par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. com., 28 juin 2017, 15-27605
Dictionnaire Juridique
site réalisé avec Baumann Avocats Droit informatique |
Cour de cassation, chambre commerciale
28 juin 2017, 15-27.605
Cette décision est visée dans la définition :
Venir aux droits de..
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte au Fonds commun de titrisation Hugo créances IV de ce qu'il reprend l'instance au lieu et place de la société Banque Chaix ;
Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :
Vu les articles L. 621-43 et L. 621-46 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005, ensemble les articles L. 123-9, alinéa 1er, L. 236-3, I et L. 237-2, alinéa 3, de ce code ;
Attendu que la date de naissance de la créance de remboursement d'un prêt, qui est celle de la conclusion du contrat, n'est pas affectée par l'intervention ultérieure d'une opération de fusion-absorption qui opère transmission universelle du patrimoine de la société absorbée, débitrice du prêt, à la société absorbante ; que la publication du traité de fusion-absorption et celle de la radiation de la société absorbée au registre du commerce et des sociétés, dont l'effet est de rendre ces opérations opposables aux tiers, sont sans conséquence sur l'origine de la créance détenue par le prêteur ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'entre 1999 et 2001, la société Banque Chaix (la banque), aux droits de laquelle vient le Fonds commun de titrisation Hugo créances IV, a consenti à la société Sud implant chirurgie (la société SIC) plusieurs prêts cautionnés par son dirigeant, M. X..., l'un d'eux étant en outre garanti par le nantissement de deux contrats d'assurance-vie souscrits par Mme Y..., épouse X..., auprès de la société d'assurances Erisa, devenue la société HSBC France assurance-vie ; que par un traité de fusion-absorption du 30 décembre 2002, publié au registre du commerce et des sociétés le 7 mars 2003, la société Proconcept a absorbé la société SIC, dont la radiation a été publiée dans ce registre le 9 avril suivant ; que le 26 février 2003, la société Proconcept avait été mise en redressement judiciaire avant de bénéficier d'un plan de redressement par voie de continuation le 8 décembre 2004 ; que le 4 mai 2004, la banque a assigné la société SIC et M. X..., en sa qualité de caution, en paiement des sommes restant dues au titre des prêts avant d'appeler, le 20 décembre 2005, la société Proconcept à intervenir à l'instance, en raison de sa fusion avec la société SIC ; qu'un jugement du 18 janvier 2006 a prononcé la résolution du plan de redressement de la société Proconcept et ouvert sa liquidation judiciaire ;
Attendu que pour condamner M. X..., en sa qualité de caution, à payer à la banque les sommes représentant en principal et intérêts les soldes des prêts consentis entre le 31 août 1999 et le 30 mars 2001, l'arrêt retient que la créance de remboursement, détenue par le prêteur sur la société absorbante, a son origine dans le traité de fusion-absorption, qui a opéré le transfert universel à cette dernière du patrimoine de la société absorbée, de sorte que l'obligation du prêteur de déclarer sa créance au passif de la société absorbante n'existe que si ce traité de fusion-absorption lui est opposable au jour du jugement d'ouverture du redressement judiciaire de cette société ; qu'ayant relevé que la dissolution de la société SIC par l'effet du traité de fusion-absorption a été publiée au registre du commerce et des sociétés le 9 avril 2003, postérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire de la société Proconcept, et qu'il n'est ni démontré, ni soutenu, que la banque aurait eu connaissance de cette dissolution avant l'ouverture de la procédure collective, l'arrêt en déduit que les créances de la banque, qui n'avaient pas à être déclarées au redressement judiciaire de la société absorbante, ne sont pas éteintes ;
Qu'en statuant ainsi, alors, d'abord, que les créances de la banque sur la société absorbée SIC sont nées aux dates de signatures des prêts entre le 31 août 1999 et le 30 mars 2001 et que, la fusion-absorption ayant été décidée le 30 décembre 2002, la dette de la société absorbée est entrée, sans modification de sa date de naissance, dès cette date, dans le patrimoine de la société absorbante Proconcept et, ensuite, que l'opération de fusion-absorption et la radiation de la société SIC ont été rendues opposables à la banque créancière par les publications intervenues au registre du commerce et des sociétés les 7 mars et 9 avril 2003, l'arrêt constatant de surcroît que la banque a été invitée à déclarer ses créances au passif du redressement judiciaire de la société Proconcept, par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du mandataire judiciaire du 10 mars 2003, ce dont il résulte qu'il lui incombait de déclarer ses créances au redressement judiciaire de la société absorbante Proconcept, sous peine de leur extinction dont la caution pouvait se prévaloir, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement dans ses dispositions déclarant la créance éteinte faute de déclaration et déchargeant la caution, en ce qu'il fixe les créances de la SA Banque Chaix au passif de la liquidation judiciaire de la société Proconcept et condamne M. X... à payer à la SA Banque Chaix les sommes de 5 085, 33 euros, avec intérêts au taux de 7, 50 % à compter du 1er septembre 2003, au titre du prêt n° 6307109 du 31 août 1999, 3 186, 88 euros, avec intérêts au taux de l'Euribor à un mois majoré de 5, 35 % à compter du 1er septembre 2003, au titre du prêt n° 6307120 du 1er septembre 1999, 9 893, 21 euros, avec intérêts au taux de 9, 9436 % à compter du 1er septembre 2003, au titre du prêt n° 6315498 01 du 28 septembre 2000, 379 018, 55 euros, avec intérêts au taux de 9, 50 % à compter du 1er septembre 2003, au titre du prêt n° 6319170 01 du 14 mars 2001 et 13 853, 29 euros, avec intérêts au taux de 10, 07799 % à compter du 1er septembre 2003, au titre du prêt n° 6319775 01 du 30 mars 2001, l'arrêt rendu le 19 novembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Met hors de cause, sur sa demande, la société HSBC France assurances vie dont la présence devant la cour de renvoi n'est plus nécessaire à la solution du litige ;
Condamne le Fonds commun de titrisation Hugo créances IV aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Delamarre, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X... et la société Proconcept.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur X... à payer à la SA Banque Chaix les sommes de 5. 085, 33 euros, avec intérêts au taux de 7, 50 % à compter du 1er septembre 2003 au titre du prêt n° 6307109 du 31 août 1999, de 3. 186, 88 euros, avec intérêts au taux de l'Euribor à 1 mois majoré de 5, 35 % à compter du 1er septembre 2003 au titre du prêt n° 6307120 du 1er septembre 1999, de 9. 893, 21 euros, avec intérêts au taux de 9, 9436 % à compter du 1er septembre 2003 au titre du prêt n° 6315498 01 du 28 septembre 2000, de 379. 018, 55 euros, avec intérêts au taux de 9, 50 % à compter du 1er septembre 2003 au titre du prêt n° 6319170 01 du 14 mars 2001, de 13. 853, 29 euros, avec intérêts au taux de 10, 07799 % à compter du 1er septembre 2003 au titre du prêt n° 6319775 01 du 30 mars 2001 ;
AUX MOTIFS QU'
« Une créance de remboursement d'un prêt, détenue sur une société absorbée à la suite d'un traité de fusion, a son origine à la date à laquelle cette société absorbée a accepté ledit prêt et naît à celle à laquelle les sommes sont remises par le prêteur ; que la créance de remboursement, détenue par ce même prêteur sur la société absorbante, a son origine dans le traité de fusion absorption, qui a opéré le transfert universel à cette dernière du patrimoine de la société absorbée, de sorte que l'obligation du prêteur de déclarer sa créance au passif de la société absorbante n'existe, que si ce traité de fusion-absorption lui est opposable au jour du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ; que par l'application des dispositions combinées des articles L. 123-9 3ème alinéa, L. 236-3 et L. 236-7 du code de commerce, le transfert universel du patrimoine de la société absorbée, qui est la conséquence de la dissolution sans liquidation de cette dernière, ne produit ses effets à l'égard des cocontractants de la société absorbée, qu'à partir de la date à laquelle cette dissolution a été publiée au registre du commerce et des sociétés, ou de celle à laquelle le tiers cocontractant a eu une connaissance personnelle de la dissolution antérieurement à cette publication ; qu'en l'espèce, la dissolution de la SARL « Sud Implant Chirurgie » par l'effet du traité de fusion absorption a été publiée au registre du commerce et des sociétés de Carpentras le 9 avril 2003, soit postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la SA « Proconcept », de sorte que n'étant pas démontré, ni soutenu, que la SA « Banque Chaix » aurait eu une connaissance personnelle de cette dissolution avant l'ouverture de cette procédure collective, elle n'était pas soumise à l'obligation précitée de déclarer sa créance au passif de cette société ; qu'il s'ensuit que les dispositions de l'ancien article L. 621-46 du code de commerce ne lui étant pas applicables, la créance de remboursement de la SA « Banque Chaix » sur la SA « Proconcept », qui n'était pas soumise à la procédure de vérification des créances, n'a pas été éteinte dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de cette dernière le 21 février 2003 ; qu'ayant été, par arrêt confirmatif du 28 mai 2014 relevée de la forclusion encourue dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire ouverte le 18 janvier 2006 à l'égard de cette même société, la SA « Banque Chaix », qui a déclaré ses créances au passif de la SA « Proconcept » par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 décembre 2006, est recevable en sa reprise d'instance aux fins de fixation de sa créance au passif de la SA « Proconcept » ; que la SA « Banque Chaix » justifie des écritures passées au compte courant n° 004815 8950S jusqu'à la date de sa clôture, soit la somme principale de 75. 079, 13 euros ; que cependant la convention des parties ne stipulant aucun intérêt conventionner applicable après la clôture du compte, la créance d'intérêts afférente à ce principal sera calculée au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 février 2004 jusqu'au 18 janvier 2006 ; que par ailleurs la s. a. « Banque Chaix » justifie, d'une part, des différents actes de prêt, qui ne subissent pas l'arrêt du cours des intérêts, pour avoir tous été souscrits pour une durée supérieure à un an, ainsi que, d'autre part, des stipulations des intérêts rémunérant ces prêts ou sanctionnant le retard apporté à leur remboursement, et enfin, des tableaux d'amortissement afférents à chacun de ces prêts ; qu'ainsi, les défendeurs ne discutant pas les montants réclamés et n'offrant pas de justifier de leur règlement, il sera fait droit à la demande de fixation de ces différentes créances, chacune à titre chirographaire, dès lors que les nantissements garantissant le prêt n° 6319170 01 du 14 mars 2001 n'ont pas été pris sur des éléments de patrimoine de la société en liquidation judiciaire ; qu'en l'état des dernières écritures de Michèle Y... épouse X..., il n'est plus sollicité la mainlevée des nantissements inscrits sur les contrats d'assurances-vie qu'elle avait souscrits auprès de la SA d'assurances « ERISA », devenue la SA « HSBC Assurances-vie », mais seulement que la décision de la Cour soit déclarée opposable à cette dernière ; Attendu que dans la mesure où la transmission universelle du patrimoine de la SA « Sud Implant Chirurgie » consécutif à sa dissolution n'a pas d'incidence sur le sort des gages consentis à la SA « Banque Chaix » par Michèle Y... épouse X..., il n'y a en tout état de cause pas lieu à mainlevée de ceux-ci ; que Jean-Luc X..., en l'état de ses dernières écritures ne reprend pas les moyens qu'il avait développés avant le prononcé de l'arrêt n° 542 du 11 décembre 2008 et auxquels la SA « Banque Chaix » continue de répondre de manière superfétatoire dans les dernières conclusions ; qu'il sera seulement rappelé que la créance de la SA « Banque Chaix » n'étant pas éteinte pour les motifs développés supra, la caution qui garantissait le remboursement des prêts consentis à la SA « Sud Implant Chirurgie », n'est pas davantage affectée par l'opération de fusion absorption, dès lors que c'est la remise des fonds à la société absorbée, qui détermine le champ du cautionnement, la société absorbante n'ayant souscrit aucune nouvelle dette envers la SA « Banque Chaix » depuis le traité de fusion ; qu'il sera donc fait droit à la demande de la SA « Banque Chaix » en ce qu'elle est dirigée contre Jean-Luc X..., et qu'elle s'inscrit dans les limites des engagements de caution souscrits par ce dernier ; que les époux X... et la SA « Proconcept », qui succombent, supporteront les dépens de l'instance, qui seront pris en ce qui concerne cette dernière comme frais de procédure collective ; que par ailleurs, compte tenu de la situation économique des parties condamnées aux dépens, Jean-Luc X... payera, en équité et par application de l'article 700 du code de procédure civile, une somme de 7. 500 euros à la SA Banque Chaix et une autre de 1. 500 euros à la SA HSBC Assurances-vie » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'
A partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au représentant des créanciers ; que les créanciers titulaires d'une sûreté ayant fait l'objet d'une publication ou d'un contrat de crédit-bail publié sont avertis personnellement et, s'il y a lieu, à domicile élu ; que, dans la présente espèce, les cautionnements ont été acceptés par Monsieur X... antérieurement à la fusion absorption de la SA Sud Implant Chirurgie par la SA Proconcept, sans être néanmoins publiés ; que, dès lors, les créances de la SA Banque Chaix devaient nécessairement être déclarés au passif de la SA Proconcept ; qu'en déclarant pourtant que la SA Banque Chaix n'était pas soumise à l'obligation de déclarer ses créances auprès du représentant des créanciers, la Cour d'appel a violé l'article L. 621-43 du Code de commerce dans sa version alors applicable ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'
A défaut de déclaration, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ; que, dès lors, en s'abstenant de rechercher si le juge-commissaire avait relevé la créance de la SA Banque Chaix de sa forclusion, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-46 du Code de commerce dans sa version alors applicable ;
ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE
Le débiteur continue à exercer sur son patrimoine les actes de disposition et d'administration, ainsi que les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission de l'administrateur ; que les actes de gestion courante qu'accomplit seul le débiteur sont réputés valables à l'égard des tiers de bonne foi ; que, cependant, au cours de la procédure de redressement judiciaire, le juge-commissaire est seul compétent pour autoriser le débiteur à réaliser un acte de disposition étranger à la gestion courante de l'entreprise, à consentir une hypothèque, un gage ou un nantissement ou à compromettre ou transiger ; que, dans la présente espèce, la créance de la Banque Chaix n'existe que par le truchement d'une fusion absorption entamée avant le jugement d'ouverture, et achevée postérieurement à la procédure de redressement judiciaire ; que dès lors, pour être opposable au redressement judiciaire, la fusion absorption, qui n'est pas un acte de gestion courante, appelait l'autorisation du juge commissaire ; qu'en jugeant néanmoins que la fusion absorption n'était pas opposable au redressement judiciaire et que la Banque Chaix n'avait donc pas à déclarer sa créance, la Cour d'appel a violé les articles 148-2, 158 et 159 du Code de commerce dans sa version alors en vigueur.
site réalisé avec Baumann Avocat Droit des affaires |
Cette décision est visée dans la définition :
Venir aux droits de..
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.