par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 18 février 2010, 09-12206
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
18 février 2010, 09-12.206

Cette décision est visée dans la définition :
Circulaire




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles R. 441-11, R. 441-13 et D. 461-9 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée en qualité de technicienne supérieure en agro-alimentaire par la société Etablissements Jean Chapin (la société), a adressé le 21 juin 2004 à la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine (la caisse) une déclaration de maladie professionnelle ; que, le 13 octobre 2004, la caisse a informé l'employeur de la clôture de l'instruction et de la possibilité de consulter le dossier dans un délai de dix jours ; que, le 25 octobre 2004, elle a décidé la prise en charge de cette maladie au titre de la législation professionnelle ;

Attendu que, pour déclarer inopposable à la société cette décision, l'arrêt retient que la caisse nationale d'assurance maladie, dans les circulaires du 19 juin 2001 et de l'année 2007, impose un certain nombre de règles aux caisses primaires d'assurance maladie en ce qui concerne l'obligation d'information de l'article R.441-11 du code de la sécurité sociale, et que, s'agissant du délai de consultation du dossier avant la prise de décision, il est fixé par la caisse nationale d'assurance maladie au minimum à dix jours, ce qui veut dire que, pour assurer une sécurité juridique et la garantie des droits des parties, l'employeur doit impérativement disposer de dix jours ouvrés ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des circulaires dépourvues d'effet normatif, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne la société Etablissements Jean Chapin aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille et Vilaine


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré inopposable à la société ETABLISSEMENTS JEAN CHAPIN la décision de prise en charge par la Caisse de la maladie professionnelle de Madame X... , d'AVOIR annulé la décision de la Commission de recours amiable du 16 mars 2006 et d'AVOIR condamné la Caisse primaire d'assurance maladie au paiement de la somme de 1.000 euros à la société ETABLISSEMENTS JEAN CHAPIN en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE s'agissant de l'obligation d'information mise à la charge de la caisse primaire, il résulte des dispositions de l'article R 441-11 al. l du Code de la sécurité sociale que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, quelle que soit la gravité des conséquences de l'accident ou de la maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à compter de laquelle elle prévoit de prendre sa décision ; que cette information pendant la durée de l'instruction du dossier doit permettre aux parties avant qu'une décision définitive soit prise par la Caisse, d'échanger à armes égales toutes informations utiles sur les circonstances de l'accident ou l'origine de la maladie, dans le respect d'un débat contradictoire et de trouver si possible une solution à l'amiable ; qu'à ce sujet la CNAM dans les circulaires du 19 juin 2001 et de l'année 20077 impose aux caisses primaires :
- de se prononcer au vu du contrôle de son service médical sur l'imputabilité de la maladie à l'activité professionnelle ou de la lésion au fait accidentel,
- de respecter la procédure d'instruction prévue aux articles R 441-11 du code de la sécurité sociale,
- de permettre à l'employeur d'avoir accès au dossier constitué par application de l'article R 441-13, en particulier aux certificats médicaux, pièces administratives, rapport d'enquête et avis médicaux ;
que s'agissant du délai accordé par la Caisse à l'employeur pour aller prendre connaissance des pièces du dossier avant la prise de décision, il est fixé par la CNAM au minimum à 10 jours, ce qui veut dire que pour assurer une sécurité juridique et la garantie des droits des parties, l'employeur doit impérativement disposer de 10 jours ouvrés qui courent à partir de la notification de la lettre ou de sa première présentation pour venir consulter le dossier et faire valoir ses observations ; que ce principe n'est qu'une application des dispositions générales des articles 668 et suivants du code de procédure civile sur la notification des actes qui dispose :
« la date de la notification par voie postale à l'égard de celui à qui elle est faite est la date de la réception de la lettre » ; que les directives ou usages de certaines Caisses Primaires d'Assurance Maladie selon lesquels le délai de dix jours qui d'ailleurs pourrait être plus long, court à compter de la date d'établissement de la lettre ce qui peut avoir pour effet de réduire ce délai à quatre ou cinq jours compte tenu du temps d'acheminement de la lettre et des fins de semaines sont contraires à la loi ; que sur l'opposabilité de la décision de la Caisse primaire en date du 25 octobre 2004, conformément aux dispositions de l'alinéa 3 ) de l' article R 441 -11 du Code de la Sécurité Sociale, la caisse primaire justifie avoir envoyé à l'employeur le 24 juin 2006 le double de la déclaration de la maladie à laquelle était joint un questionnaire concernant les gestes et postures de travail de Madame X... permettant d'apprécier ses conditions d'exposition à un risque professionnel ; que ce questionnaire a été complété par l'employeur et retourné à la caisse ; que conformément à l'alinéa 1 de l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale, la caisse produit aux débats un double de la lettre de clôture en date du 13 octobre 2004 dans laquelle il était indiqué que l'employeur disposait d'un délai de 10 jours à compter de l'établissement du courrier pour consulter le dossier ; que cependant cette lettre ayant été réceptionnée le vendredi 15 octobre 2004 ainsi qu'en fait foi l'avis de réception signé à cette date, l'employeur disposait d'un délai de 10 jours expirant le lundi 25 octobre 2004 pour venir consulter le dossier et transmettre éventuellement ses observations ; que cependant la décision de la Caisse prenant en charge la pathologie dont souffre Madame X... ayant été prise le 25 octobre 2004 avant l'expiration de ce délai l'employeur n'a pas bénéficié en fait d'un délai utile pour prendre connaissance des éléments de l'instruction d'autant que pendant le Week-End des 23 et 24 octobre 2004, il ne pouvait pas se rendre au siège de la caisse pour consulter le dossier ; que pour ces raisons, le jugement sera confirmé ;


ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte de l'article R 441-11 du Code de la sécurité sociale que la Caisse primaire d'assurance maladie, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'une maladie, doit informer l'employeur, non seulement de la procédure d'instruction, de la possibilité de consulter le dossier, de la date à laquelle la caisse prévoit de prendre sa décision, mais également des éléments susceptibles de lui faire grief, afin d'assurer à l'employeur une information contradictoire ; que la caisse estime avoir satisfait à cette obligation en adressant le 13 octobre 2004 un courrier à la société ETS JEAN CHAPIN, l'informant de la fin de l'instruction du dossier, de la possibilité de venir consulter les pièces du dossier, dans un délai de 10 jours à compter de la date d'établissement du dossier ; que la société ETS JEAN CHAPIN considère que cette lettre de clôture de l'instruction est incomplète dans la mesure où elle ne mentionne pas les éléments susceptibles de faire grief à l'employeur et la date à laquelle elle envisage de prendre sa décision ; que les exigences tirées de l'article R 441-11 du Code de la sécurité sociale et le principe de l'information contradictoire requièrent que la Caisse informe l'employeur de la date à laquelle elle entend prendre sa décision ; que cette date doit nécessairement être déterminée ; qu'il ne suffit pas qu'elle puisse être déterminable par référence au délai de consultation du dossier, qui courant par ailleurs à compter de la date d'établissement de la lettre de clôture, n'est pas un délai franc ; que de surcroît qu'il est imposé à la caisse, une information à l'employeur non seulement sur la possibilité offerte de consulter le dossier, mais encore sur les éléments susceptibles de faire grief à l'employeur ; que ces obligations apparaissent distinctes et cumulatives ; qu'il doit être considéré que la caisse n'a pas assuré à l'employeur l'information contradictoire suffisante au regard des obligations tirées de l'article R 441-11 du Code de la sécurité sociale ; que la décision de prise en charge de la caisse de la maladie professionnelle de Madame X... sera déclarée inopposable à la société ETS JEAN CHAPIN ; que la décision la commission de recours amiable du 16 mars 2006 sera annulée ;

1) ALORS QU'un courrier de la Caisse primaire d'assurance maladie qui informe l'employeur de la fin de la procédure d'instruction et de la possibilité de consulter le dossier pendant un certain délai à compter de sa date avise suffisamment l'employeur de la date à partir de laquelle cet organisme envisage de prendre sa décision ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a jugé que la Caisse primaire d'assurance maladie avait avisé l'employeur par lettre recommandée qu'il disposait de dix jours à compter de la date d'établissement de la lettre, le 13 octobre 2004, pour consulter le dossier ; qu'il en résultait que l'employeur était avisé que l'organisme social envisageait de prendre sa décision à compter du 23 octobre 2004 ; qu'en déclarant la décision de prise en charge de l'accident du travail du salarié inopposable à l'employeur, prétexte pris que la Caisse n'aurait pas indiqué à quelle date elle entendait statuer, la Cour d'appel a violé l'article R 441-11 du Code de la sécurité sociale ;

2) ALORS QU'une circulaire constitue un document interne à l'organisme concerné, dépourvu de toute valeur normative ; qu'en déclarant la décision de prise en charge de l'accident du travail du salarié inopposable à l'employeur, au prétexte que la CNAM, dans les circulaires du 19 juin 2001 et de l'année 2007, avait fixé au minimum à dix jours le délai accordé par la Caisse primaire d'assurance maladie à l'employeur pour aller prendre connaissance du dossier avant la prise de décision, pour en déduire que l'employeur devait impérativement disposer de dix jours ouvrés pour venir consulter le dossier et faire valoir ses observations et que l'organisme social ne pouvait prendre sa décision qu'à l'issue de cette période, ce qui n'avait pas été le cas en l'espèce, la Cour, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne pose pas, a violé ces circulaires par fausse application, et l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale, par refus d'application ;

3) ALORS en toute hypothèse QUE les circulaires de la CNAM n° 18/2001 du 19 juin 2001 et de l'année 2007 se bornent à indiquer, au sujet de la consultation du dossier par l'employeur, qu'il convient de s'efforcer d'intégrer celle-ci dans des délais relativement brefs et conseille de laisser un délai de dix jours aux « parties » pour ce faire, sans se prononcer sur la question de savoir si ce délai court de la date d'expédition du courrier par la Caisse primaire d'assurance maladie ou de sa réception par l'employeur, ni sur le point de savoir si seuls les jours ouvrés doivent être intégrés dans ce calcul ; qu'en déclarant la décision de prise en charge de l'accident du travail du salarié inopposable à l'employeur, au prétexte qu'il résultait de ces circulaires que l'employeur devait impérativement disposer d'un délai de dix jours ouvrés à compter de la notification de la lettre avisant l'employeur de la possibilité de venir consulter le dossier dans les locaux de l'organisme social ou de sa première présentation et que l'organisme social ne pouvait prendre sa décision qu'à l'issue de cette période, la Cour d'appel a violé ces circulaires par fausse interprétation, et l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale, par refus d'application ;

4) ALORS en tout état de cause QUE le caractère contradictoire de la procédure est suffisamment assuré dès lors que l'employeur a bénéficié d'un délai de dix jours à compter de l'expédition de la lettre l'ayant avisé de la possibilité de venir consulter le dossier dans les locaux de l'organisme social, et qu'après avoir reçu ce courrier en temps utile, il n'a élevé aucune contestation dans le délai sur une éventuelle insuffisance de celui-ci ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que par lettre recommandée de la Caisse primaire d'assurance maladie datée du 13 octobre 2004, l'employeur a été avisé qu'il disposait d'un délai de dix jours pour consulter le dossier et qu'il a accusé réception de ce courrier le 15 octobre 2004 ; que la Cour d'appel a encore relevé que l'employeur avait disposé d'au moins sept jours utiles pour consulter le dossier ; qu'en affirmant cependant que ce délai était insuffisant pour garantir le respect du principe d'un débat contradictoire, pour en déduire que la décision de prise en charge de l'accident du travail du salarié était inopposable à l'employeur, sans rechercher si, dans le délai imparti, l'employeur avait élevé une contestation sur une éventuelle insuffisance de ce délai pour consulter le dossier, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale ;


5) ALORS QUE satisfait au principe du contradictoire la Caisse primaire d'assurance maladie qui informe l'employeur de la fin de la procédure d'instruction et de la possibilité de consulter le dossier mis à sa disposition dans un délai imparti, sans que l'organisme social ait spécialement à l'informer des éléments susceptibles de lui faire grief ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que par courrier du 13 octobre 2004, la Caisse avait informé l'employeur de la clôture de l'instruction en lui indiquant qu'il disposait d'un délai de 10 jours pour consulter les pièces du dossier ; qu'en considérant que la Caisse n'avait pas respecté son obligation d'information du seul fait qu'elle n'avait pas informé l'employeur sur les éléments susceptibles de lui faire grief, la Cour d'appel a violé les articles R 411-11 et R 411-13 du Code de la Sécurité Sociale.



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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.