par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 21 septembre 2011, 09-69927
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Cour de cassation, chambre sociale
21 septembre 2011, 09-69.927

Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Propriété intellectuelle
Droit du Travail




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 6 février 2001 par la société Finaxo environnement en qualité de technicien de création, a été licencié pour faute grave le 12 janvier 2007, l'employeur lui reprochant d'avoir déposé en octobre 2004, sans l'en informer, un brevet d'invention en rapport direct avec l'activité qu'il exerçait au sein de la société dans le but de l'exploiter à titre personnel, manquant ainsi à son obligation de loyauté ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à M. X... diverses sommes à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires et congés payés afférents, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il appartient au salarié d'étayer sa demande d'heures supplémentaires ; qu'en affirmant péremptoirement que le salarié produisait aux débats "des éléments", la cour d'appel, qui n'a pas exposé en quoi ils étaient de nature à étayer sa demande, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

2°/ que seules donnent lieu à rémunération les heures supplémentaires accomplies à la demande de l'employeur, ou avec son accord au moins implicite ; qu'en faisant droit à la demande de paiement des heures supplémentaires formée par le salarié sans nullement rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'employeur avait donné son accord même implicite pour leur réalisation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3171-4 et L. 3121-22 du code du travail ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a retenu que le salarié avait produit, pour étayer sa demande d'heures supplémentaires, des éléments sur lesquels l'employeur avait été en mesure de répondre, d'autre part, qu'elle en a, considérant implicitement mais nécessairement que ces heures supplémentaires avaient été accomplies avec l'accord de l'employeur, souverainement apprécié le montant ; qu'elle a ainsi justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle, ensemble les articles L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

Attendu que l'invention faite par le salarié dans l'exécution du contrat de travail comportant une mission inventive appartient à l'employeur ;

Attendu que pour dire le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que n'est pas établie la preuve que M. X... avait travaillé à l'élaboration de ce projet dans le cadre de ses activités salariales ni que l'invention avait été réalisée au moyen de techniques de la société et de connaissances acquises auprès de celle-ci ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher au préalable si le contrat de travail de M. X... comportait une mission inventive, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 21 juillet 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par Mme Mazars, conseiller doyen en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt et un septembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Finaxo environnement.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le pourvoi fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné la société FINAXO ENVIRONNEMENT à régler à monsieur X... les sommes de 1.554,32 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, 155,43 euros à titre de congés payés afférents, 4.054,76 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 405,47 euros à titre de congés payés afférents, 2.474,37 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et 16.218 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que 1.700 euros au titre de l'article du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, il est notamment reproché à monsieur X... : - d'avoir déposé en octobre 2004 un brevet ayant un rapport direct avec l'activité du département polyester dont il avait la responsabilité et qui a dû fermer trois mois auparavant faute de concept nouveau et rentable, - de ne pas avoir informé la société FINAXO qu'il exerçait une activité personnelle pour laquelle il avait créé un site internet ; qu'il est constant que le département Polyester a été arrêté en juin 2004, avec des licenciements pour motif économique en avril 2004 ; que le brevet de monsieur X... a été déposé plusieurs mois après l'arrêt de l'activité du département ; que rien ne démontre que monsieur X... ait travaillé sur son projet, à titre personnel, antérieurement à la fermeture du département Polyester ; que la référence à un « moulage Polyester ou matière plastique PVC ou ABS » est insuffisante à caractériser l'existence d'un lien direct entre l'activité du département et le brevet déposé par monsieur X... ; que contrairement aux allégations de l'appelante, il n'existe aucun élément précis et circonstancié de nature à établir l'existence d‘un tel lien ; que l'allusion à la prise de contact avec un client de la société ne suffit pas à caractériser un comportement déloyal ; qu'aucune pièce n'établit plus généralement que l'invention de monsieur X... – en l'espèce un SPA de plein air – ait été réalisé grâce à la connaissance ou à l'utilisation de techniques propres à la SA FINAXO ENVIRONNEMENT ; qu'au contraire d'anciens salariés de la société FINAXO ENVIRONNEMENT attestent de l'absence de rapport entre l'activité de la société et les procédés utilisés dans le cadre de l'invention de monsieur X... (cf notamment attestations de M. Y... et de Mme Z... en date du 4 avril 2007) ; qu'au vu de ces éléments, le défaut d'information allégué ne suffit pas à caractériser à lui seule une cause réelle et sérieuse de licenciement et a fortiori une cause grave ; qu'il n'est pas démontré que l'intimé ait manqué à son obligation de loyauté en utilisant à des fins personnelles les moyens mis à la disposition de son employeur à une époque où il exerçait les fonctions de responsable du site Polyester ; qu'il n'est de surcroît pas établi que ce dernier ait eu l'intention de nuire ou de frauder les intérêts de la société alors qu'il était chargé professionnellement de trouver des inventions susceptibles d'être commercialisées et de rentabiliser le département en crise ; que c'est aux termes d'une exacte appréciation que les premiers juges ont considéré le licenciement comme dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que c'est également au terme d'une exacte appréciation des documents produits que le conseil de prud'hommes a condamné la société FINAXO ENVIRONNEMENT à verser à monsieur X... les sommes suivantes : - 1.554,32 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, - 155,43 euros à titre de congés payés afférents, - 4.054,76 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, - 405,47 euros à titre de congés payés afférents, - 2.474,37 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, - 16.218 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QU'il n'est pas contesté que le département Polyester de la SA FINAXO ENVIRONNEMENT a été arrêté en juin 2004, avec des licenciements économiques en avril 2004 ; que l'employeur ne peut avoir comme argument que monsieur X... a attendu l'arrêt de l'activité pour déposer son brevet, celui-ci ne pouvait pas savoir que l'activité polyester allait s'arrêter ; qu'au surplus le brevet de monsieur X... n'est pas en polyester (au vu des documents produits) ; que monsieur X... produit des éléments précis faisant état qu'il a travaillé sur son invention en dehors de ses heures de travail ; que l'employeur ne produit pas d'éléments objectifs et précis démontrant que monsieur X... aurait réalisé son invention grâce à la connaissance ou l'utilisation de moyens ou techniques spécifiques de la SA FINAXO ENVIRONNEMENT ; que la SA FINAXO ENVIRONNEMENT ne produit aucun élément démontrant ou pouvant démontrer la propriété de l'invention MOOVIPOOL ; que la société SA FINAXO ENVIRONNEMENT ne peut prétendre avoir des droits sur l'invention de monsieur X... (SPA MOOVIPOOL) ; que monsieur X... n'a commis aucune faute ; que les motifs invoqués dans la lettre de licenciement ne sont pas justifiés, que l'employeur n'apporte pas d'éléments probants ; que le licenciement de monsieur X... ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse ; que le conseil de prud'hommes estime faire droit aux demandes de monsieur X... à hauteur de - 1.554,32 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire - 155,43 euros à titre de congés payés afférents - 4.054,76 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis - 405,47 euros à titre de congés payés afférents - 2.474,37 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement - 16.218 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

ALORS QUE constitue une invention de mission attribuable à l'employeur l'invention dont le salarié, qui en est l'auteur, exerce des fonctions ou des tâches comportant ou impliquant une mission inventive ; que dans cette hypothèse, il appartient au salarié qui revendique la propriété de son invention, de démontrer que son invention n'a aucun rapport avec l'activité de l'entreprise ; qu'en l'espèce, la société FINAXO ENVIRONNEMENT faisait valoir que les fonctions de monsieur X... comportaient une mission inventive dès lors qu'il avait été engagé en qualité de « technicien de création » promu à des fonctions d'encadrement, ce que le salarié reconnaissait expressément en rappelant dans ses conclusions d'appel avoir inventé, « pour le compte de la société » et avant le « plan d'eau électrique artificiel » litigieux, une « maison écologique flottante » pour laquelle il déplorait ne pas avoir perçu de rémunération spécifique (v. conclusions d'appel du salarié p.4 et 5), outre que la société produisait le curriculum vitae du salarié établi par ses propres soins et diffusé sur internet, aux termes duquel il confirmait encore avoir été au sein de la société « Responsable de fabrication du département résine/polyester. Etude de projet/devis/création/réalisation. Fabrication de prototypes », et encore un courriel du salarié en date du 8 janvier 2007 dans lequel il reconnaissait expressément qu'il aurait dû informer son employeur du dépôt du brevet litigieux mais le menaçait, pour limiter les effets de sa faute, de divulguer aux clients de l'employeur une affaire susceptible de porter atteinte à son image, avant de lui proposer d'envisager une transaction ; qu'en affirmant qu'il n'était pas établi par l'employeur que le salarié aurait travaillé pendant ses horaires de travail, qu'il aurait utilisé des techniques propres à la société, qu'il y aurait un lien « direct » entre le département au sein duquel il travaillait et les procédés utilisés dans le cadre de l'invention litigieuse, outre que le brevet avait été déposé en octobre 2004 après que l'activité du département polyester avait cessé en juin 2004, sans à aucune moment s'interroger sur les fonctions exercées par le salarié dont la société établissait, notamment par l'aveu du salarié, qu'elles comportaient une « mission inventive » au sens de l'article L.611-7-1 du code de la propriété intellectuelle, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1235-1, L.1234-1, L.1234-5, et L.1234-9 du code du travail ;

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le pourvoi fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société FINAXO ENVIRONNEMENT à payer à monsieur X... les sommes de 1.199,84 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires de septembre à octobre 2005 et de 119,98 euros à titre de congés payés afférents, ainsi que 1.700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE c'est au terme d'une exacte appréciation des documents produits que le conseil de prud'hommes a condamné la société FINAXO ENVIRONNEMENT à verser à monsieur X... les sommes suivantes : - 1.199,84 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires de septembre à octobre 2005, - 119,98 euros à titre de congés payés afférents ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE au vu des éléments produits aux débats par monsieur X... concernant le rappel d'heures supplémentaires de septembre et octobre 2005, que l'employeur ne produit aucun élément, le conseil de prud'hommes fait droit à la demande à hauteur de 1.199,84 euros outre les congés payés pour 119,98 euros ;

1. ALORS QU'il appartient au salarié d'étayer sa demande d'heures supplémentaires ; qu'en affirmant péremptoirement que le salarié produisait aux débats « des éléments », la Cour d'appel, qui n'a pas exposé en quoi ils étaient de nature à étayer sa demande, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 3171-4 du Code du travail.


2. ALORS subsidiairement QUE seules donnent lieu à rémunération les heures supplémentaires accomplies à la demande de l'employeur, ou avec son accord au moins implicite ; qu'en faisant droit à la demande de paiement des heures supplémentaires formée par le salarié sans nullement rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'employeur avait donné son accord même implicite pour leur réalisation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.3171-4 et L.3121-22 du Code du travail ;



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Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Propriété intellectuelle
Droit du Travail


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.