par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 8 juillet 2009, 08-20153
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
8 juillet 2009, 08-20.153
Cette décision est visée dans la définition :
Filiation
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches, et le deuxième moyen :
Attendu que C ..., est né le 12 décembre 2005 à Paris, sa mère ayant demandé le secret de son identité ; que l'enfant a été remis le 14 décembre 2005 au service de l'aide sociale à l'enfance en vue de l'adoption ; qu'immatriculé définitivement comme pupille de l'Etat le 15 février 2006, il a été placé en vue de son adoption, le 3 mai 2006, chez les époux Z ..., ; que ceux ci ayant formé une requête en adoption plénière de l'enfant, les époux X ..., soutenant être ses grands parents maternels, ont déclaré intervenir volontairement à l'instance, s'opposant à l'adoption et disant vouloir assumer la charge de l'enfant ; qu'ils ont fait appel du jugement du 6 juin 2007 ayant déclaré leur intervention irrecevable et ayant prononcé l'adoption plénière de C ..., par les époux Z ..., et dit qu'il porterait désormais les prénoms et nom de C ... Z ..., ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 10 avril 2008 rectifié par Paris, 15 mai 2008) d'abord d'avoir déclaré l'intervention volontaire des époux X ..., irrecevable puis d'avoir prononcé l'adoption plénière, alors, selon les moyens :
1°/ que l'intervention volontaire est recevable lorsqu'elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant, et que l'intervenant élève une prétention à son profit ; que la demande des grands parents biologiques, qui prétendent à la reconnaissance de leurs droits à l'égard de leur petit fils, se rattache par un lien suffisant à la requête sollicitant l'adoption plénière de cet enfant, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 325 et 329 du code de procédure civile ;
2°/ que la loi n° 2009-61 du 16 janvier 2009, ratifiant l'ordonnance du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation, a supprimé l'interdiction d'exercer une action en recherche de maternité à l'encontre de celle qui a accouché dans l'anonymat ; que, dès lors, l'action en recherche de maternité est ouverte à C ..., ; que le prononcé de l'adoption plénière qui ferait obstacle à ce droit de voir établir sa filiation maternelle, et, en conséquence, son lien de parenté avec ses grands parents, est contraire à son intérêt, de sorte que la cour d'appel a violé l'article 353 du code civil ;
3°/ que la possession d'état s'établit par des faits qui révèlent le lien de parenté entre l'enfant et la famille à laquelle il appartient ; que, la reconnaissance de ce lien par l'autorité publique est suffisant dès lors que d'autres éléments constitutifs ont été rendus impossibles par des circonstances exceptionnelles ; que la cour d'appel, qui n'a pas recherché si ce lien était suffisant à rattacher la demande des grands-parents biologiques à la requête en adoption plénière de l'enfant, a privé sa décision de base légale au regard des articles 311 1 du code civil et 325 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'intervention des époux X ..., qui, en s'opposant à l'adoption plénière et en prétendant assurer la charge de l'enfant ou, au moins, créer des liens avec lui, forment des demandes propres, est une intervention principale ; qu'elle suppose la réunion d'un intérêt et d'une qualité pour agir ; que l'arrêt retient, d'abord, par motifs propres et adoptés, que, pour leur conférer qualité pour agir, doivent être établis le lien de filiation qui les unit à D ... X..., et celui allégué entre celle ci et C ..., ; puis, que le nom de la mère ne figure pas dans l'acte de naissance de l'enfant et que celle ci a, au contraire, souhaité que son identité ne soit pas connue, aucune reconnaissance ou possession d'état n'ayant en conséquence existé ; encore, que l'action n'est pas une contestation, prescrite, de l'immatriculation de l'enfant comme pupille de l'Etat , le 15 février 2006 ou de son placement, le 3 mai 2006, en vue de l'adoption ; que la cour d'appel a exactement déduit de ces éléments, sans que la modification, par la loi n° 2009-61 du 16 janvier 2009, de l'article 326 du code civil soit susceptible de modifier cette situation, qu'en l'absence de filiation établie entre leur fille et C ..., les époux X ..., n'avaient pas qualité pour intervenir à l'instance en adoption ;
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur les troisième et quatrième moyens, pris en toutes leurs branches :
Attendu que le rejet des premier et deuxième moyens rend ces griefs sans objet ; que les moyens doivent être rejetés ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux X ..., aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour les époux X ...,
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable l'intervention volontaire des époux X ..., à l'instance en adoption plénière de l'enfant C ..., introduite par les époux Z ..., ;
AUX MOTIFS QUE c'est par des motifs exacts et pertinents que la Cour adopte que les premiers juges ont retenu que l'intervention volontaire des époux X ..., était irrecevable au regard des dispositions des articles 66 et 31 du Code de procédure civile dès lors que le lien de filiation unissant prétendument l'enfant à feu D ... X ..., n'était pas établi, de même par conséquent que le lien allégué entre l'enfant et eux, et ne pouvait pas l'être dès lors que la mère avait souhaité que soit préservé le secret de son identité comme l'article 326 du Code civil l'y autorisait ;
ALORS D'UNE PART QUE l'intervention volontaire est recevable lorsqu'elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant, et que l'intervenant élève une prétention à son profit ; que la demande des grands-parents biologiques, qui prétendent à la reconnaissance de leurs droits à l'égard de leur petit-fils, se rattache par un lien suffisant à la requête sollicitant l'adoption plénière de cet enfant, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles 325 et 329 du Code de procédure civile ;
ALORS D'AUTRE PART QUE la loi n° 2009-61 du 16 janvier 2009, ratifiant l'ordonnance du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation, a supprimé l'interdiction d'exercer une action en recherche de maternité à l'encontre de celle qui a accouché dans l'anonymat ; que, dès lors, l'action en recherche de maternité est ouverte à C ..., ; que le prononcé de l'adoption plénière qui ferait obstacle à ce droit de voir établir sa filiation maternelle, et, en conséquence, son lien de parenté avec ses grands-parents, est contraire à son intérêt, de sorte que la Cour d'appel a violé l'article 353 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable l'intervention volontaire des époux X ..., à l'instance en adoption plénière de l'enfant C ..., introduite par les époux Z ..., ;
AUX MOTIFS QUE c'est par des motifs exacts et pertinents que la Cour adopte que les premiers juges ont retenu que l'intervention volontaire des époux X ..., était irrecevable au regard des dispositions des articles 66 et 31 du Code de procédure civile dès lors que le lien de filiation unissant prétendument l'enfant à feu D ... X ..., n'était pas établi, de même par conséquent que le lien allégué entre l'enfant et eux, et ne pouvait pas l'être dès lors que la mère avait souhaité que soit préservé le secret de son identité comme l'article 326 du Code civil l'y autorisait ; qu'à cet égard il convient de préciser que le tuteur a porté à la connaissance de la Cour et du Ministère Public le procès verbal établissant ce souhait d'anonymat de la mère et que l'enfant a été remis à sa demande à titre définitif au service de l'aide sociale à l'enfance ; que les époux X ..., ne démontrent pas en quoi la communication de ces documents aux seuls magistrats de l'ordre judiciaire prévue par les dispositions de l'article L. 221-7 du Code de l'action sociale et des familles méconnaîtrait le principe de la contradiction ou du procès équitable étant rappelé que le lien avec l'enfant auquel ils prétendent n'est pas établi, la "possession d'état de grands-parents" qu'ils mettent en avant ne pouvant résulter de la seule circonstance que le CNAOP ait répondu à leurs demandes ; qu'au demeurant, comme il a été dit, la volonté d'anonymat de la mère rend impossible l'établissement d'un lien de filiation dans la ligne maternelle ; que le jugement déclarant leur intervention volontaire irrecevable est ainsi confirmé ;
ALORS QUE la possession d'état s'établit par des faits qui révèlent le lien de parenté entre l'enfant et la famille à laquelle il appartient ; que, la reconnaissance de ce lien par l'autorité publique est suffisant dès lors que d'autres éléments constitutifs ont été rendus impossibles par des circonstances exceptionnelles ; que la Cour d'appel, qui n'a pas recherché si ce lien était suffisant à rattacher la demande des grands-parents biologiques à la requête en adoption plénière de l'enfant, a privé sa décision de base légale au regard des articles 311-1 du Code civil et 325 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable l'intervention volontaire des époux X ..., et prononcé l'adoption plénière de l'enfant C ..., ;
AUX MOTIFS QUE c'est par des motifs exacts et pertinents que la Cour adopte que les premiers juges ont retenu que l'intervention volontaire des époux X ..., était irrecevable au regard des dispositions des articles 66 et 31 du Code de procédure civile dès lors que le lien de filiation unissant prétendument l'enfant à feu D ... X ..., n'était pas établi, de même par conséquent que le lien allégué entre l'enfant et eux, et ne pouvait pas l'être dès lors que la mère avait souhaité que soit préservé le secret de son identité comme l'article 326 du Code civil l'y autorisait ; qu'à cet égard il convient de préciser que le tuteur a porté à la connaissance de la Cour et du Ministère Public le procès verbal établissant ce souhait d'anonymat de la mère et que l'enfant a été remis à sa demande à titre définitif au service de l'aide sociale à l'enfance ; que les époux X ..., ne démontrent pas en quoi la communication de ces documents aux seuls magistrats de l'ordre judiciaire prévue par les dispositions de l'article L 221-7 du Code de l'action sociale et des familles méconnaîtrait le principe de la contradiction ou du procès équitable étant rappelé que le lien avec l'enfant auquel ils prétendent n'est pas établi, la "possession d'état de grands-parents" qu'ils mettent en avant ne pouvant résulter de la seule circonstance que le CNAOP ait répondu à leurs demandes ; qu'au demeurant, comme il a été dit, la volonté d'anonymat de la mère rend impossible l'établissement d'un lien de filiation dans la ligne maternelle ; que le tribunal a justement estimé que les conditions de l'adoption plénière par les époux Z ..., étant réunies il convenait de la prononcer, étant observé que les craintes exprimées par le Ministère Public quant aux conditions de vie actuelles de l'enfant et de la conformité de l'adoption à son intérêt ont été levées par le dernier rapport de suivi en date du 14 novembre 2007 qui constate son épanouissement auprès des adoptants ;
ALORS D'UNE PART QUE l'adoption plénière ne peut être prononcée que si elle est conforme à l'intérêt de l'enfant ; qu'à ce titre, l'enfant a, dès sa naissance, et dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents ;
que, dès lors, le juge doit apprécier cet intérêt compte tenu de la réalité de sa situation, élément essentiel de la construction de son histoire personnelle, de sorte que la Cour d'appel, en statuant comme elle l'a fait, a violé l'article 7-1 de la Convention de New York du 26 janvier 1990, et l'article 353 du Code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE l'adoption plénière emporte rupture irrévocable des liens de l'enfant avec sa famille biologique ; que la Cour d'appel qui a refusé de rechercher, comme elle y était invitée, si une solution moins radicale n'était pas de nature à répondre à l'intérêt actuel et futur de l'enfant, dont les grands-parents biologiques revendiquaient l'établissement de relations personnelles avec lui, a violé ensemble les articles 353, 371-4 du Code civil et 1173 du Code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable l'intervention volontaire des époux X ..., et prononcé l'adoption plénière de l'enfant C ..., ;
AUX MOTIFS QUE c'est par des motifs exacts et pertinents que la Cour adopte que les premiers juges ont retenu que l'intervention volontaire des époux X ..., était irrecevable au regard des dispositions des articles 66 et 31 du CPC dès lors que le lien de filiation unissant prétendument l'enfant à feu D ... X ..., n'était pas établi, de même par conséquent que le lien allégué entre l'enfant et eux, et ne pouvait pas l'être dès lors que la mère avait souhaité que soit préservé le secret de son identité comme l'article 326 du Code civil l'y autorisait ; qu'à cet égard il convient de préciser que le tuteur a porté à la connaissance de la Cour et du Ministère Public le procès verbal établissant ce souhait d'anonymat de la mère et que l'enfant a été remis à sa demande à titre définitif au service de l'aide sociale à l'enfance ; que les époux X... , ne démontrent pas en quoi la communication de ces documents aux seuls magistrats de l'ordre judiciaire prévue par les dispositions de l'article L. 221-7 du code de l'action sociale et des familles méconnaîtrait le principe de la contradiction ou du procès équitable étant rappelé que le lien avec l'enfant auquel ils prétendent n'est pas établi, la "possession d'état de grands-parents" qu'ils mettent en avant ne pouvant résulter de la seule circonstance que le CNAOP ait répondu à leurs demandes ; qu'au demeurant, comme il a été dit, la volonté d'anonymat de la mère rend impossible l'établissement d'un lien de filiation dans la ligne maternelle ; que le tribunal a justement estimé que les conditions de l'adoption plénière par les époux Z ..., étant réunies il convenait de la prononcer, étant observé que les craintes exprimées par le ministère public quant aux conditions de vie actuelles de l'enfant et de la conformité de l'adoption à son intérêt ont été levées par le dernier rapport de suivi en date du 14 novembre 2007 qui constate son épanouissement auprès des adoptants ;
ALORS D'UNE PART QUE chacun a droit au respect de sa vie familiale ; que les grands-parents biologiques peuvent invoquer ce droit au respect pour entretenir des relations personnelles avec leur petit-fils ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et 371-4 du Code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE chacun a droit au respect de sa vie familiale ;
qu'à ce titre, l'enfant placé en vue de son adoption plénière a le droit de connaître ses grands-parents biologiques et d'entretenir des relations personnelles avec eux afin de ne pas être coupé de ses racines ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a encore violé les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et 371-4 du Code civil.
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Filiation
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.