêt du 20 juin 2006 ayant ordonné la cessation des travaux et le 26 mars 2007 déposait plainte avec constitution de partie civile contre la société Quatresse ; que par arrêt du 18 décembre 2007, la cour d'appel d'Aix-en-Provence rendait un arrêt de rétractation en mentionnant : « Attendu que la société civile immobilière SLG et la SNC Segrand C...et X...indiquent à la cour pour justifier de l'existence de circonstances nouvelles, que la société Quatresse avait avant d'assigner en référé, c'est-à-dire avant le 20 octobre 2005, déjà vendu l'immeuble litigieux ; qu'elles font ainsi état :- de la vente des lots 1 et 2 par la société Quatresse à la société Red Circle le 12 mai 2005 ;- de la vente des lots 3, 4 et 5 par la société Quatresse à la société Carla luxembourgeoise le 10 juin 2005, suivie de la revente par la société Carla des lots 3 et 4 à la société Red Circle suivant acte notarié du 27 décembre 2006 et du lot 5 à MM. Z...Paolo et Frederico par acte du 21 décembre 2006 ; que certes, la société civile immobilière SLG avait connaissance, à la date de l'audience de la cour du 22 mai 2006, de la vente des lots 1 et 2 à la société Red Circle, puisqu'elle avait été assignée en référé expertise, le 1er mars 2006, par cette société et la société Diesek France en leur qualité de propriétaires des murs et des fonds de commerce situés au rez-de-chaussée de l'immeuble construit par la société Quatresse ; mais que, par contre, elle ignorait la vente des autres lots par la société Quatresse puisque cette dernière se présentait devant le juge des référés comme propriétaire bailleresse et faisait état de location sur les locaux des 1er et 2ème étages de l'immeuble, conclus au profit de M. Frederico Z...le 1er octobre 2006, au profit de la société Carla luxembourgeoise le 1er juillet 2005 et au profit de M. de Y...le 1er août 2005 ; que la perte par la société Quatresse de sa qualité de l'ensemble des lots de l'immeuble voisin de la construction engagée par la société civile immobilière SLG constitue dont un fait antérieur à la date d'audience, mais inconnu de la société civile immobilière SLG et de la SNC C...et X..., de nature à ouvri un débat sur la qualité à agir de la société Quatresse devant le juge des référés » ; qu'ainsi au moment où elle assigne en référé pour obtenir la suspension des travaux sous astreinte la société Quatress n'est plus propriétaire et elle ment au président statuant en matière de référé en présentant la société Carla et MM. Z...et de Y... somme ses locataires ; que si l'on peut admettre à la rigueur que la société Quatresse ait pu communiquer par erreur des baux de 2003 en 2005, cette erreur est difficilement compréhensible et de plus il y a eu réticence dolosive en n'indiquant pas au juge des référés qu'elle avait vendu tous ses lots, c'est sciemment qu'elle a fabriqué des baux fictifs, fait faire un faux témoignage à Mme D...au sujet de Quatresse locataire de Carla luxembourgeoise qui aurait sous-loué à Carla italienne et a menti au juge des référés ce qu'établit à la fois la matérialité des faits d'escroquerie et l'intention délictuelle ; qu'en l'espèce, les allégations mensongères répétitives s'accompagnent d'éléments extérieurs faux baux et faux témoignage et les exigences de la jurisprudence sur l'escroquerie au jugement sont donc réunies ; qu'en outre, s'agissant du protocole d'accord qui aurait été annexé à la vente et selon lequel la société Quatresse continuerait d'exercer les procédures en cours, M. Z...a reconnu lors de son audition du 20 janvier 2010 par le magistrat instructeur qu'il n'était pas annexé à la vente, rien ne permet de se convaincre de son authenticité et ce protocole serait en contradiction avec le protocole de compromis de vente de la société Carla à la société Red Circle, aux termes duquel cette dernière assumait toutes les conséquences juridiques et financières liées aux procédures en cours ; qu'il résulte des éléments du dossier que les faits reprochés à la société Quatresse sont établis ; qu'il convient de l'en déclarer coupable et d'entrer en voie de condamnation ; que, sur l'action civile, par conclusions visées à l'audience par le greffe auxquelles il est expressément référé quant à leur développement, la société civile immobilière SLG et la SNC B... C...et X...demandent au tribunal de déclarer la société Quatresse responsable des préjudices subis par les victimes, statuer ce que de droit sur la peine, accueillir la constitution de partie civile des sociétés concluantes, condamner la société Quatresse à verser à la société civile immobilière SLG et à la SNC Sevegrans C...Giraud la somme de 100 000 euros à titre de justes dommages et intérêts à chacune des deux sociétés soit la somme de 200 000 euros avec exécution provisoire, condamner la société Quatresse au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; que par conclusions adressées le 30 mai 2013 en télécopie et remises à l'audience auxquelles il est expressément référé, la société Quatresse du fait de sa demande de relaxe, demande au tribunal de débouter les parties civiles de leurs demandes ; que dans l'escroquerie au jugement ce sont les juridictions qui sont essentiellement victimes puisqu'elles rendent des décisions erronées et les procédures au fond engagées par l'une et l'autre des parties ont été rendues nécessaires essentiellement du fait de la proximité des deux immeubles contigus, du fait de la contrariété des permis délivrés par le maire de Saint-Tropez, le défaut de qualité pour agir causant un préjudice essentiellement moral d'autant que finalement les parties civiles ont obtenu rétractation de l'arrêt de 2006 qui leur faisait grief, n'ont rien payé au titre de l'astreinte et ont fini leur immeuble dans les temps voulus ; que le fait qu'elles n'aient pas pu acheter le terrain derrière leur immeuble n'est pas lié à l'escroquerie au jugement ; qu'ouïes les conclusions du Ministère public ; qu'il y a lieu de déclarer la société Quatresse responsable des préjudices subis par les victimes ; que vu les articles 313-1, 313-3 et 121-5 du code pénal, la société Quatresse sera condamnée à payer à la société civile immobilière SLG et à la SNC B... C...et Giraud la somme de 10 000 euros chacune pour préjudice moral ;

" 1°) alors que les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, ne sont responsables pénalement que des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ; qu'en déclarant la société Quatresse coupable des faits qui lui étaient reprochés sans rechercher si ceux-ci avaient été commis pour son compte, par ses organes ou représentants, la cour d'appel a privé de sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

" 2°) alors que s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été mis en mesure de présenter sa défense sur la nouvelle qualification envisagée ; que la société Quatresse a été condamnée en première instance notamment pour avoir « tenté de trompé » le tribunal de grande instance de Draguignan, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, la société civile immobilière SLG et la SNC B... C...et X...pour les déterminer à consentir un acte opérant obligation, à savoir la démolition d'un ouvrage ; qu'en requalifiant ces faits en escroquerie, sans avoir invité le prévenu à s'expliquer sur cette nouvelle qualification, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

" 3°) alors qu'en énonçant, d'un coté, que la société Carla n'était pas partie aux différentes instances litigieuses et, de l'autre, que cette même société avait « assign é devant le tribunal de grande de Draguignan (¿) la société SLG et la SNC B... ¿ C...et X..., aux fins de démolition de l'ouvrage » et saisi le juge des référés du même tribunal aux fins de suspension des travaux de construction, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs contradictoires, a méconnu les textes susvisés ;

" 4°) alors qu'en retenant que la société Quatresse avait trompé le tribunal de grande instance de Draguignan et la cour d'appel d'Aix-en-Provence en produisant de faux contrats de bail pour obtenir la suspension des travaux entrepris par la société civile immobilière SLG, quand, d'une part, l'ordonnance rendue le 7 décembre 2005 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan avait écarté les baux litigieux comme rédigés en langue italienne et, d'autre part, l'arrêt rendu le 20 juin 2006 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ne s'était pas davantage fondé sur lesdits baux pour confirmer l'ordonnance entreprise, la cour d'appel a dénaturé l'ordonnance du 7 décembre 2005 et l'arrêt du 20 juin 2006 ;

" 5°) alors qu'en retenant que la société Quatresse avait trompé la société SNC B... C...et X...en produisant de faux contrats de bail pour obtenir la suspension des travaux entrepris par la société civile immobilière SLG, quand, d'une part, l'ordonnance rendue le 7 décembre 2005 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan indiquait comme défenderesse la seule « SCI SLG », à l'exclusion de la société SNC B... C...et X...et, d'autre part, que l'arrêt rendu le 20 juin 2006 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence avait relevé que « la SNC B... C... X...n'est pas intervenue volontairement à la procédure de référé qui nous occupe », la cour d'appel a dénaturé l'ordonnance du 7 décembre 2005 et l'arrêt du 20 juin 2006 ;

" 6°) alors qu'en retenant que la société Quatresse avait trompé la cour d'appel d'Aix-en-Provence en produisant de faux contrats de bail pour obtenir la liquidation de l'astreinte quand il ressort de son arrêt du 8 janvier 2007, d'une part, que la société civile immobilière SLG et la SNC B... C...et X...soutenaient déjà devant elle que la prévenue aurait communiqués de faux contrats de bail et, d'autre part, qu'il ne s'était pas fondé sur ceux-ci pour liquider l'astreinte, la cour d'appel a dénaturé l'arrêt du 8 janvier 2007 " ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 121-2 du code pénal ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, selon l'article 121-2 du code pénal, les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, ne sont responsables pénalement que des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ;

Attendu que, pour déclarer la société Quatresse coupable des infractions qui lui sont reprochées, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher par quel organe ou représentant les délits reprochés à la personne morale avaient été commis pour son compte, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 13 mai 2014, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit juillet deux mille quinze ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.



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