par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 8 octobre 2014, 13-24546
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
8 octobre 2014, 13-24.546

Cette décision est visée dans la définition :
Remploi




Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Vu les articles 1406, alinéa 2, et 1434 du code civil ;

Attendu qu'il résulte du premier de ces textes qu'à défaut de déclaration de remploi, lors d'une acquisition réalisée avec des deniers propres à un conjoint marié sous le régime de la communauté, les biens acquis ne prennent, par subrogation, la qualité de propres dans les rapports entre époux, que si ceux-ci sont d'accord pour qu'il en soit ainsi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., qui s'était marié en 1978, sans contrat préalable, avec Mme Y..., a vendu, le 7 novembre 1986, un immeuble lui appartenant en propre dont le prix a servi à constituer son apport à la constitution de la SCI La Roucoulaire, en contrepartie duquel cent parts sociales lui ont été attribuées ; qu'après le prononcé du divorce par un jugement du 25 janvier 1999, une contestation a opposé les ex-époux sur la nature des parts sociales dont le mari était titulaire au regard de leur communauté ;

Attendu que, pour exclure des opérations de liquidation de la communauté les parts et actifs de la SCI détenus par M. X..., l'arrêt énonce que l'apport en trésorerie pour permettre à cette société d'acquérir un immeuble s'analyse en une avance sur compte courant, ce dont il suit une créance de sa part à l'encontre de la SCI qu'il détient en propre par application des dispositions de l'article 1406, alinéa 2, du code civil et que la nature des parts qui lui ont été attribuées en contrepartie de son apport lors de la constitution de la société s'analyse comme une créance sur celle-ci, qu'il détient également en propre en vertu de ces mêmes dispositions ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'ayant été acquises en rémunération d'un apport en numéraire, à défaut d'accord entre les époux, les parts sociales ne pouvaient prendre la qualité de propres du mari, la cour d'appel a, par fausse application du second et refus d'application du premier, violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a exclu des opérations de liquidation du régime de communauté les parts et actifs de la SCI La Roucoulaire, l'arrêt rendu le 21 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier  ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit octobre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

Il est fait grief à la décision infirmative attaquée d'AVOIR dit qu'étaient exclus des opérations de liquidation du régime de communauté les parts et actifs de la SCI La Roucoulaire et d'AVOIR débouté Mme Y... de ses demandes s'y rapportant ;

AUX MOTIFS QU' « il est établi par les productions non contestées par madame Y..., que monsieur Didier X... a vendu le 7 novembre 1986 un immeuble qu'il avait reçu en donation en septembre 1977, et que le prix de vente lui a servi à constituer son apport à hauteur de 10.000 francs, dans le cadre de la constitution de la SCI La Roucoulaire, en contrepartie duquel il lui a été attribué 100 parts de ladite société, et à permettre, concurremment avec les autres associés, l'acquisition, fin novembre 2006, par la SCI, de l'immeuble de Mougins ; que les parties s'opposent sur le point de savoir si les parts attribuées à monsieur X... et l'actif de la SCI constitué par l'immeuble de Mougins à hauteur de ses droits dans la SCI doivent être qualifiés de propres de celui-ci, ou de biens de communauté ; qu'aux termes de l'article 1406 alinéa 2 du code civil, forment des propres, par l'effet de la subrogation réelle, les créances qui remplacent des propres, ainsi que les biens acquis en emploi ou en remploi, conformément aux articles 1434 et 1435 du code civil ; qu'aux termes de l'article 1434, l'emploi ou le remploi est censé fait à l'égard d'un époux, toutes les fois que, lors d'une acquisition, il a déclaré qu'elle était faite de deniers propres ou provenus de l'aliénation d'un propre, et pour lui tenir lieu d'emploi ou de remploi et, à défaut de cette déclaration dans l'acte, l'emploi ou le remploi n'a lieu que de l'accord des époux, et il ne produit ses effets que dans leurs rapports réciproques ; qu'en ce qui concerne en premier lieu l'apport en trésorerie pour permettre à la SCI d'acquérir l'immeuble, l'opération s'analyse, non pas en une acquisition par monsieur X... d'un droit réel à hauteur de sa quote part dans la SCI, mais en une avance en compte courant, ce dont il suit une créance de sa part à l'encontre de cette dernière qu'il détient en propre par application des termes précités de l'article 1406 alinéa 2 du code civil ; que sur la question en second lieu de la nature des parts qui lui ont été attribuées en contrepartie de son apport dans le cadre de la constitution de la SCI, l'attribution de ces parts, qu'il a contribué par son apport à créer, ne peut s'analyser en une acquisition au sens de l'article 1434 précité, mais comme une créance sur la SCI, qu'il détient également en propre par application une nouvelle fois des dispositions de l'article 1406 alinéa 2 » ;

1) ALORS QUE les créances acquises à l'aide de fonds propres au cours de la communauté sont communes en l'absence de clause de remploi ; qu'en affirmant que l'apport en trésorerie de M. X... pour permettre à la SCI d'acquérir un immeuble constituait une créance lui appartenant en propre, alors qu'il résultait de ses propres constatations que cet apport avait été effectué à l'aide de fonds propres, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1406 du code civil et par refus d'application l'article 1434 de ce même code ;

2) ALORS QUE les parts sociales attribuées à un époux en contrepartie d'un apport de fonds propres au cours de la communauté sont des biens communs en l'absence de clause de remploi ; qu'en affirmant que les parts sociales attribuées à l'époux en contrepartie de son apport s'analysaient en un bien propre, tout en constatant que cet apport avait été réalisé à l'aide de fonds propres, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1406 du code civil et par refus d'application l'article 1434 de ce même code.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.