par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 20 janvier 2015, 13-28521
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Cour de cassation, chambre commerciale
20 janvier 2015, 13-28.521

Cette décision est visée dans la définition :
Droit de la Consommation




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense en ce qu'il est formé par le directeur général des douanes et droits indirects :

Attendu que le défendeur soulève l'irrecevabilité de ce pourvoi au motif que le directeur régional des douanes et droits indirects de Perpignan était seul partie aux instances devant les juges du fond ;

Mais attendu que celui-ci agissait au nom de la direction générale des douanes et droits indirects, laquelle assure, sous l'autorité de son directeur général, la représentation de l'Etat devant les juridictions nationales ;

D'où il suit que le pourvoi de ce dernier, aux côtés du directeur régional des douanes et droits indirects de Perpignan, est recevable ;

Et sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Vu les articles L. 241, alinéa 1, du livre des procédures fiscales, L. 121-36, alinéa 1, du code de la consommation et 1er de la loi du 21 mai 1836 alors en vigueur ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les pièces produites, que des agents de l'administration des douanes et droits indirects (l'administration) ont saisi, dans des bars, des machines automatiques de jeux appartenant à M. X... et fonctionnant à l'aide de monnayeurs ; que ces agents ont estimé que ces appareils étaient exploités dans le cadre de maisons de jeux, après avoir découvert que, courant 2005 et jusqu'au 16 avril 2006, M. X... y avait proposé des jeux concours organisés par une association ; qu'après classement sans suite, par le procureur de la République, des procès-verbaux d'infractions qui lui avaient été transmis et restitution des appareils, M. X... a saisi le tribunal de grande instance afin que l'administration soit condamnée à lui verser des dommages-intérêts pour saisie mal fondée ;

Attendu que, pour accueillir la demande de M. X..., l'arrêt, après avoir constaté que l'information concernant l'existence des championnats organisés par l'association a été faite par voie d'affiches annonçant les gains mis en jeu et que l'accès au championnat et au jeu proposé se faisait sans obligation d'achat, au moyen de trois parties gratuites, retient qu'il importe peu qu'après l'épuisement de ces dernières, les participants aient eu la possibilité de continuer le championnat moyennant une participation financière dès lors que l'accès au jeu était gratuit pour tous ; qu'il en déduit que l'infraction à la loi du 21 mai 1836 n'est pas caractérisée ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les opérations publicitaires réalisées par voie d'écrit qui tendent à faire naître l'espérance d'un gain, acquis par voie de tirage au sort, ne peuvent être pratiquées que si elles n'imposent aux participants aucune contrepartie financière ni dépense sous quelque forme que ce soit, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer au directeur général des douanes et droits indirects ainsi qu'au directeur régional des douanes et droits indirects de Perpignan la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour le directeur général des douanes et droits indirects et autre

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a retenu en son principe la faute de l'administration, constaté un droit à réparation et condamné l'administration (la Direction générale des douanes et droits indirects) à payer à M. X... une indemnité de 21.000 € ;

AUX MOTIFS QU' « il résulte des dispositions des articles 1 et 2 de la loi du 21 mai 1836, en vigueur au moment des saisies critiquées, que les loteries de toutes espèces sont prohibées et que sont réputées loteries et interdites comme telles "les ventes d'immeubles, de meubles ou de marchandises effectuées par la voie du sort, ou auxquelles auraient été réunies des primes ou autres bénéfices dus, même partiellement au hasard et généralement toutes opérations offertes au public, sous quelque dénomination que ce soit, pour faire naître l'espérance d'un gain qui serait acquis par la voie du sort » ; que les personnes qui, malgré cette interdiction, se livrent à de telles loteries prohibées sont passibles de poursuites pénales et fiscales ; que toutefois, l'article L.121-36 du code de la consommation autorise les loteries commerciales ou publicitaires réalisées par voie d'écrit qui tendent à faire naître l'espérance d'un gain attribué à chacun des participants, quelles que soient les modalités de tirage au sort, si elles n'imposent aux participants aucune contrepartie financière, ni dépense sous quelque forme que ce soit ; qu'en l'espèce, l'information de l'existence des championnats organisés par la FFTT s'est faite par voie d'affiches, apposées au-dessus des appareils automatiques et annonçant les gains mis en jeu (parties gratuites ou chèques cadeaux jusqu'à 400 e) ; que la réglementation du championnat pour 2005 précise bien qu'il s'agit "d'un championnat gratuit sans obligation d'achat" auquel les participants s'inscrivent par le seul accès au terminal tactile ; que dans les 24 h à 72 h qui suivent l'inscription, le règlement stipule que les inscrits sont crédités de trois parties gratuites par semaine, soit 12 parties pour la durée du championnat ; que l'accès à ce championnat, et au jeu proposé, se fait donc sans obligation d'achat, au moyen de ces trois parties gratuites ainsi qu'en attestent les témoins Y... Eric, Z... René et A... Eric ; que les constatations contraires faites par les services des douanes et reportées dans leur procès-verbal du 23 mai 2006 ne sont pas de nature à contredire utilement les termes du règlement de la FFTT ni les trois témoignages précités dès lors que le 23 mai 2006, le championnat était terminé depuis le 16 avril, et que les clients devaient par conséquent à nouveau obligatoirement insérer une pièce dans le monnayeur pour accéder aux jeux ; qu'ainsi que l'a expliqué Gilles X... aux inspecteurs de douanes le 23 mai 2006, l'objectif commercial poursuivi à travers ce championnat était de vendre les jeux, une fois passé le cap des trois parties gratuites ; qu'il s'agissait donc de loteries commerciales autorisées par le code de la consommation, avec un accès gratuit pour tous, dans le but de promouvoir la vente des jeux proposés par les propriétaires de ces appareils automatiques ; qu'il importe peu que, après l'épuisement des trois parties gratuites, les participants aient eu la possibilité de continuer le championnat moyennant une participation financière dès lors que l'accès au jeu était gratuit pour tous et qu'il n'est pas allégué ni démontré par les douanes que les chances de gagner aient été inégales entre les participants à titre gratuit et les participants à titre onéreux ; que l'infraction à la législation du 21 mai 1836 n'est pas caractérisée ainsi que l'a indiqué le parquet dans son avis de classement sans suite et ce, sans qu'il soit besoin d'examiner les questions relatives à la nature (hasard ou non) des jeux proposés ; qu'il s'en évince que la saisie des cinq appareils automatiques doit être déclarée mal fondée» ;

ALORS QUE, premièrement, l'activité de jeux est caractérisée dès lors qu'il y a espoir de gains moyennant une mise d'argent ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté que « les participants avaient la possibilité de continuer le championnat moyennant une participation financière » et encore qu'à côté des participants à titre gratuit, il existait des « participants à titre onéreux » (p.5, alinéa 4) ; qu'ayant ainsi mis en évidence l'existence d'une activité de jeux, les juges du fond ne pouvaient retenir que la saisie était infondée et ont violé par conséquent les articles L.241 du Livre des procédures fiscales, L.121-36 du Code de la consommations ainsi que les articles 1559, 1565, 1699 et 1791 du Code général des impôts, 124, 126, 146, 149, et 154 de l'annexe IV de ce code, des articles L 322-1, L 322-4 du Code de la sécurité intérieure, anciennement article 1er et et article 6 de la loi du 21 mai 1836 ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, il importait peu que des parties gratuites aient été distribuées, si par ailleurs pour ceux des joueurs ne bénéficiant pas de parties gratuites la participation était à titre onéreux ; qu'en se fondant sur un motif inopérant, les juges du fond ont violé les articles L.241 du Livre des procédures fiscales, L.121-36 du Code de la consommations ainsi que les articles 1559, 1565, 1699 et 1791 du Code général des impôts, 124, 126, 146, 149, et 154 de l'annexe IV de ce code, des articles L 322-1, L 322-4 du Code de la sécurité intérieure, anciennement article 1er et et article 6 de la loi du 21 mai 1836 .



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Cette décision est visée dans la définition :
Droit de la Consommation


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 29/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.