par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 25 juin 2009, 08-16434
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
25 juin 2009, 08-16.434
Cette décision est visée dans la définition :
Prêt
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu que se prétendant créancière à l'égard de Mme X... de sommes d'argent représentant les soldes de deux prêts qu'elle avait consentis à celle-ci et à son mari, ainsi que le solde débiteur d'un compte de dépôt ouvert au nom de ces derniers, la société BNP, devenue BNP Paribas (la banque), a assigné en paiement Mme X..., laquelle a formé une demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts pour manquement de la banque à son devoir de mise en garde lors de l'octroi des prêts ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué (Toulouse, 1er avril 2008) rendu sur renvoi après cassation (1re chambre civile, 13 février 2007, pourvoi Y 04-17.287) d'accueillir la demande principale et de rejeter la demande reconventionnelle, alors, selon le moyen :
1°/ que l'obligation de mise en garde du banquier à l'égard d'un emprunteur non averti lui impose de vérifier les capacités financières de celui-ci avant de lui apporter son concours et de l'alerter sur les risques d'endettement nés de l'octroi des prêts ; qu'en considérant que la BNP Paribas avait satisfait à ce devoir de mise en garde en faisant remplir aux époux X... une fiche d'informations sommaires sur laquelle ils avaient dit être propriétaires de leur résidence principale depuis 1970 alors qu'ils n'étaient qu'usufruitiers et n'ont acquis la propriété de cet immeuble que le 28 décembre 2000, et avaient déclaré disposer d'un revenu moyen annuel de 27 013 euros, soit un revenu disponible mensuel de 2 251,16 euros de sorte qu'après remboursement mensuel des échéances, les époux X... bénéficieraient d'un montant mensuel de 1 513,11 euros pour faire face aux besoins de la vie courante, sans procéder à aucune vérification ni même solliciter la fourniture d'avis d'imposition, ce qui lui aurait permis de constater que les revenus professionnels de M. X..., agent commercial, n'étaient pas réguliers, soit déficitaires de 40 013 francs en 1998, bénéficiaires de 147 644 francs en 1999 et déficitaires à nouveau de 49 939 francs en 2000, si bien que M. X... a déposé son bilan en 2001, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
2°/ que c'est à la banque qu'il incombe d'établir avoir satisfait au devoir de mise en garde auquel elle est tenue à l'égard de l'emprunteur non averti à raison des capacités financières de celui-ci et des risques d'endettement nés de l'octroi des prêts ; qu'en considérant que Mme X... n'apportait ainsi aucun élément précis tendant à démontrer une quelconque faute de la banque dans son devoir de mise en garde à l'égard d'emprunteurs profanes, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du code civil ;
3°/ qu'il résulte des avis d'imposition sur les revenus 1998, 1999 et 2000 versés aux débats que les revenus professionnels de M. X..., agent commercial, n'étaient pas réguliers, déficitaires de 40 013 francs en 1998, bénéficiaires de 147 644 francs en 1999 et déficitaires à nouveau de 49 939 francs en 2000 si bien que M. X... a dû déposer son bilan en 2001 ; qu'en considérant que Mme X... n'apportait aucun élément précis tendant à démontrer une quelconque faute de la banque dans son devoir de mise en garde à l'égard d'emprunteurs profanes sans s'expliquer sur ces pièces versées aux débats, la cour d'appel a de surcroît privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1315 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, devant laquelle il était prétendu que la banque avait manqué à son devoir de mise en garde à l'égard des époux X... pour leur avoir octroyé, sans vérification, des prêts disproportionnés à leurs revenus, a, sans inverser la charge de la preuve, ni avoir à s'expliquer sur un avis d'imposition établi postérieurement à l'octroi des prêts, constaté, au vu tant des autres avis d'imposition que d'une fiche de renseignements remplie par les époux X... à la demande de la banque, à laquelle il ne peut être reproché de s'être fondée sur des informations erronées sur la composition de leur patrimoine immobilier sciemment fournies par ceux-ci, que la banque avait vérifié les capacités financières des emprunteurs, lesquelles leur permettaient de répondre des engagements par eux souscrits ; qu'elle en a déduit que le manquement ainsi imputé à la banque n'était pas établi ; qu'aucun des griefs n'est donc fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Mme Françoise Y..., épouse X..., à payer à la SA BNP PARIBAS les sommes suivantes : 16 677,90 au titre du prêt outre intérêts au taux de 8,04 % à compter du 20 novembre 2001, 13 028,91 au titre du prêt outre intérêts au taux de 12,75 % à compter du 7 novembre 2001, 2 430,02 au titre du compte outre intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2001 et rejeté toutes conclusions contraires ou plus amples des parties ;
AUX MOTIFS QUE sur la qualité des emprunteurs : il n'est pas contesté par la banque que les époux X... étaient emprunteurs profanes.
Sur le devoir de mise en garde de la banque à l'égard de ses clients emprunteurs profanes :
Françoise X... reproche à la banque un manquement à ses obligations de conseil et d'information en relevant qu'à la date de la souscription des deux prêts en 1999 et 2000 d'un montant total de 216 000 F, le revenu annuel moyen du ménage ne dépassait pas 177 000 F entre 1998 et 2000. La banque fait observer qu'avant d'accorder ses concours, elle disposait des informations suivantes : M. X... exerçait la profession libérale d'agent commercial en matière immobilière ... les époux X... se déclaraient propriétaires depuis janvier 1970 de leur résidence principale située ... ... ils disposaient d'un revenu moyen annuel de 27 013, soit un revenu disponible mensuel de 2 251,16. Les échéances de remboursement mensuel des prêts souscrits en mars 1999 et avril 2000 s'élevaient à 433,16 + 304,89 soit au total à 738,05. Les époux X... bénéficiaient donc d'un revenu disponible, après règlement des échéances des prêts, d'un montant mensuel de 1 513,11 pour faire face aux besoins de la vie courante. La banque précise qu'après vérification, Françoise X... n'était en réalité qu'usufruitière de la résidence qu'ils occupaient mais qu'elle a acquis la pleine propriété de l'immeuble le 28 décembre 2000 et qu'ainsi, à la date de souscription des prêts, les époux X... n'avaient pas de charge de loyer. Par ailleurs, ils n'avaient aucune charge de famille et avaient déclaré à la banque disposer d'un revenu mensuel après déduction des charges de plus de 1 200. La BNP PARIBAS a donc vérifié les capacités financières des époux X... avant de consentir ses concours. Leurs revenus permettaient bien aux époux X... de régler les échéances des prêts et l'évolution du patrimoine de Françoise X..., notamment la résidence principale évaluée en 2000 à 2 millions de francs (soit 300 000 environ) n'a fait que conforter leurs capacités financières afin de répondre de leurs engagements auprès de la banque. Enfin, à la date des contrats de prêts, la banque ne disposait pas d'informations concernant l'évolution de la situation professionnelle de M. X... qui a déposé le bilan en 2001 ; en effet, les fiches d'information remplies par les époux X... ne renseignaient pas la banque sur d'éventuelles difficultés professionnelles de M. X... . Françoise X... n'apporte ainsi aucun élément précis tendant à démontrer une quelconque faute de la banque dans son devoir de mise en garde à l'égard d'emprunteurs profanes qui, en l'espèce, présentaient les capacités financières suffisantes pour répondre de leurs engagements bancaires. Il convient de la débouter de sa demande de dommages-intérêts à défaut de faute prouvée de la banque. Il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Françoise X... à payer la SA BNP PARIBAS des prêts consentis assortis des intérêts conventionnels et à compter des mises en demeure ainsi que de rembourser le solde débiteur du compte dépôt ;
1) ALORS QUE l'obligation de mise en garde du banquier à l'égard d'un emprunteur non averti lui impose de vérifier les capacités financières de celui-ci avant de lui apporter son concours et de l'alerter sur les risques d'endettement nés de l'octroi des prêts ; qu'en considérant que la BNP PARIBAS avait satisfait à ce devoir de mise en garde en faisant remplir aux époux X... une fiche d'informations sommaires sur laquelle ils avaient dit être propriétaires de leur résidence principale depuis 1970 alors qu'ils n'étaient qu'usufruitiers et n'ont acquis la propriété de cet immeuble que le 28 décembre 2000, et avaient déclaré disposer d'un revenu moyen annuel de 27 013, soit un revenu disponible mensuel de 2 251,16, de sorte qu'après remboursement mensuel des échéances, les époux X... bénéficieraient d'un montant mensuel de 1 513,11 pour faire face aux besoins de la vie courante, sans procéder à aucune vérification ni même solliciter la fourniture d'avis d'imposition, ce qui lui aurait permis de constater que les revenus professionnels de M. X..., agent commercial, n'étaient pas réguliers, soit déficitaires de 40 013 F en 1998, bénéficiaires de 147 644 F en 1999 et déficitaires à nouveau de 49 939 F en 2000, si bien que M. X... a déposé son bilan en 2001, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
2) ALORS QUE c'est à la banque qu'il incombe d'établir avoir satisfait au devoir de mise en garde auquel elle est tenue à l'égard de l'emprunteur non averti à raison des capacités financières de celui-ci et des risques d'endettement nés de l'octroi des prêts ; qu'en considérant que Françoise X... n'apportait ainsi aucun élément précis tendant à démontrer une quelconque faute de la banque dans son devoir de mise en garde à l'égard d'emprunteurs profanes, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du code civil ;
3) ALORS QU'il résulte des avis d'imposition sur les revenus 1998, 1999 et 2000 versés aux débats que les revenus professionnels de M. X..., agent commercial, n'étaient pas réguliers, déficitaires de 40 013 F en 1998, bénéficiaires de 147 644 F en 1999 et déficitaires à nouveau de 49 939 F en 2000 si bien que M. X... a dû déposer son bilan en 2001 ; qu'en considérant que Mme X... n'apportait aucun élément précis tendant à démonter une quelconque faute de la banque dans son devoir de mise en garde à l'égard d'emprunteurs profanes sans s'expliquer sur ces pièces versées aux débats, la cour d'appel a de surcroît privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1315 du code civil.
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Prêt
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.