par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 21 juin 2011, 10-22790
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Cour de cassation, chambre commerciale
21 juin 2011, 10-22.790

Cette décision est visée dans la définition :
Expert judiciaire




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Donne acte à la société Auditec Provence et à M. X... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Axa France IARD ;

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 9 mars 2010), que M. Y..., artisan coiffeur, avait pour expert-comptable M. X..., gérant de la société Auditec Provence, dont les statuts stipulaient que "les experts-comptables assument dans tous les cas la responsabilité de leurs travaux et activités" et que la" responsabilité propre de la société laisse subsister la responsabilité personnelle de chaque expert-comptable en raison de travaux qu'il exécute lui-même pour le compte de la société" ; qu'imputant à M. X... la responsabilité de l'absence d'établissement de déclarations fiscales et sociales ayant entraîné le paiement de pénalités, M. Y... l'a assigné en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que M. X... et la société Auditec Provence font grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable la demande de M. Y... dirigée contre M. X..., gérant de la société Auditec alors, selon le moyen, que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'elles ne nuisent point aux tiers et ne peuvent leur profiter ; que la stipulation des statuts sur laquelle s'est fondée la cour d'appel ne permettait pas à un tiers d'agir contre un associé personnellement, mais seulement à la société actionnée par ce tiers de se retourner contre l'associé ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1165 du code civil ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 12 de l'ordonnance du 19 septembre 1945, la responsabilité propre des sociétés membres de l'ordre et des associations de gestion et de comptabilité laisse subsister la responsabilité personnelle de chaque expert-comptable ou salarié mentionné à l'article 83 ter et à l'article 83 quater à raison des travaux qu'il exécute lui-même pour le compte de ces sociétés ou associations ; qu'ayant retenu, par motifs adoptés, que le client de l'expert-comptable a le choix de rechercher la responsabilité soit de l'associé d'une société expertise comptable, soit de la société elle-même, la cour d'appel a, à bon droit, condamné M. X... à paiement ; que le moyen est inopérant ;

Et attendu que le second moyen, pris en ses deux branches, ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... et la société Auditec Provence aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à M. Y... la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Blanc et Rousseau, avocat aux Conseils, pour la société Auditec France et autre

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable la demande de Monsieur Y... dirigée contre Monsieur X..., gérant de la SARL Auditec Provence ;

Aux motifs que les statuts de la société Auditec Provence stipulaient que «les experts-comptables assument dans tous les cas la responsabilité de leurs travaux et activités. La responsabilité propre de la société laisse subsister la responsabilité personnelle de chaque expert-comptable en raison de travaux qu'il exécute lui-même pour le compte de la société » ; que Monsieur Y... avait confié la gestion de sa comptabilité à Monsieur X... ; que les premiers juges avaient retenu à bon droit que l'action dirigée contre Monsieur X... personnellement était recevable ;

Alors que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ;
qu'elles ne nuisent point aux tiers et ne peuvent leur profiter ; que la stipulation des statuts sur laquelle s'est fondée la cour d'appel ne permettait pas à un tiers d'agir contre un associé personnellement, mais seulement à la société actionnée par ce tiers de se retourner contre l'associé (violation de l'article 1165 du code civil).

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur X... à payer des dommages-intérêts à Monsieur Y... ;

Aux motifs adoptés des premiers juges que l'expert-comptable ne pouvait s'exonérer de sa responsabilité en se retranchant derrière l'incurie de son client ou en alléguant ses instructions ; que Monsieur Y... avait dû supporter des pénalités et des redressements en raison de l'absence des diverses déclarations auprès de l'URSSAF ou des Impôts ; que Monsieur X... s'était limité à un rôle formel insuffisant au regard de ses obligations de conseil et d'assistance ; que Monsieur Y..., accaparé par la création de son entreprise, n'avait, ni le temps, ni les compétences, pour percevoir les exigences d'une comptabilité rigoureuse, ni les conséquences d'une gestion hasardeuse ; que Monsieur X... s'était borné, par courrier, à rappeler à son client les dates limites des diligences à effectuer et qu'il ne justifiait d'aucune réaction de sa part lorsque Monsieur Y... lui avait fait part de son impossibilité à analyser son chiffre d'affaires ;

Et aux motifs propres que, par des motifs pertinents, les premiers juges avaient retenu à bon droit que l'expert-comptable était investi d'une mission générale comportant un devoir de conseil et d'assistance ;

Alors que 1°) l'expert comptable, tenu d'une obligation de moyen et non de résultat, ne peut accomplir sa mission d'établissement des comptes et de déclarations fiscale et sociale sans la coopération de son client qui est tenu de lui fournir les éléments et documents, que seul il détient, nécessaires à l'accomplissement de cette mission ; qu'en ayant énoncé que «l'expert-comptable ne peut chercher à s'exonérer de sa responsabilité en se retranchant derrière l'incurie de son client », la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Alors que 2°) en ayant énoncé que Monsieur X... s'était limité à un rôle formel très largement insuffisant, que Monsieur Y... n'avait pas le temps ni les capacités pour percevoir les exigences d'une comptabilité rigoureuse et les conséquences d'une gestion hasardeuse, que Monsieur X... s'était borné à rappeler à son client par courrier les dates limites des diligences à effectuer et qu'il ne justifiait d'aucune réaction de sa part lorsque Monsieur Y... lui avait fait part de son impossibilité à analyser son chiffre d'affaires, quand Monsieur X... avait fait valoir, dans ses conclusions, qu'il avait à plusieurs reprises demandé à Monsieur Y... de lui fournir les éléments et documents qu'il détenait, nécessaires à l'établissement de sa comptabilité et aux déclarations fiscale et sociale, que, sans réponse de sa part, il lui avait le 26 avril 2001 adressé une lettre recommandée avec demande d'avis de réception pour les lui réclamer, lettre dans laquelle il ne lui rappelait pas seulement les délais de déclaration mais aussi les conséquences du non-respect de ces délais en matière de majorations et de pénalités de retard, que Monsieur Y... ne lui avait répondu qu'après l'expiration de ces délais, par une lettre du 19 juillet 2001, qu'il était dans l'impossibilité d'analyser son chiffre d'affaires et de lui fournir ces éléments et documents nécessaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.



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Cette décision est visée dans la définition :
Expert judiciaire


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