par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 20 janvier 2010, 08-13200
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
20 janvier 2010, 08-13.200

Cette décision est visée dans la définition :
Concubinage




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1832 du code civil ;

Attendu que l'existence d'une société créée de fait entre concubins, qui exige la réunion des éléments caractérisant tout contrat de société, nécessite l'existence d'apports, l'intention de collaborer sur un pied d'égalité à la réalisation d'un projet commun et l'intention de participer aux bénéfices ou aux économies ainsi qu'aux pertes éventuelles pouvant en résulter ; que ces éléments cumulatifs doivent être établis séparément et ne peuvent se déduire les uns des autres ;

Attendu que M. X... et Mme Y... ont vécu en concubinage et ont eu ensemble un enfant né en 1977 ; que le 13 novembre 1990, M. X... a acquis un terrain situé à Schoelcher ; qu'ils ont, en qualité de co-emprunteurs, souscrit un emprunt pour financer la construction d'un pavillon sur ce terrain ; que M X... a vendu ce bien en 1999 ; que le 12 octobre 1999, Mme Y..., invoquant l'existence d'une société créée de fait, a assigné M. X... en paiement de la moitié du produit de la vente du pavillon ;

Attendu que pour dire qu'il a existé une société de fait entre M. X... et Mme Y... et que celle-ci devait supporter la moitié des charges et recevoir la moitié des produits de la vente de la maison, l'arrêt retient que la construction a été financée par un emprunt de 756 000 francs souscrit par les concubins en qualité de co-emprunteurs, remboursé à concurrence de 4 379, 64 francs par mois par Mme Y... et 4 500 francs par mois par M. X... ; que ceux-ci, en prenant la décision d'effectuer un emprunt pour financer un projet commun de construction d'une maison ont témoigné d'une affectio societatis, leur but étant de partager une vie de famille stable puisqu'ils avaient un enfant commun ; qu'il n'est pas contesté que Mme Y... a assuré l'entretien et les charges de l'immeuble ainsi que les impôts et taxes et que ces éléments établissent la volonté des concubins de participer aux bénéfices et avantages tirés de la jouissance du bien et aux pertes ;

Qu'en se déterminant ainsi alors que l'intention de s'associer en vue d'une entreprise commune ne peut se déduire de la participation financière à la réalisation d'un projet immobilier et est distincte de la mise en commun d'intérêts inhérents au concubinage, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu entre les parties le 16 août 2007 et rectifié le 25 janvier 2008, par la cour d'appel de Fort de France ; remet en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille dix.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué du 16 août 2007 d'AVOIR dit qu'il avait existé une société de fait entre Monsieur X... et Madame Y... et d'avoir dit que cette dernière devait supporter la moitié des charges et recevoir la moitié des produits de la vente de la maison située à TERREVILLE SCHOELCHER construite sur la parcelle cadastrée section A 103 ;

AUX MOTIFS QUE « le couple Y...-X..., en prenant la décision d'effectuer un emprunt pour financer un projet commun de construction d'une maison, ont témoigné d'un affectio societatis, leur but étant de partager une vie de famille stable puisqu'ayant un enfant commun reconnu ; que la volonté de collaborer à un objet social est évidente ; (..) que le fait d'être co-emprunteurs engage les concubins vis-àvis de la banque et les oblige au remboursement solidaire du prêt obtenu ; que le fait de ne pas rembourser le prêt entraîne un endettement différent de la notion de perte pour la société ; qu'il n'est pas établi dans le cas d'espèce que Madame Y... ait eu la jouissance exclusive de la maison construite, son concubinage avec Monsieur X... supposant une cohabitation, même si celle-ci n'a pas été régulière ; qu'il n'est pas contesté que Madame Y... a assuré l'entretien et les charges de l'immeuble et autres impôts et taxes qui se font à perte pour les membres de la société de fait » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE l'existence d'une société créée de fait entre concubins, qui exige la réunion des éléments caractérisant tout contrat de société, nécessite l'existence d'apports, l'intention de s'associer et l'intention de participer aux bénéfices et aux pertes ; que ces éléments cumulatifs doivent être établis séparément et ne peuvent se déduire les uns des autres ; que l'intention de s'associer ne peut résulter de la participation financière des concubins à la réalisation d'un projet immobilier ; qu'en déduisant néanmoins l'affectio societatis du couple Y...-X... de leur décision d'effectuer un emprunt pour financer le projet commun de construction d'une maison, la cour d'appel a violé l'article 1832 du code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'existence d'une société créée de fait entre concubins, qui exige la réunion des éléments caractérisant tout contrat de société, nécessite l'existence d'apports, l'intention de s'associer et l'intention de participer aux bénéfices et aux pertes ; que ces éléments cumulatifs doivent être établis séparément et ne peuvent se déduire les uns des autres ; que la volonté de partager les bénéfices et, en cas de déficit, de contribuer aux pertes ne peut être présumée et résulter de la participation aux dépenses de la vie commune ; qu'en se fondant sur la participation de la concubine aux dépenses liées au logement commun pour dire que Madame Y... avait manifesté une volonté de participer aux bénéfices et aux pertes, la cour d'appel a, une nouvelle fois, violé l'article 1832 du code civil ;

ALORS, ENFIN ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE, le silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas, à lui seul, reconnaissance de ce fait ; qu'en déduisant néanmoins de l'absence de contestation émise par Monsieur X... la preuve que Madame Y... était animée d'une volonté de participer aux pertes, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Concubinage


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.