par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 2, 23 février 2017, 16-12859
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
23 février 2017, 16-12.859
Cette décision est visée dans la définition :
Reconventionnelle
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles 70 et 567 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme X..., propriétaires dans un lotissement de deux lots dont l'un constitue un passage, ont assigné leurs voisins, M. et Mme Y..., devant un tribunal de grande instance afin de leur voir interdire le service de cette parcelle qu'ils utilisent pour accéder à leur propre fonds ; que M. et Mme Y... ont conclu au rejet de la demande puis ont interjeté appel du jugement l'ayant accueillie en demandant pour la première fois devant la cour d'appel que soit constaté leur droit de propriété sur la parcelle litigieuse par le jeu de la prescription acquisitive ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable la prétention de M. et Mme Y... à la propriété de la parcelle, l'arrêt retient que s'il est de principe que la demande reconventionnelle est recevable lorsqu'elle est formée pour la première fois en appel, la recevabilité de la demande de déclaration de propriété indivise du chemin présentée par M. et Mme Y... à la cour doit s'apprécier au regard de leur prétention originaire à la reconnaissance d'une servitude et que leur prétention à la propriété n'étant pas virtuellement comprise dans leur précédente demande, n'en étant ni l'accessoire, la conséquence ou le complément et ne tendant pas aux mêmes fins que celle soumise au premier juge, elle est nouvelle et irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la recevabilité de la demande de M. et Mme Y... tendant à voir constater leur droit de propriété sur la parcelle litigieuse, formée pour la première fois en cause d'appel et qui revêtait un caractère reconventionnel, devait s'apprécier au regard du lien éventuel la rattachant à la prétention originaire de M. et Mme X... tendant à leur interdire l'usage de ladite parcelle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. et Mme X... à payer à M. et Mme Y... la somme globale de 3 000 euros ; rejette la demande de M. et Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois février deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a déclaré irrecevable, comme nouvelle en cause d'appel, la demande reconventionnelle formée par M. et Mme Y..., visant à faire constater un droit de propriété indivise sur la parcelle AK 380, ensemble confirmé le jugement entrepris en tant qu'il a rejeté l'existence d'une servitude ;
AUX MOTIFS QUE « il est de principe que la demande reconventionnelle est recevable lorsqu'elle est formée pour la première fois en appel ; cependant, en défense à l'action de M. et Mme X... tendant à leur voir interdire le passage, M. et Mme Y... s'étaient portés demandeurs en reconnaissance d'une servitude de passage sur le chemin ; la recevabilité de leur demande de déclaration de propriété indivise de ce chemin, présentée à la cour, doit s'apprécier au regard de leur prétention originaire à la reconnaissance d'une servitude, seule soumise au premier juge ; la prétention à la propriété n'étant pas virtuellement comprise dans leur précédente demande, n'en étant ni l'accessoire, la conséquence ou le complément et ne tendant pas aux mêmes fins que celle soumise au premier juge, il convient de la dire nouvelle et, appliquant la sanction de l'article 564 du code de procédure civile, de la déclarer irrecevable » ;
ALORS QUE, premièrement, si les articles 564 à 567 du Code de procédure civile régissent la recevabilité des demandes nouvelles formées en cause d'appel, lorsqu'elles émanent du demandeur originaire, qui introduit la procédure devant le premier juge, le défendeur de première instance qui forme une demande reconventionnelle pour la première fois en cause d'appel, n'est soumis qu'à l'article 567 ; qu'en faisant application de l'article 564, les juges du fond ont violé par fausse application l'article 564 du Code de procédure civile et par refus d'application l'article 567 ;
ALORS QUE, deuxièmement, en s'interrogeant sur le point de savoir si les demandes tendaient aux mêmes fins, les juges du fond ont fait application de l'article 565 ; que toutefois, ce texte était inapplicable comme ne concernant que le demandeur originaire formulant pour la première fois une demande en cause d'appel ; qu'à cet égard, l'arrêt doit être censuré pour violation par fausse application de l'article 565 et par refus d'application l'article 567 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, troisièmement, en faisant référence à l'idée d'une demande virtuellement comprise dans la demande de première instance, les juges du fond se sont référés à l'article 566 ; que toutefois, ce texte n'était pas applicable puisque ne concernant que la demande formulée par le demandeur originaire en première instance ; que de ce point de vue, l'arrêt doit être censuré pour violation par fausse application de l'article 566 et par refus d'application l'article 567 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, quatrièmement, en application des articles 70 et 567 du Code de procédure civile, que la jurisprudence combine, la comparaison qui doit être faite, pour s'assurer du lien suffisant, commande de rapprocher la demande reconventionnelle formulée par le défendeur de première instance en cause d'appel et la demande formulée en première instance par le demandeur originaire, autrement dit celui qui a introduit la procédure devant le premier juge ; qu'en procédant à une comparaison entre la demande formulée pour la première fois en cause d'appel par M. et Mme Y... et les demandes qu'ils avaient formulées en première instance, les juges du fond ont commis une erreur de droit ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué encourt la censure pour violation de l'article 567.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a déclaré irrecevable, comme nouvelle en cause d'appel, la demande reconventionnelle formée par M. et Mme Y..., visant à faire constater un droit de propriété indivise sur la parcelle AK 380, ensemble confirmé le jugement entrepris en tant qu'il a rejeté l'existence d'une servitude ;
AUX MOTIFS QUE « il est de principe que la demande reconventionnelle est recevable lorsqu'elle est formée pour la première fois en appel ; cependant, en défense à l'action de M. et Mme X... tendant à leur voir interdire le passage, M. et Mme Y... s'étaient portés demandeurs en reconnaissance d'une servitude de passage sur le chemin ; la recevabilité de leur demande de déclaration de propriété indivise de ce chemin, présentée à la cour, doit s'apprécier au regard de leur prétention originaire à la reconnaissance d'une servitude, seule soumise au premier juge ; la prétention à la propriété n'étant pas virtuellement comprise dans leur précédente demande, n'en étant ni l'accessoire, la conséquence ou le complément et ne tendant pas aux mêmes fins que celle soumise au premier juge, il convient de la dire nouvelle et, appliquant la sanction de l'article 564 du code de procédure civile, de la déclarer irrecevable » ;
ALORS QUE, premièrement, à supposer par impossible que la demande reconventionnelle formulée par le défendeur originaire, pour la première fois en cause d'appel, puisse être assujettie aux articles 564 à 566, l'article 564 autorise en toute hypothèse la formulation d'une demande nouvelle en cause d'appel si elle a pour objet de faire écarter la prétention adverse ; qu'en l'espèce, la demande de M. et Mme Y... visant à faire constater à leur profit un droit de propriété indivise, sur la parcelle litigieuse, avait pour objet de faire écarter la demande de M. et Mme X..., visant à faire juger que M. et Mme Y... en tant que propriétaires de leurs parcelles, n'avaient aucun droit sur la parcelle AK 380 ; qu'ainsi, les juges du fond ont en tout état de cause violé l'article 564 du Code de procédure civile ;
ET ALORS QUE, deuxièmement, et en toute hypothèse, les juges du fond auraient dû à tout le moins rechercher si la demande visant à faire constater un droit de propriété indivise n'avait pas pour objet de faire échec à la demande de M. et Mme X... ; qu'ainsi, l'arrêt souffre à tout le moins d'un défaut de base légale au regard de l'article 564.
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Cette décision est visée dans la définition :
Reconventionnelle
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