par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 4 juin 2009, 08-15093
Dictionnaire Juridique
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
4 juin 2009, 08-15.093
Cette décision est visée dans la définition :
Recel
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Gérard X... est décédé le 7 octobre 1990, en laissant pour lui succéder son épouse en secondes noces, Mme Y..., les deux enfants issus de leur mariage, M. Philippe-Gérard X... et Mme Sylvie X... , épouse Z..., et un enfant issu d'un premier mariage, Mme Rosemée X..., épouse B..., et en l'état d'un testament instituant son épouse légataire de la quotité disponible la plus étendue entre époux ; qu'après avoir été assignée en délivrance du legs consenti à Mme Y..., ayant opté pour 1 / 4 des biens en pleine propriété et les trois quarts en usufruit, Mme B... a contesté la validité du testament et soutenu, notamment, que son père avait consenti des donations déguisées à son épouse et à leurs deux enfants pour l'acquisition de divers biens immobiliers et que les primes des contrats d'assurance-vie souscrits par le défunt au profit de Mme Y..., manifestement exagérées, devaient être rapportées à la succession et a demandé qu'il soit fait application de la sanction du recel ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour débouter Mme B... de ses demandes, l'arrêt attaqué énonce, par motifs propres, qu'" il n'y a pas de recel successoral imputable aux consorts X...- Y..., ni manoeuvre de ses adversaires en vue d'éviter un partage successoral en cours, la cour faisant siennes les réponses apportées par ces derniers aux allégations de l'appelante dans leurs abondantes mais exactes écritures dans la mesure où les pièces qu'ils ont fournies à l'appui confirment la réalité de leur thèse, alors que celles produites par Mme X...- B... sont insuffisantes à soutenir la sienne quand elles ne la démentent pas comme le plus souvent " ;
Qu'en se déterminant ainsi, par la seule référence à l'exposé des moyens des intimés et aux pièces produites, sans analyser, même de façon sommaire, les éléments soumis à son appréciation, la cour d'appel a méconnu les exigences des textes susvisés ;
Et sur la deuxième branche du moyen :
Vu l'article 792 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 ;
Attendu que, pour débouter Mme B... de ses demandes, l'arrêt énonce encore, par motifs adoptés, que " le recel successoral n'est pas davantage démontré, le fait par le de cujus d'avoir souscrit des contrats d'assurance-vie au profit de certains de ses héritiers étant à cet égard inopérant, de même que des achats réalisés de son vivant en indivision avec certains de ses héritiers ; qu'en effet, le recel ne peut être commis que par les héritiers et non par le de cujus et les indemnités résultant des contrats d'assurance-vie n'entrent pas dans la masse successorale " ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la dissimulation volontaire par l'héritier gratifié des libéralités qui lui ont été consenties est constitutive d'un recel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et encore sur la troisième branche du moyen :
Vu l'article L. 132-3 du code des assurances, ensemble l'article 792 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 ;
Attendu que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait par les motifs adoptés sus-énoncés ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, lorsqu'elles sont manifestement exagérées eu égard aux facultés du souscripteur, les sommes versées à titre de primes d'un contrat d'assurance-vie constituent des libéralités dont il doit être tenu compte dans la liquidation de la succession et qui peuvent influer sur la détermination des droits des héritiers, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme il lui était demandé, si les primes payées par Gérard X... n'étaient pas manifestement exagérées eu égard à ses facultés, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme B... de ses demandes tendant au rapport à la succession, par les consorts Y...- X... des donations déguisées et des primes des contrats d'assurance-vie, et à l'application de la sanction du recel, l'arrêt rendu le 16 octobre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne M. Philippe-Gérard X... , Mme Sylvie X... , épouse Z... et Mme Marise Y..., épouse X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit par la SCP Bachellier et Potier de La Varde, avocat aux Conseils pour Mme Rosemée X..., épouse B....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame B... de ses demandes tendant à voir ordonner le rapport à la succession des donations déguisées faites à Madame Y... et ses deux enfants sous forme d'acquisitions en leur nom et de contrats d'assurance-vie et de voir appliquer à ces actes, la sanction de recel ;
- AUX MOTIFS, propres, QU'il n'y a notamment pas de recel successoral imputable aux intimés ou à deux d'entre eux comme le soutient à tort Mme X...- B..., ni manoeuvre de ses adversaires en vue d'éviter un partage successoral en cours, la Cour faisant siennes les réponses apportées par ces derniers aux allégations de l'appelante dans leurs abondantes mais exactes écritures dans la mesure où les pièces qu'ils ont fournies à l'appui confirment la réalité de leur thèse, alors que celles produites par Mme X...- B... sont insuffisantes à soutenir la sienne quand elles ne la démentent pas comme plus souvent ;
- ET, adoptés du jugement, QUE le recel successoral invoqué par Rosemée X... n'est pas davantage démontré, le fait par le de cujus d'avoir souscrit des contrats d'assurance-vie au bénéfice de certains de ses héritiers étant à cet égard inopérant, de même que des achats réalisés de son vivant en indivision avec certains de ses héritiers ; qu'en effet, le recel ne peut être commis que par les héritiers, et non par le de cujus, et les indemnités résultant de contrats d'assurance-vie n'entrent pas dans la masse successorale ;
ALORS QUE, d'une part, tout jugement doit comporter une motivation qui se suffit à elle-même ; que la Cour d'appel, en se bornant, pour écarter les prétentions de Madame B..., à adopter les conclusions d'appel des intimés et à se référer aux pièces qu'ils ont fournies sans reproduire les passages de ces conclusions qui ont emporté sa conviction et sans désigner et analyser les pièces qu'elle retenait, a entaché son arrêt d'un défaut de motifs et violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, d'autre part la non-révélation par le bénéficiaire de donations déguisées ou indirectes qu'il a reçues peut constituer un recel ; qu'ainsi en l'espèce où Madame B... faisait valoir que les acquisitions réalisées au nom de Madame Y... et de ses enfants, qui étaient démunis de ressources, constituaient des donations déguisées constitutives de recel, la Cour d'appel, en retenant, par adoption des motifs du jugement, que le recel ne peut être commis par le de cujus, a violé l'article 792 du Code civil ;
ALORS QU'enfin, selon l'article L. 132-3 du Code des assurances, les primes d'assurance-vie sont rapportables à la succession lorsqu'elles sont manifestement exagérées eu égard aux facultés du souscripteur ; qu'ainsi, la Cour d'appel en se bornant à relever, par adoption des motifs du jugement pour écarter le recel, que les indemnités résultant de contrats d'assurance-vie n'entrent pas dans la masse successorale, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les primes n'étaient pas exagérées par rapport aux revenus de M. X..., a privé son arrêt de base légale au regard du texte précité et de l'article 792 du Code civil.
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Cette décision est visée dans la définition :
Recel
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.