par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 16 septembre 2009, 08-42212
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Cour de cassation, chambre sociale
16 septembre 2009, 08-42.212

Cette décision est visée dans la définition :
Droit du Travail




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 20 mars 2008), que M. X... , qui était salarié de la société Volkswagen finance, a été engagé par la société "Groupe Volkswagen France" le 1er février 1999 en qualité de conseiller d'affaires pour la région Ouest ; qu'après avoir été en arrêt de travail à partir du 15 juin 2003, le salarié a été déclaré à l'issue de deux examens médicaux, inapte à tous postes dans l'entreprise le 15 juin 2004 ; qu'il a été licencié le 6 août 2004 en raison de son inaptitude physique et de l'impossibilité de reclassement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à M. X... diverses sommes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque le médecin a conclu à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'entreprise et à l'impossibilité totale de le reclasser, l'employeur est exonéré de toute obligation de reclassement à son égard ; qu'en affirmant l'inverse, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-2 et L. 1226-4 (ex article L. 122-24-4) du code du travail ;

2°/ que l'employeur qui, en face d'un avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise, sollicite à trois reprises le médecin du travail aux fins que celui-ci l'éclaire sur les moyens d'assurer le reclassement du salarié, auquel il est à chaque fois répondu que tout reclassement du salarié est impossible quel que soit le poste envisagé et qui propose néanmoins onze postes de travail au salarié, suffisamment diversifiés pour permettre à celui-ci de faire un choix conforme à ce qu'il croit être ses capacités, fait nécessairement preuve d'une recherche active, sérieuse et individualisée de reclassement ; qu'en affirmant l'inverse, la cour d'appel a violé les articles L. 1226- 2 et L. 1226-4 (ex article L. 122-24-4) du code du travail ;

3°/ qu'en affirmant que les descriptifs de poste remis à M. X... au cours de l'entretien préalable, n'étaient pas précis quand ceux-ci précisaient l'intitulé du poste, le contenu exact de la fonction, lequel était notamment décrit au travers d'un rubrique dite "tâches clé" ou "mission" particulièrement détaillée, le service et l'autorité hiérarchique à laquelle le salarié serait rattaché, ce qui permettait ainsi de localiser les postes considérés et, enfin, les compétences nécessaires à l'exercice de la fonction, la cour d'appel les a dénaturés en violation de l'article 1134 du code civil ;

4°/ que la société Volkswagen faisait valoir dans ses conclusions d'appel, en s'appuyant à cet égard sur les termes particulièrement éloquents d'une lettre adressée par le médecin du travail au médecin traitant de M. X... le 1er septembre 2003, que son licenciement était le résultat d'une collusion frauduleuse entre celui-ci et les deux médecins, lesquels avaient décidé, d'un commun accord, dès le mois de septembre 2003, c'est à dire un an avant le constat d'inaptitude, de faire déclarer M. X... inapte à tout emploi dans l'entreprise aux fins de lui permettre de quitter la société Volkswagen dans le cadre d'un licenciement ; qu'en ne répondant pas ce moyen des conclusions d'appel de la société Volkswagen, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que l'avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à tout emploi dans l'entreprise, ne dispense pas l'employeur, quelle que soit la position prise par le salarié, de rechercher des possibilités de reclassement par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient ;

Attendu, ensuite, qu'il résulte de l'article L. 241 10 1, devenu L. 4624 1 du code du travail, que l'avis alors émis par le médecin du travail, seul habilité à constater une inaptitude au travail, peut faire l'objet tant de la part de l'employeur que du salarié d'un recours administratif devant l'inspecteur du travail ; qu'en l'absence d'un tel recours cet avis s'impose aux parties ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel, appréciant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et sans les dénaturer, a constaté que l'employeur ne justifiait pas des démarches et des recherches qu'il avait pu entreprendre pour tenter de procéder au reclassement du salarié tant au niveau de l'entreprise que du groupe ; qu'elle a pu en déduire, sans avoir à répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Groupe Volkswagen France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Groupe Volkswagen France à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour la société Groupe Volkswagen France

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société VOLKSWAGEN à payer à Monsieur X... une somme de 31.000 à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre 13.079,67 au titre du préavis et 1.307,97 au titre des congés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur Eric X... a été licencié le 6 août 2004 pour inaptitude totale et définitive à son poste et impossibilité de le reclasser au sein du Groupe VOLKSWAGEN FRANCE ;que Monsieur X... a été déclaré inapte à son poste de travail par le médecin du travail à l'issue des 2 visites de reprise qui se sont déroulées les 1er et 15 juin 2004 ; qu'interrogé à plusieurs reprises par la société VOLKSWAGEN le médecin du travail a fait savoir à cette dernière qu'en réalité Monsieur X... était inapte à tous les postes au sein de cette entreprise et que son reclassement n'était pas possible ; qu'il convient de rappeler que ces avis du médecin du travail ne dispensent pas l'employeur, quelle que soit la position prise alors par le salarié, de rechercher les possibilités de reclassement au sein de l'entreprise et le cas échéant du Groupe auquel elle appartient, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation ou transformation ou aménagement du poste de travail ; est également constant que les offres de reclassement doivent faire l'objet de propositions précises, concrètes et personnalisées ; que si l'employeur a adressé plusieurs courriers au médecin du travail, il ne justifie pas toutefois des démarches et des recherches qu' il a pu entreprendre pour tenter de procéder au reclassement de Monsieur X... tant au niveau de l'entreprise que du Groupe ; que lors de l'entretien préalable il s'est borné à présenter au salarié un certain nombre de fiches d'offres d'emploi types libellées ainsi : "Groupe VOLKSWAGEN FRANCE recherche... ", mentionnant les missions, les taches clés et le profil recherché (études, expérience, maîtrise de l'anglais, de l'outil informatique..) et précisant que les candidatures étaient à adresser à la Direction des ressources humaines et de la formation qui ferait un premier tri sélectif ; que la présentation (ou la remise, peu importe) de tels documents ne peut être assimilée ni à une réelle recherche de reclassement, ni à une proposition écrite individualisée et précise, ces fiches ne faisant en outre état ni de la rémunération ni du lieu de travail et n'étant pas personnellement destinées à Monsieur X... ; qu'il s'ensuit qu'au regard de ces éléments la société n'a pas respecté son obligation de reclassement étant précisé qu'elle ne pouvait uniquement se baser sur les avis et conclusions du médecin du travail pour éluder ses obligations et qu'elle ne peut davantage se prévaloir de la position du salarié consistant à dire qu'il ne souhaitait pas réintégrer la société en raison de problèmes liés au comportement de l'employeur à son égard d'autant qu'en l'absence de propositions écrites et détaillées et le concernant personnellement l'intéressé n'avait pas été en mesure de prendre une décision en toute connaissance de cause ;

ALORS, D'UNE PART, QUE lorsque le médecin a conclu à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'entreprise et à l'impossibilité totale de le reclasser, l'employeur est exonéré de toute obligation de reclassement à son égard ; qu'en affirmant l'inverse, la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-2 et L. 1226-4 (ex article L. 122-24-4) du Code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE l'employeur qui, en face d'un avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise, sollicite à trois reprises le médecin du travail aux fins que celui-ci l'éclaire sur les moyens d'assurer le reclassement du salarié, auquel il est à chaque fois répondu que tout reclassement du salarié est impossible quel que soit le poste envisagé et qui propose néanmoins onze postes de travail au salarié, suffisamment diversifiés pour permettre à celui-ci de faire un choix conforme à ce qu'il croit être ses capacités, fait nécessairement preuve d'une recherche active, sérieuse et individualisée de reclassement ; qu'en affirmant l'inverse, la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-2 et L. 1226-4 (ex article L. 122-24-4) du Code du travail ;

ALORS, DE TROISIEME PART ET TOUJOURS SUBSIDIAIREMENT, QU'en affirmant que les descriptifs de poste remis à Monsieur X... au cours de l'entretien préalable, n'étaient pas précis quand ceux-ci précisaient l'intitulé du poste, le contenu exact de la fonction, lequel était notamment décrit au travers d'un rubrique dite « tâches clé » ou « mission » particulièrement détaillée, le service et l'autorité hiérarchique à laquelle le salarié serait rattaché, ce qui permettait ainsi de localiser les postes considérés et, enfin, les compétences nécessaires à l'exercice de la fonction, la Cour d'appel les a dénaturés en violation de l'article 1134 du Code civil ;

ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la société VOLKSWAGEN faisait valoir dans ses conclusions d'appel (p. 3 et p. 17 et 18), en s'appuyant à cet égard sur les termes particulièrement éloquents d'une lettre adressée par le médecin du travail au médecin traitant de Monsieur X... le 1er septembre 2003 (production n°4), que son licenciement était le résultat d'une collusion frauduleuse entre celui-ci et les deux médecins, lesquels avaient décidé, d'un commun accord, dès le mois de septembre 2003, c'est à dire un an avant le constat d'inaptitude, de faire déclarer Monsieur X... inapte à tout emploi dans l'entreprise aux fins de lui permettre de quitter la société VOLKSWAGEN dans le cadre d'un licenciement ; qu'en ne répondant pas ce moyen des conclusions d'appel de la société VOLKSWAGEN, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société VOLKSWAGEN au paiement d'une somme de 4.000 à titre de dommagesintérêts pour défaut d'exécution loyale du contrat de travail ;

AUX MOTIFS QU'il résulte des pièces versées aux débats en premier lieu qu'au cours de l'année 2002 Monsieur X... a été peu à peu mis à l'écart en cessant d'être destinataire d'un certain nombre de courriels adressés pourtant à l'ensemble de ses collègues pour les informer de la mise en place d'un audit, d'une étude de partenariat avec la MAIF et en n'étant pas convié à certaines réunions, visites ou séminaires qui le concernaient au même titre que ses collègues et ce sans qu'aucune explication valable ne lui soit fournie ; qu'en deuxième lieu, après avoir été muté à la direction vente marketing VOLKSWAGEN à compter du 1er août 2002 et soumis à une période probatoire de 3 mois renouvelable une fois à l'issue de laquelle en janvier 2003 il a été confirmé dans ses fonctions, il lui a été demandé en mars 2003, soit 2 mois après, de rejoindre son ancienne direction du développement stratégie et opérations réseau pour travailler sur l'ensemble des marques, toujours sans explication ; qu'en troisième lieu, l'entretien annuel de performance (développement de 2002 qui s'est déroulé au début de l'année 2003 n'a porté que sur la période d'août 2002 à décembre 2002 sans prendre en compte les 7 premiers mois de l'année ; que l'accumulation de ces faits et de ces brimades qui ont eu en coutre des répercussions sur l'état de santé de Monsieur X..., contraint de prendre un arrêt de maladie relève d'une exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail de lapait de l'employeur qui justifie l'octroi de dommages intérêts ;

ALORS QUE la bonne foi contractuelle étant présumée, il incombe au salarié de démontrer que les décisions prises par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction l'ont en réalité été pour des raisons étrangères à cet intérêt, ou bien qu'elles ont été mises en oeuvre dans des conditions exclusives de toute bonne foi contractuelle ; qu'en affirmant que l'employeur avait manqué à son obligation d'exécution loyale du contrat de travail sans énoncer en quoi les différents éléments relevés par elle caractérisaient des « brimades » ou, plus généralement, excédaient les limites raisonnables du pouvoir de direction de l'employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 1222-1 (ex article L. 120-4) du Code du travail ;

ALORS, EN OUTRE, QU'en se référant de manière générale au « pièces versées aux débats » sans préciser de quelles pièces il s'agissait, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.



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Cette décision est visée dans la définition :
Droit du Travail


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.