par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 23 juin 2010, 08-20239
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
23 juin 2010, 08-20.239
Cette décision est visée dans la définition :
Nom, Prénom
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches, ci-après annexé :
Attendu que Mme X... est née le 25 mars 1990 à Bastia ; qu'elle avait été reconnue par sa mère, Mme Y..., avant sa naissance, le 2 mars 1990 ; qu'elle a été légitimée par le mariage, célébré le 6 décembre 1997, de Mme Y... avec M. X... ; que le 8 juin 2007, après son émancipation, Mme X... a saisi le président du tribunal de grande instance d'une demande de rectification de son nom patronymique au motif qu'elle justifiait d'une possession loyale et prolongée du nom maternel Y... depuis sa naissance ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué (Bastia, 25 juin 2008) de l'avoir déboutée de sa demande tendant à voir substituer le nom "Y..." au nom "X..." dans les actes de l'état civil ;
Attendu que si la possession d'un nom est propre à conférer à celui qui le porte le droit à ce nom, la loi n'ayant réglé ni la durée, ni les conditions d'une telle possession, il appartient aux juges du fond d'en apprécier souverainement la loyauté et les effets ; que la cour d'appel, qui a justement retenu que la possession devait être suffisamment longue pour témoigner d'une volonté persistante de s'approprier ce nom, a constaté, d'abord, que Mme X... avait acquis le nom de son père en 1997 à la suite de la légitimation puis, que pour justifier de l'usage du nom de sa mère, elle produisait des pièces concernant sa scolarité, ses activités culturelles, sa mutuelle, sa carte nationale d'identité et des pièces bancaires couvrant une période de dix ans, entre le 6 décembre 1997 et 2007 ; qu'elle en a souverainement déduit que ces éléments étaient insuffisants pour établir une possession prolongée de nature à permettre l'acquisition du nom de "Y..." et a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Blanc, avocat aux Conseils pour Mme X...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mademoiselle Anna-Laura X... de sa demande tendant à voir substituer le nom "Y..." au nom "X..." dans les actes de l'état civil ;
Aux motifs propres que « l'acte de naissance de Mademoiselle X... fait apparaitre qu'elle est née le 25 mars 1990, qu'elle a été reconnue par anticipation par sa mère, Madame Christiane Y..., qu'elle a changé de prénoms en 1991, qu'elle a été reconnue par Monsieur Jean-Jacques X... par jugement du 4 novembre 1993 et qu'elle a été légitimée par le mariage de ce dernier avec Madame Y... le 6 décembre 1997 ; qu'elle a ainsi acquis le nom de son père, X... ; que l'acte de naissance de Mademoiselle X... ne comporte, donc, aucune erreur ( ) ; que les pièces produites par Mademoiselle X... ( ) couvrent une période de dix ans entre le 6 décembre 1997 et 2007 ; qu'elles sont insuffisantes pour établir une possession prolongée de nature à caractériser la volonté persistante de s'approprier le nom "Y..." ; qu'il n'est pas non plus justifié d'une possession non interrompue dès lors que l'ordonnance d'émancipation du 3 juillet 2006 fait apparaitre que la requête a été faite au nom d'Anna-Laura X... » ;
Et aux motif adoptés que « la requérante ne saurait invoquer l'usage loyal du nom Y... dès lors que c'est en parfaite connaissance de la légitimation intervenue et de la modification patronymique subséquente, que ses parents ont continué à lui faire user de son nom de naissance ; qu'en tout état de cause, la conscience du caractère précaire et fragile de la conservation de son nom maternel en l'état de la connaissance du mariage de ses parents ôte à Melle X..., mineure émancipée, le bénéfice de l'usage loyal du nom Y... ; en outre, il est constant que l'exigence d'un usage prolongé s'entend d'un délai tel que la possession publique, notoire et acceptée par tous renverse le principe d'immutabilité au profit du maintien d'une constance transgénérationnelle et de l'absence de remise en cause d'actes d'état civil dressés sous le nom d'usage ; qu'en l'espèce, la possession d'usage étant de dix années, il convient de constater son caractère amplement insuffisant ; qu'il résulte donc des précédentes énonciations que la possession d'usage dont se prévaut Mademoiselle X... ne présente pas le caractère d'une possession patronymique acquisitive de nature à permettre de considérer que son acte de naissance fût entaché d'une erreur ouvrant droit à rectification » ;
Alors que 1°) la possession prolongée est de nature à conférer un droit sur le nom ; qu'en ayant décidé que seule la possession « transgénérationnelle » du nom pouvait produire un tel effet, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne contient pas et a ainsi violé les articles 61, 99 et 311-1 du Code civil ;
Alors que 2°) en ayant retenu que la possession du nom invoquée par Mademoiselle X... s'étendait sur une période de 10 ans, de 1997 à 2007, sans avoir recherché, comme elle y était invitée, si la possession du nom de Y... n'avait pas débuté dès la naissance d'Anna-Laura, en 1990, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 61, 99 et 311-1 du Code civil ;
Alors que 3°) la possession du nom doit être loyale et donc exempte de fraude ; qu'en ayant retenu que Anna-Laura ne pouvait invoquer l'usage loyal du nom de Y... dès lors que le mariage de ses parents, en 1997, avait eu pour effet de la légitimer et de modifier, subséquemment, son nom patronymique, sans avoir recherché si Anna-Laura, alors âgée de 7 ans avait effectivement eu connaissance des effets juridiques attachés au mariage de ses parents sur son nom et avait eu la volonté d'usurper celui-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 61 et 99 du Code civil ;
Alors que 4°) la possession prolongée d'un nom peut conférer un droit sur celuici, sans qu'il soit nécessaire qu'elle soit continue et ininterrompue ; qu'en ayant débouté Mademoiselle X... de sa demande au motif que la possession du nom de Y... avait été interrompue en 2006, la cour d'appel a violé les articles 61, 99 et 311-1 du Code civil ;
Alors que 5°) en ayant relevé d'office que la possession avait été interrompue par la requête en demande d'émancipation, sans avoir préalablement provoqué les explications des parties sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.
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Nom, Prénom
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.